Ça devait être un match amical, un match sans signification importante, à l'exception peut-être de la bourse à l'enjeu. Mais lorsque la dernière pierre de David Murdoch s'est placée sur le bout

Ça devait être un match amical, un match sans signification importante, à l'exception peut-être de la bourse à l'enjeu. Mais lorsque la dernière pierre de David Murdoch s'est placée sur le bouton, lui donnant une victoire contre Kevin Martin au Casino Rama Curling Skins près de Toronto le mois dernier, un entraîneur de l'équipe britannique s'est levé, a serré son poing et s'est exclamé "quatre de suite!".

Quatre triomphes successifs face à Martin, une séquence qui remonte au Championnat du monde de l'année passée. Murdoch, qui représentait alors l'Écosse mais qui sera le capitaine de l'équipe britannique aux Jeux olympiques de Vancouver, avait été couronné au terme de la compétition. Pour être sacré champion, il avait battu Martin lors du tournoi à la ronde, dans le premier match du carré d'as et une dernière fois en finale.

Personne n'avait jamais réussi ce genre d'exploit contre la puissante équipe canadienne.

L'année précédente, cependant, c'est Martin qui avait revendiqué la première marche du podium à la finale mondiale, vainquant Murdoch dans un autre match enlevant.

Les deux skips se dirigent encore une fois vers une collision frontale pour la médaille d'or, cette fois à Vancouver, une confrontation qui s'annonce comme un autre grand classique. Si Martin peut considérer ses compatriotes Glenn Howard ou Randy Ferbey comme ses plus grands rivaux, il fait peu de doute que Murdoch nommerait Martin comme son plus féroce adversaire.

"On en est rendu là, admet Murdoch. Chaque fois que l'un bat l'autre, ça signifie beaucoup. Ces rencontres sont très importantes."

Mais il y a plus. Demandez à n'importe quel curleur écossais à qui il aimerait donner une leçon et le nom de Martin arrivera toujours en tête de la liste. Depuis ce moment en 1991 où, vous diront les Écossais, il a enfreint le code d'éthique du sport, Martin est l'ennemi public numéro un.

Martin avait alors pris du retard tôt dans un match contre David Smith. Dans l'espoir de générer quelques coups mal ciblés des Écossais, il a empoigné un balai de paille aussi sec et poussiéreux qu'une sécheresse dans les Prairies. Chaque fois qu'une pierre canadienne s'envolait sur la glace, le capitaine se dépêchait à aider ses balayeurs, aspergeant du même coup la glace de débris et la rendant presque impossible à jouer.

Les microphones ont amplifié les sentiments de Smith - et de peut-être chaque curleur écossais. "Tricheur emmerdant", a-t-on pu l'entendre dire pendant qu'il tentait d'amener une de ses pierres dans la maison.

Murdoch n'était âgé que de 13 ans à l'époque, mail il connaît bien toute l'histoire. Son deuxième, Peter Smith, faisait partie de cette équipe et a raconté sa version des faits à maintes occasions. "C'est sûr que je la connais très bien, déclare Murdoch avec un sourire narquois. C'était bien de voir Smithy gagner le match."

Martin refuse de faire une grosse histoire avec cet incident, qui a résulté en l'application d'un nouveau règlement qui empêche maintenant un joueur de changer de balai pendant un match. "Beaucoup d'eau a coulé sous les ponts depuis, non ? , demande-t-il. Je ne pense pas que ce soit important. Beaucoup de choses ont changé depuis."

Pour Martin, ce qui rend les confrontations avec Murdoch si intéressantes, c'est surtout le fait qu'elles sont serrées et très bien jouées. "Cette rivalité a vraiment pris forme lors des deux derniers mondiaux, a-t-il indiqué, parce que les deux recontres étaitent excellentes et que chaque équipe en a remporté une."

La plus récente, en avril dernier à Moncton, a provoqué un autre élément de controverse quand Martin a choisi de se débarrasser de sa première pierre à la dernière manche, croyant qu'il était impossible d'améliorer sa situation. Cette décision est encore, à ce jour, l'objet de nombreux débats dans les clubs de curling du monde entier. Le capitaine écossais a réussi un excellent lancer avec sa dernière pierre et Martin a raté son coup final (le vrai moment décisif de la partie), donnant le titre aux Écossais.

Au beau milieu de tout ça, les membres des deux équipes assurent qu'ils partagent des liens amicaux.

"Nous nous entendons bien avec l'équipe de Kevin, insiste Murdoch. Nous entretenons une bonne relation pendant et après les matchs. Mais ça ne veut pas dire qu'on veut perdre ces matchs. On pourrait croire que nous nous livrons une lutte à finir parce que toutes les rencontres qui nous opposent sont si importantes."

"Ils sont de bon gars, continue Martin. Nous fraternisons avec eux. Nous sommes des amis."

La plupart des experts prédisent que les deux équipes vont se battre pour la médaille d'or à Vancouver. Si une telle chose se produit, il faudra probablement ajouter un autre chapitre à l'une des plus grandes rivalités de l'histoire du curling.