Plusieurs croyaient que son règne sur 100 mètres prendrait fin en ce dimanche 23 août sur la piste d'athlétisme du stade de Pékin. Ce ne fut pas le cas. Le roi du sprint, Usain Bolt, a conservé son trône.

Les Jeux olympiques de Pékin, en 2008, avaient frappé l'imaginaire de tous les spectateurs sur place et devant leur petit écran en raison de leur gigantisme et de leur déroulement presque parfait. Sept ans plus tard, la capitale chinoise accueille une autre compétition d'envergure. Les Championnats du monde d'athlétisme s'y déroulent jusqu'à dimanche prochain (30 août).

Dès les premiers instants, nous voilà déjà happés par des performances extraordinaires. Pour un amateur d'athlétisme comme moi, difficile d'évoluer à l'heure nord américaine tellement on veut tout suivre en direct, spécialement sur les médias sociaux.

J'avais écrit plusieurs chroniques au sujet de cette confrontation tellement attendue du 100 mètres masculin. Tout le monde savait que l'Américain Justin Gatlin était l'homme de l'heure, mais allait-il réussir à devancer Usain Bolt? La plus grande vedette de l'athlétisme mondiale avait été au prise avec des blessures lors de la dernière année et avait soigneusement évité de croiser Gatlin et les autres ténors de la catégorie. Gatlin avait enregistré les quatre temps les plus rapides de l'année.

Eh bien en ce dimanche après-midi du 23 août à Pékin, Bolt, sextuple champion olympique, a démontré à tous qu'il était le plus grand sprinter de l'histoire en ajoutant un troisième titre mondial sur 100 mètres à son palmarès. Dans une finale extrêmement serrée, il a arrêté le chrono à 9.79, un tout petit centième de seconde de mieux que Gatlin.

C'est la meilleure chose qui pouvait arriver à l'athlétisme en raison du récent scandale de dopage présumé de nombreux athlètes révélé par un quotidien allemand. Gatlin, suspendu à deux reprises dans sa carrière, aurait fait des mécontents et entraîné la suspicion de plusieurs amateurs s'il avait gagné. Bolt lui même ne s'était gardé aucune réserve en déclarant que Gatlin n'aurait jamais dû obtenir le droit de courir à nouveau après sa deuxième infraction.

Bolt devrait avoir moins de difficultés à conserver son titre au 200 mètres, une distance sur laquelle il veut maintenant se concentrer davantage au cours des prochains mois. Il se croit capable d'améliorer son record du monde (19.19). C'est à suivre.

Trayvon Bromell et Andre De GrasseLa révélation

L'autre belle histoire de cette finale du 100 mètres est certainement la médaille de bronze du Canadien Andre De Grasse (9.92). Ce dernier, étoile montante du sprint international, souhaitait surfer sur ses succès obtenus aux Jeux Panaméricains où il avait remporté l'or aux 100 et 200 mètres.

Le simple fait de participer à la finale était déjà une consécration pour celui qui est venu tardivement à l'athlétisme. Aucun canadien n'était parvenu à se qualifier pour la finale aux Mondiaux depuis Bruni Surin en 1999. Pourtant, loin d'agir en spectateur et d'être impressionné par les ténors près de lui au départ, le jeune homme âgé de seulement 20 ans a connu une course parfaite. Il aura choisi le bon moment pour réaliser son meilleur chrono en carrière.

La suite des choses s'annonce interessante pour De Grasse à Pékin. Il sera du relais 4 x 100 mètres canadien. Rappelons que même si sa distance de prédilection est le 200 mètres, il a décidé, de concert avec son entraîneur, de ne pas y prendre part. Dommage.

Avec les Jeux olympiques de Rio l'an prochain, nous sommes maintenant en droit de rêver à une médaille olympique individuelle au 100 mètres. Il s'améliorera encore probablement puisque sa masse musculaire n'est pas complètement développée. Il n'y a qu'à comparer sa silhouette plutôt frêle à celle imposante de ses adversaires pour le réaliser.

La recrue et le vétéran

GhirmayQue dire de ce jeune marathonien Érythréen de seulement 19 ans, Ghirmay Ghebreselassie (aucun lien de parenté avec l'Ethiopien Haile Gebresellasie) qui est parvenu à ravir une première médaille d'or historique pour son pays grâce à une accélération soutenue et imparable lors des six derniers kilomètres? Rien, sinon que c'était du grand art de la part de la relève. Il est devenu le plus jeune champion du monde du marathon (42,195 km).

À seulement sa troisième participation sur cette distance, il a arrêté le chrono à 2 heures 12 minutes et 27 secondes. Une surprise? Pas vraiment. On le savait excellent et faisant partie de l'élite. Le 26 avril dernier, il avait ouvert les yeux des experts au marathon de Hambourg, en Allemagne, avec une deuxième place. Il améliorait alors déjà sa belle sixième place récoltée à Chicago en 2014 alors qu'il avait servi de lièvre aux prétendants jusqu'au 35eme kilomètre.

Tout comme Usain Bolt, le vétéran coureur de demi-fond britannique Mo Farah a conservé son trône grâce à une course d'anthologie au 10 000 mètres. Sa performance (27'01''13) lui a permis de devancer trois redoutables Kényans et de devenir, selon mon humble avis, un des plus grands coureurs de demi-fond de l'histoire. Il est à classer avec les Hicham El Guerrouj, Kenenisa Bekele et Haile Gebresellasie en raison de ses triomphes aux Jeux de Londres en 2012, aux Mondiaux de Moscou en 2013 et aux championnats d'Europe en 2014.

Mo FarahCe qu'il doit faire pour être sacré le plus grand de tous les temps? Gagner samedi prochain au 5 000 mètres. Il est déjà champion olympique sur cette distance. Qui ne se souvient pas de son doublé à Londres et de ses tours d'honneurs devant un public en délire? En gagnant samedi (29 août), il deviendrait le tout premier athlète masculin de l'histoire à réaliser deux fois de suite le difficile doublé.

J'évoquais un peu plus tôt le scandale du dopage en athlétisme révélé par des journalistes allemands. Le dévoilement des noms de tous les athlètes présentant des anomalies dans leurs tests aura au moins permis de laver la réputation de certains. Usain Bolt est un de ceux-là, tout comme Mo Farah. Les derniers mois furent pénible pour le coureur de 32 ans né en Somalie. Il se serait entraîné en Ethiopie avec des athlètes déjà suspendus pour dopage. Il a également raté des contrôles en 2010 et 2011. Pourtant, selon les documents obtenus par les journalistes, le passeport biologique de Farah était normal.

C'est une bonne nouvelle pour son entraîneur, Alberto Salazar, dont le nom est au cœur d'une enquête américaine anti-dopage. Le résultat de son poulin est un baume pour lui. Une victoire au 5 000 mètres de Farah ferait taire bien des sceptiques et apaiserait le lourd climat qui règne autour de lui. On devra admettre qu'il a fait du bon travail et proprement de surcroît!

Une semaine à ne pas manquer

Il reste encore une belle semaine aux Championnats du monde d'athlétisme et si vous avez l'occasion de vous y intéresser, vous ne serez pas déçus. Le spectacle offert dans le Nid d'oiseau de Pékin vous permettra de voir les meilleurs de la planète. Parmi ceux-ci, impossible de ne pas souhaiter des coups d'éclats de certains canadiens.

Les Andre De Grasse, Benjamin Thorne, Derek Drouin, Aaron Brown, Brianne Theisen-Eaton, Christabel Nettey, Alex Genest, Matthew Hugues, Charles Philibert-Thiboutot, Shawnacy Barber, Damian Warner, Kimberly Hyacinthe, Audrey Jean-Baptiste et Aiyanna Stiverne, pour me nommer que ceux-là, permettront à l'athlétisme canadien de retrouver une certaine gloire d'antan. Ils iront également chercher une formidable expérience qui leur permettra de mieux performer et d'être fin prêts pour les Jeux olympiques de Rio l'an prochain.