Il faut être très prudent lorsqu’on décide de faire un film sur une tragédie survenue il y a quelques années à peine. Les souvenirs sont encore frais dans la mémoire des victimes et ce serait leur manquer de respect si on ne s’appliquait pas à bien faire les choses ou ne pas respecter les faits.

Le film « Le jour des patriotes » (Patriot's Day) est à l’affiche depuis vendredi dernier sur les écrans des cinémas d’Amérique. Il met en scène le double attentant survenu au marathon de Boston en avril 2013. Un film à gros budget et à gros noms, comme celui de l’acteur Mark Walhberg, qui tient le rôle d’un sergent de la police bostonienne posté à quelques mètres de l’arrivée lorsque les deux bombes posées par les frères Djokhar et Tamerlan Tsarnaev explosent à quelques secondes d’intervalle. Trois personnes sont alors tuées et plus de 250 autres blessées. Le film met en lumière le courage et la force des habitants de la ville durant les heures qui ont suivi cette terrible attaque.

Je n’ai pas l’habitude de consacrer ma chronique de course à pied à une critique cinéma, mais ce film m’a interpellé puisque cette attaque terroriste est survenue lors de la présentation du plus prestigieux marathon de la planète. Je connaissais plusieurs personnes qui y prenaient part et je me souviens encore de l’effroi qui m’avait gagné, tout comme une vaste majorité de la communauté des coureurs, lorsque j’ai appris la nouvelle.

L’avion qui me ramenait d’Édimbourg venait tout juste d’atterrir à Montréal. Je m’étais rendu dans cette ville écossaise pour participer à un demi-marathon. Plusieurs de mes amis et connaissances savaient que j’étais parti quelque part sur la planète pour courir, si bien que lorsque j’ai allumé mon cellulaire en sortant de l’appareil, plusieurs dizaines de notifications d’appels manqués se sont affichées sur l’écran. J’avais tellement figé! Mais que se passait-il?

Plusieurs tentaient de me rejoindre, même des collègues de RDS, en pensant que j’étais à Boston. Ils voulaient à la fois être rassurés et savoir si je pouvais transmettre de l’information. De nombreux passagers, tout comme moi, étaient des coureurs qui revenaient d’Édimbourg et les explosions avaient immédiatement meublé les conversations. Une forme de chaos régnait. C’est un petit monde celui de la course à pied si bien qu’ils étaient nombreux à vouloir savoir ce qui se passait.

Bien sûr, les attentats n’étaient pas dirigés vers la communauté des coureurs. Les criminels avaient simplement profité de l’énorme foule qu’attire ce marathon pour commettre leurs méfaits. N’empêche, nous avons tous été conscients, ce jour-là, que rien ne serait plus pareil lors des prochaines courses organisées. La peur s’installait.

Mark WalhbergUn film réussi

J’ai adoré « Le jour des patriotes ». Tout particulièrement le réalisme qui s’en dégage. On a parfois l’impression qu’il s’agit d’un documentaire tellement les acteurs jouent « vrai ». Surtout, on a réussi à ne pas tomber dans une parodie hollywoodienne de la tragédie. Je le mentionnais plus tôt, c'eut été un immense manque de respect pour les victimes.

Ceux d'entrevous ayant déjà participé à un marathon ou à une course réunissant des milliers de coureurs reconnaîtront la frénésie qui s'empare de tous dans les heures précédant le départ. L'équipe de réalisation du film a largement puisé dans des images prises lors de la course de 2013, ce qui ajoute à la crédibilité du scénario. On voit la fatigue sur les visages des coureurs et leurs sourires lorsqu'ils franchissent le fil d'arrivée. Puis, tout bascule avec les explosions. Les scènes tournées en gros plans avec caméras à l'épaule donnent un réalisme saisissant à l'action. On y croit totalement.

« Le jour des patriotes »Je laisse aux vrais critiques de cinéma le soin d'analyser la qualité du film « Le jour des patriotes ». Pour ma part, je me contenterai de dire que je suis resté rivé à mon siège tout au long de la projection. Et lorsque le générique de la fin est apparu à l'écran, je me suis dit que désormais, plus jamais je ne regarderai les faits saillants du marathon de Boston de la même façon à la télévision.

J'ai également eu une pensée pour l'unique terroriste responsable des attentats toujours en vie et qui attend présentement dans le couloir de la mort d'un pénitencier fédéral. S'il voit ce film avant de mourir, et je souhaite que ce soit le cas, il sera bien déçu. Il réalisera à quel point le slogan « Boston Strong » est fort et juste. Il prendra conscience de la résilience et du courage de la population de cette ville. Il constatera surtout que plutôt qu'affaiblir, plutôt que d'imposer la peur et la crainte, les gestes qu'il a posés avec son frère auront finalement permis de montrer que l'amour et l'entraide sont toujours plus forts et poussent à continuer.

« Le jour des patriotes » est un excellent film. Je vous le recommande fortement pour comprendre toute l'ampleur de ce qui s'est passé par un beau jour d'avril 2013 à la fin du marathon de Boston, une journée qui s'annonçait pourtant si belle.