TORONTO - Quand Kaillie Humphries a annoncé qu'elle allait concourir contre des hommes à l'aube de la dernière saison, certains d'entre eux ont menacé d'abandonner le sport si elle les battait. L'étoile canadienne de bobsleigh féminin a préféré en rire, espérant leur faire ravaler leur parole.

Mais faire tomber la barrière des sexes n'a pas été facile pour la double championne olympique.

Au cours de la dernière saison, Humphries est devenue la première femme à participer à l'épreuve de bob à quatre aux Championnats mondiaux et sur le circuit de la Coupe du monde. De passage à Toronto pour faire la promotion d'un nouveau programme pour encourager les femmes à faire du sport, l'athlète de 29 ans originaire de Calgary est revenue sur une saison historique plus difficile qu'anticipé.

« J'ai certainement appris cette année que j'étais loin d'avoir fait mes preuves... il y a beaucoup de stéréotypes. Il y avait des défis psychologiques auxquels je ne m'attendais pas, a raconté Humphries. C'est un sport qui est dominé depuis longtemps par les hommes et je croyais savoir ce que cela signifiait. Mais c'est très différent de participer à une compétition contre des hommes. Le poste de départ est différent et leur manière d'approcher les courses est différente, l'intensité est différente, leur manière de penser, de fonctionner, comment ils interagissent entre eux... C'est quelque chose à quoi je dois m'adapter afin de connaître du succès. »

Humphries a remporté une deuxième médaille d'or de suite en bob à deux aux Jeux olympiques de Sotchi. Elle a ensuite réussi à convaincre la fédération mondiale de bobsleigh de permettre aux femmes de participer aux compétitions de bob à quatre, ce qu'elle a fait lors de la dernière saison, tout comme sa rivale américaine Elana Meyers Taylor.

Humphries a indiqué que l'accueil a été généralement positif - et parfois cocasse.

« Lors de la journée du bob à quatre, tout le monde aime ça, vous êtes dans la cabine au sommet de la pente, a-t-elle raconté. Les gars enlèvent leur chandail et enfilent leur combinaison de compétition, et bien sûr je fais la même chose. J'ai reçu quelques commentaires. Ils m'ont dit: "Tu ne peux pas faire ça!". Je ne comprenais pas. Ils m'ont répondu: "Tu portes de petits sous-vêtements roses et ça nous distrait". »

« Je leur ai répliqué: "Vous voyez comment je suis intelligente!". »

L'Américain Steven Holcomb, champion olympique en 2010 au bob à quatre, a émis des commentaires positifs sur Humphries en entrevue.

« Il a dit: "En bout de ligne, si Kaillie peut nous affronter, je veux voir ce qu'elle peut faire parce qu'elle est compétitive", a mentionné Humphries. Ça n'avait rien à voir avec le fait que je sois une femme. De l'entendre dire ça et de savoir qu'il connaît mes habiletés comme pilote et ce que je vise, c'était un énorme compliment. »

Humphries insiste pour rappeler que son combat pour participer au bob à quatre avec les hommes n'a rien à voir avec un combat des sexes. Elle espère que les femmes auront éventuellement leur propre compétition de bob à quatre.

« Et en attendant, je vais tout faire pour avoir du succès, simplement pour prouver à tout le monde que les femmes peuvent y arriver, a-t-elle dit. Et à ceux qui ont dit qu'ils voulaient abandonner le sport, je veux voir ce qu'ils vont faire quand je vais les battre. »

« Je ne pense pas qu'ils vont vraiment prendre leur retraite, mais je vais tout faire pour que ça arrive. Je veux prouver autant aux gars qu'aux filles que les habiletés sont des habiletés et qu'un athlète est un athlète. »