LOS ANGELES (AFP) - Passés les premiers commentaires navrés concernant le contrôle positif du champion olympique et du monde du 100 m, l'Américain Justin Gatlin, la cible du monde de l'athlétisme est vite devenue son entraîneur Trevor Graham.

Qu'ont en commun les athlètes Justin Gatlin, Tim Montgomery, Dennis Mitchell, CJ Hunter, Jerome Young, Alvin et Calvin Harrison, Michelle Collins et Patrick Jarrett?

Réponse: tous ont été sous les ordres de Graham et tous ont été contrôlés positif.

Malheureuse coïncidence? Ou alors système plus organisé mis en place par l'entraîneur jamaïcain?

Même si l'athlétisme est "une grande famille", où le succès de l'un entraîne souvent la jalousie des autres, les langues se délient depuis le 30 juillet et l'annonce par Gatlin lui-même du contrôle positif à la testostérone, subi en avril.

Et le moins que l'on puisse dire est que Graham va pouvoir rapidement faire le compte de ses amis dans le milieu.

"Graham a eu sous sa responsabilité plusieurs athlètes qui ont été testés positifs ou ont été suspendus. Il devrait être suspendu à vie en raison de son implication dans toutes ces affaires", a réagi l'Américain Michael Johnson, quintuple champion olympique.

"Rien à faire dans un stade"

"C'est peut-être Trevor Graham qui est visé derrière ça. J'espère que c'est le cas, car ce garçon n'a rien à faire sur un stade", renchérit Guy Ontanon, l'entraîneur des deux meilleurs sprinteurs français Christine Arron et Ronald Pognon.

En fait, le nom de ce remplaçant du relais 4x400 m jamaïcain médaillé d'argent aux JO-1988 est aussi apparu dans une histoire bien plus grande que de simples cas de dopage individuels.

Il serait tout simplement celui qui a envoyé aux autorités antidopage la fameuse seringue à l'origine de l'affaire Balco, du nom du laboratoire californien qui a mis en circulation la THG.

Selon de nombreuses sources, Graham aurait agi ainsi en 2003 en échange d'une réduction des charges qui aurait pu éventuellement peser sur lui dans cette histoire.

Comme par hasard, les soucis de Marion Jones, soupçonnée de dopage mais jamais contrôlée positive, datent de ses années "Graham".

Sanctions

Alors des soupçons, des rumeurs, des accusations. Mais jamais de sanctions. Pour les moment, Graham est passé à travers toutes les gouttes.

Et si le Jamaïcain, installé depuis ses années d'étudiant à Raleigh, en Caroline du Nord, a pu éviter les foudres des instances dirigeantes, c'est simplement parce que leurs règlements précisent que les athlètes sont responsables de ce qu'ils ont dans leur corps. Et personne d'autre.

Et surtout parce qu'aucun des athlètes pris n'a accusé directement son mentor, qui dirige son entreprise Sprint Capitol USA depuis 1993.

Pourtant, des mesures commencent à être prises.

Ainsi jeudi, le Comité olympique américain (USOC) a interdit à Graham l'accès de ses sites d'entraînement de façon "permanente" et au moins jusqu'à ce que "quelque chose nous convainc de changer notre position", a déclaré Peter Ueberroth, le président de l'USOC.

De leur côté, les organisateurs de la réunion de Berlin ont annoncé jeudi que "les neuf athlètes dont s'occupe Trevor Graham ne seront pas invités" le 3 septembre.

Ces décisions sont peut-être le premier signe d'une chasse menée contre Graham qui peut toujours clamer l'innocence de ses troupes, comme il l'a fait samedi dernier en accusant l'un de ses employés d'avoir "saboté" Gatlin.

Pendant ce temps, Justin Gatlin, dont tout le monde louait la gentillesse et la "propreté", risque une suspension à vie... Et Graham entraîne toujours.