Ed Whitlock, le vieux qui court
Course à pied dimanche, 15 mai 2016. 11:25 samedi, 14 déc. 2024. 22:10Parfois il y a de ces histoires qui nous réconcilient avec l'idée que nous vieillissons tous inévitablement. Des histoires qui nous font réaliser que les super-héros, avec leurs pouvoirs surnaturels, n’existent pas que dans les livres pour enfants.
Celui dont je vais vous parler a le pouvoir de repousser le temps. Un peu comme si le poids des années était incapable de lui faire plier les genoux. Sa capacité d’endurance est hors norme. C’est à se demander s’il est un humain! C'est une belle histoire qui nous permettra un moment d'oublier tous ces scandales de dopage qui affectent l'image du sport.
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En tenant compte de l’âge, si je vous disais que le meilleur coureur de la planète est un Canadien, me croiriez-vous? Si j’ajoutais que cet athlète détient actuellement plus de 80 records du monde allant du 1500 mètres au marathon dans différents groupes d’âge, douteriez-vous de moi?
Eh bien, c’est pourtant la vérité. Cet homme, celui qui fait fi de sa vieillesse, c’est Ed Whitlock, un coureur idolâtré à travers la planète et qui, à l’âge de 85 ans, n’a pas l’intention d’arrêter de courir.
85 ans! C’est un détail important quand on termine un demi-marathon en 1:50:47 comme Whitlock vient de le faire à l’épreuve de Waterloo (24 avril). C’est un rythme de 5:15 du kilomètre pendant 21 kilomètres! L’Ontarien améliorait l’ancienne marque chez les 85-89 ans par plus de 9 minutes et devenait le premier homme de cet âge à courir cette distance en moins de deux heures. Malgré tout, il se disait déçu de sa performance puisqu’il croyait pouvoir faire mieux!
Une force de la nature
Ed Whitlock est un véritable phénomène. Lorsqu’on le regarde marcher lentement, du haut de ses 5 pieds et 7 pouces, sur sa frêle charpente de 112 livres, on ne se doute pas qu’on est face à un des meilleurs coureurs de la planète et de l’histoire. C’est presque une anomalie de la nature tellement il est inenvisageable de courir aussi vite à cet âge.
Grâce à sa course de Waterloo, il détient maintenant neuf records mondiaux sur le demi-marathon dans des catégories d’âges variées. Rien que ça!
Ce n’est là qu’une infime partie de son impressionnant palmarès. Ainsi, en 2003, il est devenu le premier homme de plus de 70 ans à courir sous la barrière des trois heures à un marathon (2:59:10). Depuis, il a fait mieux à de nombreuses reprises, ce qui n’est pas rien lorsqu’on sait que Whitlock ne rajeunit pas. À 73 ans, il a arrêté le chrono à 2:54:48, ce qui a fait dire à plusieurs spécialistes de l’athlétisme mondial qu’il s’agissait de la meilleure performance de l’histoire considérant l’âge du participant. Selon un tableau d’équivalence établi par la Fédération des maîtres, cela correspondrait à un temps de 2:03:57 pour un coureur de 20 ans.
Le plus étonnant, c’est que Whitlock n’aime pas beaucoup courir. En fait, il n’apprécie pas l’entraînement et ne se cache pas pour dire qu’il court non pas pour se garder en santé, mais plutôt pour battre des records. Son entraînement a ceci de particulier qu’il se déroule dans un cimetière non loin de chez lui. Au cours d’une semaine, il peut courir pendant des heures sur la petite boucle de 500 mètres qui encercle les tombes. Il affirme aimer cette tranquillité, l’ombre des arbres et le parcours plat. Il n’a aucun entraîneur, ne suit aucune diète particulière, ne veut rien savoir d’un GPS et encore moins d’écouter de la musique en courant.
La formule semble efficace pour celui qui s’était fait dire par un médecin spécialiste, il y a une quinzaine d’années, que ses sorties de course étaient terminées puisqu’il avait les genoux amochés. Après quelques semaines de repos, il a décidé de recommencer à courir et ne s’est jamais arrêté depuis. Au passage, soulignons qu’il a établi de multiples records du monde dans autant d’épreuves. Ils sont tous impressionnants. En voici quelques-uns :
Au 5 000 mètres, un rapide chrono de 19:07 chez les 75-79 ans et 20:58 chez les 80-84 ans.
Au 10 000 mètres, un incroyable 38:04 chez les 70-74 ans, 39:25 chez les 75-79 ans et 42:40 chez les 80-84 ans.
Au marathon, 3:05:54 chez les 75-79 et 3:15:54 chez les 80-84 ans.
Quand je vous disais que de voir courir Ed Whitlock nous réconciliait avec la vieillesse! Levez la main ceux qui croient être capables de courir aussi vite à ces âges vénérables.
Il s’agit bien sûr d’un cas d’exception, mais le résident de Milton nous prouve tout de même qu’il est possible de devenir vieux en refusant de baisser la garde. Pas étonnant qu’il possède son fan-club sur Facebook et qu’on lui demande si souvent son autographe lors de ses sorties publiques.
Il sera fascinant de suivre Whitlock au cours des prochaines années puisqu’il vient tout juste de célébrer son 85e anniversaire (6 mars). Cela signifie que les records de sa nouvelle catégorie d’âge (85-89 ans) n’ont qu’à bien se tenir!
Pour le moment, il entend consacrer son été à courir sur les distances en salle allant du 1 500 mètres au 10 000 mètres. Si tout va bien, il s’attaquera aux courses sur route avant l’automne. Le point culminant sera, bien sûr, un marathon. Après sa « décevante » performance au demi-marathon de Waterloo, Whitlock a déclaré qu’il devrait consacrer beaucoup plus d’heures à l’entraînement pour la distance reine. Il vise jusqu’à trois heures de courses quotidiennement sur le chemin du cimetière.
Ouf! Dois-je vous rappeler qu’il a 85 ans?
S’il juge que son entraînement pour le marathon n’est pas satisfaisant, il fera l’impasse sur la distance en 2016 et se préparera pour le Championnat du monde des maîtres qui se tiendra en Australie en octobre prochain.
Idéalement, Whitlock souhaite courir le plus longtemps possible ou jusqu’à son dernier souffle. Ça peut être long puisqu’on a l’habitude de vivre vieux dans sa famille. Très vieux. Un de ses oncles est décédé à 107 ans. On risque donc d’entendre parler de ce vieux coureur canadien pendant encore de longues années.