Je consulte régulièrement le blogue du journaliste de La Presse, Yves Boisvert. Bien plus que pour son admirable plume, c‘est d‘abord pour ses écrits sur la course à pied que ce site se retrouve dans mes favoris. Un incontournable. Cette façon d‘exprimer tout ce qui passe par la tête d‘un coureur me fascine.

Il y a quelques semaines, un de ses billets traitait de sa préparation et de sa (légère) nervosité à quelques jours de sa participation au demi-marathon d‘Ottawa. J‘avais alors eu l‘audace de lui écrire pour le rassurer, moi qui avais déjà couru le marathon dans la capitale nationale en 2006. Quelques conseils faciles. “Tout ira bien, bonne chance, amusez-vous.“ J‘ajoutais que mes chaussures de courses n‘étaient jamais bien loin, si le désir de courir avec moi lui prenait. “Et bien oui, j‘aurai l‘audace de vous faire signe avant l‘été”, me répondit-il.

Effectivement, peu de temps après, nous nous sommes donnés rendez-vous par une belle matinée au parc de la Voie Maritime, à Saint-Lambert, un coin qu‘il connait bien. La température était parfaite, 15 degrés, ciel couvert et petit vent. “Selon mon programme d‘entraînement, je dois courir 35 minutes à un rythme lent aujourd‘hui“, me dit-il. “Ca te va?”

Et comment que ca m‘allait! Alors le voici me guidant sur la piste cyclable avant d‘emprunter les rues de Saint-Lambert. C‘est dans des moments comme ceux là que la magie de la course à pied s‘opère. Un rythme s‘établit, puis s‘impose. Les souffles s’organisent. Parfois les pas se synchronisent La conversation s‘engage. Jamais les coureurs ne parlent en même temps, l‘oxygène est trop précieux. Yves bavarde, puis (inconsciemment) c‘est mon tour pour lui permettre de reprendre son souffle. Il vient ensuite à ma rescousse lorsque ma respiration se fait plus haletante. C‘est notre première conversation, mais déjà nous touchons à l‘essentiel, allons droit au but. Pas de temps à perdre. La course à pied oblige à rogner dans le superflu.

Il me montre comment se rendre à la petite passerelle enjambant l‘autoroute 132 pour accéder à l‘ile Notre Dame. Yves salue l‘éclusier, Luis, qui nous regarde passer dans sa guérite. “La semaine dernière, il a baissé l‘écluse juste pour moi. J‘étais coincé sur l‘Ile” m‘apprend-il fièrement.

Puis nous voici de retour à notre lieu de départ. Nous aurons finalement couru plus d‘une quarantaine de minutes. “Du temps en banque”, me dit Yves. Une dame nous prend en photo. Nous discutons encore quelques minutes avant de nous laisser sur la promesse de courir à nouveau ensemble. Il quitte pour sa journée de travail à La Presse, lui, le journaliste de l‘écrit, alors que moi, le journaliste télé, je pars pour ma journée au Réseau des Sports.

À prime abord, pas grand chose en commun entre nous deux. Mais après avoir couru côte à côte en cette matinée, il en sait déjà beaucoup plus sur moi que bien des gens.

C‘est aussi ça la course à pied.