J.-J. Anderson toujours aussi passionné
Amateurs lundi, 25 janv. 2010. 12:55 samedi, 14 déc. 2024. 04:34STONEHAMÂ -- Âgé de 34 ans et à sa 14e saison sur le circuit de la Coupe du monde de surf des neiges, Jasey-Jay Anderson n'a rien perdu de sa passion pour son sport. Il en parle encore avec un tel
STONEHAM -- Âgé de 34 ans et à sa 14e saison sur le circuit de la Coupe du monde de surf des neiges, Jasey-Jay Anderson n'a rien perdu de sa passion pour son sport. Il en parle encore avec un tel enthousiasme qu'on a du mal à concevoir que le planchiste de Mont-Tremblant ait songé plus d'une fois à l'abandonner.
Et il lui en a fallu de la ténacité pour faire progresser son sport, aussi bien au Canada que sur la scène internationale. Car si le soutien technique et financier s'est manifesté ces dernières années en prévision des Jeux olympiques de Vancouver, il n'a pas toujours été aussi choyé.
"Il a fallu que je me réinvente plusieurs fois", a-t-il admis lors d'un entretien avec La Presse Canadienne lorsqu'on lui demande le secret de sa longévité.
S'il dit disposer aujourd'hui du "meilleur équipement qu'il n'a jamais eu", ce ne fut pas toujours le cas.
"J'ai remis mon sport et mon avenir en question à plusieurs reprises. Par deux fois, j'ai songé à la retraite en raison de l'absence d'équipement adéquat.
"À un certain moment, l'équipement allait tellement mal que je n'étais plus en mesure de compétitionner."
Adepte des épreuves alpines en surf des neiges, Anderson s'est donc résolu à se tourner vers le boarder cross pour "se garder en vie" en tant qu'athlète professionnel.
"Il y a quelques années, j'ai fait la transition de l'alpin vers le boarder cross même si mon coeur a toujours été vers l'alpin. Ça fonctionné quelques années. Puis nous avons bénéficié de plus de soutien grâce aux programmes en marge des Jeux de Vancouver. Cela m'a permis de me rééquiper pour l'alpin."
En début de carrière, Anderson a également connu un passage à vide quand il s'est séparé de son entraîneur des premières heures.
"Je dépendais beaucoup de lui et je me suis retrouvé un peu dans le vide. Il m'a fallu apprendre à me 'coacher' moi-même. Heureusement, j'ai été capable de prendre mon deuxième souffle."
Une autre fois, ce sont des raisons financières qui l'ont presque poussé à renoncer. Pendant trois ans, soit avant et peu après les Jeux de Turin, il dit avoir vécu au seuil de la pauvreté.
Mais à chaque fois, sa persévérance a été plus forte. Et il s'en félicite aujourd'hui.
"Il y a toujours quelque chose qui m'a retenu d'abandonner. Je me disais que c'est un sport qui a beaucoup de potentiel et je voulais vraiment voir la fin de l'aventure. Je suis en train de la vivre en ce moment. Si j'arrêtais demain, je serais un homme comblé.
"Que ce soit au niveau des résultats, de l'évolution de l'équipement, de l'encadrement, du financement, tous les éléments sont maintenant en place. Et ça tombe que c'est probablement ma dernière année."
Aspiration olympique
Au fil de sa carrière, Jasey Jay Anderson a tout gagné... sauf une médaille olympique. Son meilleur résultat en carrière aux Jeux demeure une 5e place en snowboard cross à Turin en 2006.
Quand on aborde le sujet avec lui, le lauréat de 26 victoires et 59 podiums sur le circuit de la Coupe du monde et de quatre titres de champion du monde refuse de jouer à l'autruche.
"C'est la première question que je me fais poser et c'est correct, dit-il. C'est important qu'on questionne le pourquoi. Je ne peux pas m'en vouloir de ne pas avoir remporté une médaille olympique car ça dépend d'un facteur hors de mon contrôle.
"Il y a eu un manque de soutien dans notre discipline, l'industrie n'est pas là et ça paraît dans les résultats. Qu'un athlète comme moi qui a eu toutes les opportunités de réaliser son potentiel n'y soit pas parvenu, c'est un peu triste."
Mais Anderson n'est pas du genre à regarder en arrière. Il est plutôt tourné vers ses prochains jeux.
"Ça prendrait une méchante malchance pour que ça ne passe pas cette fois, mentionne-t-il de ses ambitions et de celles de ses coéquipiers à Vancouver. Et c'est important qu'on obtienne de bonnes performances de façon à démontrer que lorsqu'on investit adéquatement, pas seulement financièrement mais aussi en ressources, les résultats suivent. Et nous allons le voir aux Olympiques. Les Canadiens vont performer au-delà de tous les autres pays. Je le souhaite et je le crois."
Et il est enchanté à l'idée de disputer les Jeux chez lui, au Canada.
"Disputer les Olympiques à la maison, c'est parfait, surtout à la fin d'une carrière. Si j'avais à écrire un roman, ça finirait comme ça, peu importe le résultat."
En mission
Après les Jeux olympiques de Vancouver, ses quatrièmes, Jasey Jay Anderson projette de prendre sa retraite pour de bon. Mais il n'abandonnera pas sa passion pour autant. Il s'est d'ailleurs trouvé une mission: développer encore davantage son sport à tous les niveaux.
"Il y a beaucoup de travail de développement à faire, que ce soit au niveau international, national et régional. Le surf des neiges est d'après-moi l'un des plus beaux sports d'hiver qu'on puisse pratiquer. Le niveau de blessure est beaucoup plus bas qu'en ski, c'est moins dispendieux. Malheureusement, c'est beaucoup plus difficile d'accès.
"C'est mon devoir, mon défi d'après carrière de rendre mon sport plus accessible pour les jeunes."
Et ce ne sont pas des paroles en l'air. Anderson a déjà des idées plein la tête et a même fait quelques approches.
"J'étudie, je questionne pour voir où sont les besoins. Mais la chose qui me semble prioritaire, c'est l'accessibilité à l'équipement. Pour le pratiquer, il faut que les jeunes disposent d'un bon équipement au meilleur coût possible. Ensuite, on pourra s'attaquer aux programmes."
Les dirigeants de Snowboard Canada se réjouissent de savoir qu'ils pourront continuer à bénéficier de son expertise.
"Même s'il voulait nous quitter, on le menotterait pour le garder, mentionne en riant Christian Hrab, directeur de la haute performance au sein de l'organisme qui régit le sport au pays. C'est un joueur important de l'industrie. Jasey Jay est un véritable visionnaire de notre sport. Pour le statu quo n'est pas satisfaisant. Techniquement, il repousse toujours les limites."
Un homme de principe
Si le surf des neiges occupe une place importante dans la vie de Jasey Jay Anderson, ce n'est pas la chose la plus importante. Pour lui, rien n'importe davantage que la vie de famille.
Marié et père de deux fillettes - Jora (4 ans) et Jy (3 ans) - il dit avoir bien hâte de passer plus de temps à la maison.
"La famille, c'est important pour moi. tre parent et avoir des gens qu'on aime en santé, ça vaut beaucoup plus que n'importe quelle médaille d'or ou exploit sportif."
Installé dans un environnement agréable au Mont-Tremblant, Anderson apprécie sa qualité de vie.
"C'est un environnement qui reflète bien nos valeurs. Tremblant, c'est exactement qui je suis. Mes parents sont à 20 minutes, les parents de Manon aussi. Nous avons une belle ferme de bleuets, qui nous permet de concilier le travail et une vie saine. Nous essayons de créer le meilleur environnement qui soit pour nos enfants et pour nous-mêmes. C'est une fierté pour moi."
Même s'il n'envisage pas de se consacrer à plein temps à sa ferme de bleuets une fois sa carrière terminée, comme il l'avait d'abord envisagé, ce projet entrepris voilà plusieurs années le tient à coeur.
"J'aurais aimé que ça devienne ma deuxième carrière. Mais je vois une plus grande nécessité à développer mon sport d'abord.
"L'idée de la bleuetière, c'était d'offrir un produit sain aux gens et de les inciter à manger mieux, plus de fruits et de légumes, d'acheter des produits locaux et bio. Ce sont des habitudes qui peuvent mener à des changements de vie."
Homme de principe lui-même, il n'est guère étonnant que ce soit des athlètes intègres qui lui servent d'inspiration.
"Plusieurs athlètes m'ont inspiré, sans que je puisse mettre le doigt sur un en particulier. Mais je peux penser à Lance Armstrong, qui a survécu à un cancer, ou à des athlètes comme Wayne Gretzky et Roger Federer, qui ont atteint le sommet de leur sport."