VIENNE - La Fédération internationale d'athlétisme (IAAF) a maintenu sa suspension de l'équipe russe d'athlétisme pour les Jeux olympiques de Rio de Janeiro, rendant ainsi une décision historique qui sanctionne la puissance mondiale en raison d'un scandale de dopage organisé.

Le ministre russe des sports a été informé de la décision par l'IAAF, qui a jugé que le pays n'en avait pas fait assez pour mériter sa réintégration.

Une suspension de toutes compétitions internationales avait été imposée au mois de novembre dernier à la suite d'un rapport d'une commission indépendante de l'Agence mondiale antidopage (AMA) qui avait dévoilé l'existence au sein de l'athlétisme russe d'un système généralisé de dopage, de dissimulations et de corruption.

Le président Vladimir Poutine a condamné la décision, affirmant qu'il espérait toujours une « solution quelconque » qui permettrait aux Russes de prendre part aux Jeux de Rio.

« Les athlètes propres ne devraient pas payer le prix », a-t-il déclaré au cours d'une conférence devant des dirigeants d'agences de presse internationales à St-Pétersbourg.

La Russie n'accepte pas la « sanction collective » pour tous les athlètes, a ajouté Poutine, comparant la suspension de l'équipe entière à une sentence de prison imposée à une "famille entière" dans le cas où une de leurs connaissances commettait un crime.

Le ministre russe s'est dit « extrêmement déçu » de la décision de suspendre toute l'équipe d'une participation aux JO. Il a lancé un appel au CIO de « considérer l'impact que l'exclusion de nos athlètes aura sur les rêves et la population russe. »

Le Comité international olympique (CIO) a planifié un sommet des dirigeants sportifs, mardi prochain, pour aborder « la difficile décision entre la responsabilité collective et la justice individuelle. »

Cette réunion pourrait éventuellement ouvrir la porte aux athlètes russes, qui n'ont jamais fait l'objet d'un cas de dopage, d'obtenir la permission de concourir aux jeux sous la bannière olympique.

« Nous examinerons la prochaine étape, a déclaré le vice-président du CIO, John Coates, plus tôt dans la journée. C'est le CIO qui effectue les contrôles et qui teste de nouveau les échantillons. Le débat mardi prochain tournera autour de la question de la justice et des droits individuels. »

La décision de maintenir la suspension a été prise pendant une réunion du conseil de l'IAAF. Elle a agi sur la base des recommandations d'un groupe de travail spécial qui a effectué le suivi des efforts de réforme de la Russie.

Cette réunion a eu lieu deux jours après un nouveau rapport accablant de l'AMA, qui fait mention d'obstructions et de violations des contrôles de dépistage en Russie.

« Nous sommes extrêmement déçus de la décision de l'IAAF de maintenir la suspension de tous les membres de notre équipe d'athlétisme, ce qui crée une situation sans précédent où les athlètes de toute une nation sont bannis des Jeux olympiques, a déclaré le ministre russe des sports.

« Les rêves des athlètes sans reproche sont détruits en raison du comportement répréhensible d'autres athlètes et responsables. Ils ont sacrifié des années de leur vie pour participer aux Jeux olympiques et maintenant leurs sacrifices semblent avoir été fait en vain.

« Nous en appelons maintenant aux membres du Comité international olympique de ne pas tenir compte seulement de l'impact que la suspension de nos athlètes aura sur leurs rêves et sur la population russe, mais aussi que les Jeux olympiques eux-mêmes souffriront de leur absence. Les jeux sont censés être une source d'unité, et nous espérons qu'ils demeurent une façon de rassembler les gens. »

Dernier plaidoyer

L'IAAF est resté de glace malgré un plaidoyer de dernière minute du ministre Vitaly Mutko, qui a affirmé que le pays avait fait le ménage et répondu à toutes les exigences relatives à sa réintégration.

« Nous croyons fermement que les athlètes propres ne doivent pas être sanctionnés pour les actions des autres, a-t-il écrit dans une lettre ouverte au président de l'IAAF, Sebastian Coe. La Russie est en train de faire tout son possible pour assurer que nos athlètes participent à des Jeux olympiques propres et équitables. À la lumière de nos efforts, je vous exhorte à reconsidérer la suspension de nos athlètes. »

La double olympienne du saut à la perche Yelena Isinbayeva figure parmi les athlètes russes qui espèrent participer aux Jeux de Rio. Elle a menacé de s'adresser au tribunal des droits humains si elle est exclue des jeux. D'autres causes pourraient se retrouver dans le Tribunal arbitral du sport.

De nombreux responsables sportifs et des groupes d'athlètes à l'extérieur de la Russie avaient demandé à l'IAAF et au CIO d'adopter la ligne dure, soulignant une perte de confiance dans l'ensemble du système de dépistage. La preuve que l'État a couvert ce scandale de dopage devrait suffire à disqualifier tous les membres de l'équipe d'athlétisme, ont-ils soutenu.

L'ancien président de l'AMA, Richard Pound, dont le rapport a mené à la suspension de la Russie, a déclaré qu'il voyait peu de raisons de lever la suspension.

« Je ne pense pas que c'est une décision facile à prendre de tout pardonner, a-t-il déclaré à l'Associated Press. Beaucoup de crédibilité est en jeu pour les Russes, l'IAAF et le CIO. Si vous êtes convaincu que c'est un système organisé par l'État, vos athlètes doivent en payer le prix. »