Sur le plateau de l'émission Hockey 360, les collègues de RDS observaient, un sourire en coin, la réaction de Marc Denis quand l'animateur lui a demandé si le gardien Alex Auld avait ce qu'il faut pour bien seconder Carey Price cette saison.

Le plus sérieusement du monde, celui qui a gardé les buts au Colorado, à Columbus et à Tampa avant de terminer sa carrière dans la filiale du Canadien, à Hamilton, a bien essayé de le convaincre que cette trouvaille de Pierre Gauthier a le physique de l'emploi.

«Auld est un bon gardien qui a roulé sa bosse et qui a déjà connu une saison de 67 matchs à Vancouver. Il est capable de bien encadrer Price. Si le Canadien entre en séries, c'est parce que Auld aura gagné entre 12 et 15 matchs», a-t-il expliqué.

Ce qui lui a valu une taquinerie à la fin de son intervention. «Tu es vraiment incapable de débiter quelque chose de négatif sur un gardien, lui a lancé un autre participant, lui-même un ex-joueur de la Ligue nationale. Tu aurais pu dire qu'il a les qualités pour appuyer Price, mais à la condition qu'on ne lui demande pas de le démontrer trop souvent.»

Le studio s'est bidonné. Bon joueur, Denis s'est contenté de sourire. On saura éventuellement si les succès du colosse gardien seront à la hauteur de son optimisme.

Auld ne représente pas l'unique point d'interrogation dans cette équipe qui a fait vibrer le Québec après être entrée dans les séries par la porte de côté. Et je suis poli quand je parle de la porte de côté. Quand on s'assure d'une place en séries en vertu d'une défaite dans le 82e match du calendrier, c'est sans doute qu'on n'a pas tous les éléments pour danser dans la rue quelques semaines plus tard. Pas plus qu'on les a en ce moment pour espérer reprendre là où on a quitté après avoir paradé dans le carré d'as.

Pourquoi cette équipe serait-elle supérieure à celle de l'an dernier quand le grand responsable de cette folie collective, Jaroslav Halak, n'est plus là?

Si on était absolument sûr de ce que Carey Price peut livrer au cours des prochains mois, cette source de préoccupation serait beaucoup moins grande. C'est le départ d'un gardien efficace et discipliné, allié à l'incertitude créée et entretenue par celui qu'on a choisi de retenir, qui font du Canadien une formation très vulnérable.

Price est responsable de ce manque de confiance quasi généralisé dans le public. S'il s'était présenté à Montréal, il y a trois ans, en offrant le comportement d'un athlète discipliné et toujours à son affaire et s'il ne s'était pas laissé entraîner dans des sorties nocturnes l'année suivante, on ne se poserait pas tant de questions à son sujet. On mettrait ça sur le compte de quelques erreurs de jeunesse tout en se disant que ce n'est qu'une question de temps avant que les choses se replacent pour lui.

Malheureusement, Price a créé un doute qu'il va maintenant devoir effacer par des performances sans reproche. Au cours de l'été, il n'a rien fait pour effacer les craintes qu'on entretient à son sujet en participant à des rodéos, et ce, après avoir appris que le Canadien avait tout misé sur lui en échangeant Halak. J'imagine que ce ne sont pas tous ses coéquipiers qui ont apprécié son choix de passe-temps.

J'ai notamment relevé cette phrase subtile lancée par Mike Cammalleri à son arrivée au camp: «Je n'ai rien fait d'excitant cet été. Pas de sports extrêmes. Pas de bungee, pas de rodéo. Je ne joue jamais avec ma santé et ma condition physique.»

Le message à Price était à peine voilé.

Si ce n'était que de lui

Vous en voulez des points d'interrogation chez le Canadien? On peut facilement en relever deux autres d'une grande importance: Andrei Kostitsyn et Benoît Pouliot. Si ces deux-là mettaient au service de l'équipe tout le talent dont ils ont hérité, on pourrait vivre plus facilement avec l'incertitude causée par Price.

Ces deux-là empêchent le Canadien, par leur manque d'ardeur au jeu, de posséder deux des meilleurs trios dans l'Est. Si l'un pétait le feu avec Gomez et Gionta pendant que l'autre en faisait autant avec Plekanec et Cammalleri, Jacques Martin n'aurait pas à passer une saison entière à tenter de compléter ses deux excellents duos.

Par leur inertie, ils paralysent une bonne partie de l'attaque du Canadien. Quand Martin doit les rétrograder dans un troisième ou un quatrième trio parce qu'ils n'effectuent pas le travail, c'est toute l'équipe qui en souffre.

Le manque d'ardeur au jeu de Kostitsyn est persistant. On est un peu sans nouvelle de lui depuis sa saison de 23 buts il y a deux ans, une production qui lui avait valu d'obtenir un contrat de 3.2 millions par saison. Un salaire non mérité qu'il a sans doute encaissé sans la moindre gêne.

Le cas de Pouliot est tout aussi nébuleux. Quatrième choix de la ligue en 2005, tout juste devant Price, il est costaud, possède de bonnes mains et la vitesse requise pour briller à ce niveau. Cependant, il me semble qu'avant de faire son acquisition, la direction de l'équipe aurait dû se demander comment elle arriverait à le mettre en marche quand un cerveau de hockey et un coach autoritaire comme Jacques Lemaire n'y était pas parvenu?

Et il y en a d'autres

Au rayon des inquiétudes, il faut aussi ajouter le nom de Jaroslav Spacek dont l'étoile pâlit d'une façon inquiétante. Si on croyait que Marc-André Bergeron était un défenseur à risque, que penser du cafouillage répété de Spacek? Le Tchèque est plus gros et plus grand que Bergeron, mais tout compte fait, le jeu de celui qui a donné 13 buts au Canadien dans un rôle de releveur était plus excitant, surtout quand il se portait à l'attaque.

Finalement, il y a Ryan O'Byrne qui ne progresse pas et dont l'unique atout semble être son physique imposant. Si on plaçait le coeur de Bergeron dans le corps d'O'Byrne, on obtiendrait tout un défenseur. Je ne dis pas que O'Byrne n'a pas de coeur, loin de là. Je dis simplement que Bergeron en avait pour tout ceux qui n'en avaient pas.

Un athlète qui dispute 19 parties éliminatoires sur un seul genou, en risquant d'aggraver une blessure déjà sérieuse, aurait mérité un meilleur sort que celui qu'on lui a fait subir en le laissant tomber.

En définitive, je ne crois pas aux chances du Canadien de participer aux séries.

Prédiction: Neuvième place