L'ancien patron de l'athlétisme russe craint des poursuites
Athlétisme lundi, 18 janv. 2016. 14:21 dimanche, 15 déc. 2024. 15:42MOSCOU, Russie - Ancien patron de la Fédération russe d'athlétisme, Valentin Balakhnitchev estime qu'il existe un « réel danger » qu'il soit poursuivi par la justice française pour des accusations de dopage et de corruption dont il nie toute responsabilité.
Ce Russe de 66 ans, qui fut aussi trésorier de la Fédération internationale d'athlétisme (IAAF) de 2011 à 2014, a été suspendu à vie au début du mois par la commission d'éthique de l'IAAF. Il est accusé d'avoir accepté des pots-de-vin en contrepartie de la couverture de pratiques dopantes chez des athlètes russes.
Mais celui qui fut le patron de l'athlétisme russe depuis la chute de l'URSS en 1991 jusqu'à sa démission en février 2015 plaide son innocence, assurant au contraire avoir tout fait pour empêcher les athlètes russes de se doper.
« Qu'est-ce que j'aurais pu faire de plus? », s'interroge l'ancien président de 66 ans. « Je n'allais pas non plus les tenir par la main ».
Pourtant, l'Agence mondiale antidopage (AMA) dit être en possession de preuves incriminant M. Balakhnitchev. Dick Pound, qui a dirigé la commission indépendante ayant révélé le scandale, assure même que celles-ci ont été transmises à la justice française, qui pilote le volet judiciaire de l'affaire, lancé en novembre par Interpol.
« Si les choses vont dans ce sens, avec les documents que M. Pound dit avoir transmis à la justice française, alors bien sûr il y a un vrai danger que ça soit utilisé contre moi », assure-t-il à l'AFP.
« J'ai peur, mais je ne vois rien qui pourrait attirer leur intérêt », ajoute-t-il alors qu'Interpol a déjà lancé un mandat d'arrêt international contre Papa Massata Diack, le fils de l'ancien président de l'IAAF Lamine Diack.
Le second volet du rapport de l'AMA, dévoilé la semaine dernière, relie Papa Massata Diack et Valentin Balakhnitchev à un étrange accord passé à Moscou en 2012 au cours duquel les droits télévisés des championnats du monde d'athlétisme 2013 à Moscou seraient passés de 6 à 25 millions de dollars.
« Mouton noir » de l'athlétisme
La procureure française chargée de l'affaire, Eliane Houlette, a affirmé la semaine dernière que la France avait saisi 1,8 million d'euros sur un compte appartenant à Valentin Balakhnitchev afin d'enquêter sur ses « flux financiers ».
L'ancien patron de l'athlétisme russe a confirmé que ce compte en banque avait été bloqué.
« J'ai amassé cet argent pendant 20 ans. L'argent était déclaré en Russie, je ne crois pas avoir violé quoique ce soit », déclare-t-il.
Valentin Balakhnitchev nie aussi les accusations portées par Lamine Diack, qui affirme avoir reçu une aide financière de la Russie pour aider le président sénégalais Macky Sall à battre Abdoulaye Wade, lors des élections présidentielles de 2012.
« Lamine Diack m'a parlé de sa participation à ces élections et a exprimé son opposition à l'ancien président. Notre conversation s'est limitée à ça », ajoute l'ancien trésorier de l'IAAF.
Il se prépare désormais à faire appel de sa suspension à vie de l'IAAF, tout en continuant à dénoncer le « deux poids, deux mesures » de l'organisation internationale.
Les responsables politiques russes, à commencer par le ministre des Sports Vitali Moutko, ont eux aussi blâmé la dimension « politique » du rapport de l'AMA, mais ont prudemment pris leur distance de Valentin Balakhnitchev, devenu le mouton noir de l'athlétisme russe.
M. Moutko a ainsi assuré que la Russie n'avait rien à voir avec les accusations portés contre Balakhnitchev et que celles-ci étaient « le problème de l'IAAF ».
Mais les premiers perdants de ce scandale sont les athlètes russes, qui ne sauront pas avant mars, au plus tôt, s'ils auront le droit de participer aux Jeux olympiques de Rio.
Pour M. Balakhnitchev, la participation de la sauteuse à la perche Elena Isinbayeva ou du spécialiste du 110 m haies Sergey Shubenkov aux JO 2016 relève d'une « décision politique ».
« C'est une situation politique », assure-t-il. « Cela n'a rien à voir avec le dopage, et je suis devenu otage de la situation ».