SOTCHI - La fièvre monte en Russie à 100 jours des Jeux olympiques de Sotchi, le plus grand événement de l'histoire post-soviétique dont le président Vladimir Poutine veut faire une vitrine pour le pays, critiqué en Occident pour des violations des droits de l'homme.

Les ouvriers et engins de chantier s'activent pour mettre la touche finale aux gigantesques aménagements qui ont transformé la station balnéaire de Sotchi en une ville olympique dotée d'infrastructures ultra-modernes entre les bords de la mer Noire et les montagnes du Caucase, à 1400 km au sud de Moscou.

C'était « un défi extraordinaire que nous n'avons pas encore connu dans le domaine de l'olympisme, c'est-à-dire organiser des jeux avec seulement 10-15 % des équipements et des infrastructures déjà construits », a déclaré le Français Jean-Claude Killy, président de la commission de coordination des JO-2014, lors de la dernière visite du Comité international olympique (CIO) fin septembre à Sotchi.

C'est ici que 6000 athlètes et accompagnateurs de plus de 80 pays s'aligneront sur 98 épreuves du 7 au 23 février 2014. Ils étaient 250 athlètes sur 16 épreuves aux premiers jeux d'hiver en 1924 à Chamonix (France).

Quelque 37 000 policiers et l'armée de terre seront mobilisés pour assurer la sécurité des jeux d'hiver organisés pour la première fois en Russie. Moscou avait accueilli les JO d'été en 1980, du temps de l'URSS.

La sécurité, enjeu majeur

La sécurité est un enjeu majeur des Jeux de Sotchi, ville de la région de Krasnodar, voisine de l'instable Caucase du Nord où une rébellion islamiste se livre à des attaques meurtrières quasi quotidiennes. Le chef de cette mouvance, Dokou Oumarov, avait appelé en juillet "à empêcher par tous les moyens" la tenue des JO de Sotchi. Il a revendiqué par le passé des attentats meurtriers à Moscou.

L'attentat suicide commis le 21 octobre par une kamikaze originaire du Caucase du Nord, qui a fait six morts dans un bus à Volgograd (sud), loin de Sotchi, est venu rappeler que la menace terroriste n'avait rien de théorique en Russie.

À Sotchi, les services de sécurité russes disposeront d'un système sophistiqué permettant de surveiller étroitement les communications téléphoniques et sur l'internet, ont affirmé récemment des journalistes russes experts en sécurité.

Certains comparent ce système d'espionnage au programme américain Prism, utilisé par l'Agence américaine de renseignement NSA et révélé par Edward Snowden.

La facture globale fait des JO de Sotchi les jeux les plus chers de l'histoire olympique - hiver et été confondus - avec quelque 50 milliards de dollars, soit dix fois le budget de l'Albanie et la Moldavie réunies.

La construction d'enceintes sportives sur le pôle mer, accueillant les sports de glace, est terminée, à l'exception du stade Fisht, qui accueillera les cérémonies d'ouverture et de clôture. Les infrastructures olympiques du pôle montagne, dédiées aux épreuves sur neige, sont également achevées, mais de nombreux travaux de construction de routes et d'hébergement sont encore en cours.

Controverse sur les homosexuels

Vladimir Poutine, qui a fait des grands événements sportifs internationaux une priorité, a usé de toute son influence pour décrocher en 2007 l'organisation des JO de Sotchi, puis le premier Grand prix de Russie de Formule 1 qui aura lieu fin 2014 dans le parc olympique.

La Russie a été critiquée par nombre d'ONG qui dénoncent aussi bien les importants dégâts causés à l'environnement en raison de constructions tous azimuts, que le traitement auquel sont soumis les travailleurs immigrés recrutés en masse sur les chantiers de Sotchi, et la corruption de certains responsables.

En recevant début octobre à Moscou la flamme olympique arrivée de Grèce, Vladimir Poutine a déclaré que la Russie montrerait à travers ces jeux son « respect pour l'égalité et la diversité », conformément aux « idéaux même du mouvement olympique », dans une apparente allusion aux critiques de l'Occident concernant sa politique.

Une loi russe interdisant la « propagande » homosexuelle devant mineurs, signée en juin par M. Poutine et passible de prison, a provoqué une vive controverse, avec des appels au boycott des JO de plusieurs personnalités internationales.

Des défenseurs des droits de l'homme reprochent aux autorités russes de vouloir stigmatiser les gays à travers ce texte dont la formulation vague ouvre la porte à une très large interprétation.

Ce que contestent les dirigeants russes à commencer par M. Poutine qui a promis que la Russie respecterait « les principes de l'olympisme qui interdisent toute discrimination ».

Sur le plan sportif, la Russie vise au mieux une troisième place au tableau final des médailles compte tenu de son niveau actuel, selon le ministre des Sports, Vitaly Mutko. La Russie était revenue des jeux d'hiver à Vancouver en 2010 avec seulement trois médailles d'or. Si elle rééditait cette piètre performance à Sotchi, cela ternirait considérablement le spectacle brillant voulu par M. Poutine.