Depuis la dernière médaille olympique canadienne en judo, obtenue par Nicolas Gill en 2000 à Sydney, ce sport n'attire pas autant le regard de la population au pays. Les Jeux olympiques de Londres pourraient toutefois marquer un tournant puisque Gill y mènera, en tant qu'entraîneur-chef, la plus grande délégation depuis 1996 et Sergio Pessoa représentera le principal espoir de podium.

Pessoa a vu le jour au Brésil, une puissance sur la scène mondiale du judo, avant d'immigrer au Canada en 2005 où il a réussi une superbe intégration aux allures de celle du champion boxeur Lucian Bute.

Sept ans plus tard, il sera à l'avant-plan d'un contingent de sept judokas qui espèrent redorer le blason du Canada en judo en causant quelques surprises.

Tout comme Bute, Pessoa n'a pas perdu de temps à apprendre et maîtriser le français et il est emballé à l'idée de défendre les couleurs du Canada aux Jeux olympiques. Malgré deux blessures majeures subies dans son cycle olympique, l'athlète de 23 ans envisage la compétition la plus importante de sa vie avec une solide confiance.

«Je suis très motivé par les Olympiques, c'est une chose que j'ai toujours voulu faire depuis que je suis jeune, mais je veux aussi obtenir une médaille. C'est bien de participer, mais je sais que je suis capable de mériter une médaille, c'est mon objectif», a-t-il avancé avec un sourire qui dénote son assurance.

Il faut dire que le judo coule dans le sang de Pessoa. Son père Sergio, qui est d'ailleurs toujours son entraîneur au club Shidokan de Montréal, a terminé au neuvième rang lors des JO de Séoul en 1988.

«J'ai commencé à faire du judo avec mon père et ma tante à l'âge de 4 ans. Elle avait un club de judo et elle m'a appris beaucoup de choses. Tout comme mon père, elle est importante pour moi. Ils ont bâti mes techniques, mon agilité et ma confiance», a révélé à RDS celui qui évolue dans la catégorie -60 kg.

Cette confiance aurait toutefois pu en prendre un coup étant donné que Pessoa a été victime d'une déchirure de la hanche en 2010 et une blessure au ligament croisé antérieur de son genou gauche en 2011.

Sa force de caractère s'est avérée un atout de premier plan pour surmonter ces épreuves. En février, Pessoa a confirmé à ses adversaires qu'il avait retrouvé son aplomb en complétant une compétition relevée en Allemagne en cinquième place. En fin de semaine, sa médaille d'argent décrochée aux Championnats panaméricains a confirmé à ses entraîneurs et à lui-même que le rêve d'une médaille olympique n'est pas démesuré.

Sa famille a choisi le Canada

Même si le judo occupe une place de choix dans le cœur des Brésiliens, la famille Pessoa n'a pas hésité à quitter l'Amérique du Sud pour venir s'établir en sol canadien.

«Ce fut une décision familiale, on voulait un peu changer de vie. Le Brésil est un très bon pays pour vivre, mais il y a certaines choses pas très sécuritaires. Mes frères et moi, nous voulions étudier le français ainsi que l'anglais et le Canada était notre choix numéro un», a confié Pessoa.

Une fois le processus entamé, le paternel s'est déniché un emploi d'entraîneur dans un petit club de judo au Nouveau-Brunswick. Cette première destination canadienne a eu un impact majeur sur Pessoa puisqu'il y est tombé en amour.

«J'ai fréquenté une fille du Nouveau-Brunswick pendant presque six ans et c'est elle qui m'a appris le français», a-t-il confié en la remerciant.

Après le Brésil et le Nouveau-Brunswick, la famille Pessoa a découvert le Québec où le père a accepté un poste au réputé club Shidokan. Ce changement a permis à Sergio de profiter aussi des conseils de Gill.

«Nico est vraiment tranquille, j'ai une très bonne relation avec lui. Il me supporte beaucoup dans les entraînements et compétitions. Quant à mon père, il est très sérieux dans le judo, mais il est moins rigide à l'extérieur. Je veux quelqu'un d'exigeant dans les entraînements, ça prend cela pour me pousser davantage», a comparé le judoka à la tête d'acteur.



Pessoa apprécie bien sûr le privilège de côtoyer le double médaillé olympique qui a savouré le bronze à Barcelone (1992) et l'argent à Sydney (2000) et il identifie plusieurs aspects de sa contribution.

«Il est très expérimenté donc il m'aide beaucoup avec son vécu et sa technique. Il était gaucher comme moi donc il me donne des trucs sur la prise qui est la chose la plus importante dans le judo. Il m'en apprend aussi sur les stratégies», a dévoilé le sympathique combattant et étudiant en Finance à l'Université Concordia.

Sur les tatamis londoniens, Pessoa aura l'occasion de procurer au Canada la cinquième médaille de son histoire en judo et une première médaille dans la catégorie des -60 kg.

Dans un monde idéal, Pessoa repartirait de Londres avec une médaille au cou et il se présenterait à Rio de Janeiro en 2016 au sommet de son art, à 27 ans, pour rivaliser d'adresse dans son pays natal.

Le simple fait d'évoquer la tenue des Jeux olympiques au Brésil illumine le visage de Pessoa en une fraction de seconde.

«Quand j'ai su que Rio avait obtenu les JO, je me disais que c'était vraiment particulier et j'ai ressenti tout un feeling d'avoir la possibilité de me battre à la maison. J'y représenterai le Canada et ce sera extraordinaire, mais je pourrai aussi inviter tous mes amis et ma famille qui sont encore au Brésil», a anticipé le jeune athlète.

«Je suis déjà excité pour les prochains Jeux, mais je dois me concentrer sur ceux de Londres», a-t-il continué en riant. «Rio est une ville extraordinaire, une des plus belles du monde», a conclu Pessoa qui n'a pas l'intention d'attendre quatre ans pour monter sur le podium olympique une première fois.