Il est une heure du matin, nous sommes à bord du Airbus 320 qui nous ramène à Montréal, depuis Winnipeg. Le vol est calme, les moteurs ronronnent, les lumières sont tamisées, l'air extérieur est froid et dense et offre une portance berçante à notre appareil. C'est l'un des moments que j'apprécie le plus dans ma vie professionnelle. Surtout quand il s'agit de l'envolée qui nous conduit à la maison, quelques heures avant Noël.

Le dévoué personnel de cabine qui nous accompagne, à chaque vol, s'est donné beaucoup de mal pour décorer l'intérieur de l'avion. Nous avons même eu droit, chacun de nous, à une carte de souhaits. Voilà une autre facette de cette vie de nomade que j'adore : les relations humaines qui se créent, peu importe le rôle de chacun.

Mon partenaire d'antenne Marc Denis a déjà ses plans pour retrouver sa famille et n'aura même pas le temps de dormir avant son vol vers le Saguenay. « Pas grave », dira Marc, en anticipant avec bonheur les prochaines heures qui l'attendent. Martin McGuire, descripteur des matchs à la radio, a hâte de passer un premier Noël avec sa nouvelle copine et de retrouver ses deux filles qu'il aime tant. Dany Dubé, son analyste, pense déjà aux retrouvailles avec les siens. L'ancien défenseur Bobby Dollas, maintenant analyste à la radio anglaise, va retrouver famille et amis mais va aussi partager ses connaissances en hockey avec les jeunes, durant les Fêtes. Mes collègues de la production à RDS, qui voyagent avec nous, ont aussi un petit quelque chose de différent dans leur regard, lors de cette envolée.

Évidemment, tout serait plus agréable dans cet environnement si le match contre les Jets de Winnipeg s'était soldé par une victoire du Canadien. Mais au fond, cela n'a pas vraiment d'importance, à ce moment précis. Car pour les prochaines heures, les victoires trop rares, les défaites répétitives, le changement d'entraîneur qui fait tant jaser, les hauts et les bas de chaque joueur ne seront plus prioritaires dans le quotidien de chacun. Pour quelques heures, nous serons tous envahis par la même magie qui se produit, malheureusement, qu'une seule fois dans l'année…

Paix et partage

Je comprends parfaitement la frustration que vivent plusieurs d'entre vous présentement en regardant le Canadien s'enliser de la sorte. Le Tricolore, à Montréal et un peu partout au Québec, c'est beaucoup plus qu'une simple équipe sportive. C'est une source importante d'identification, de tradition, de divertissement aussi. Et à tous ces niveaux, présentement, le portrait n'est pas particulièrement reluisant, j'en conviens.

Ne perdons jamais de vue, cependant, que le sport est d'abord et avant tout un univers d'êtres humains! Les athlètes professionnels et les entraîneurs sont choyés, certes, mais ils ont aussi des ambitions, des craintes, des joies, des peurs, des responsabilités, comme tout le monde. Ils ont des familles qui partagent avec eux ces mêmes émotions et qui finissent par traverser, finalement, le même parcours qu'eux. Pour quelques heures, ils ont un droit légitime de redevenir simplement Randy, Michael, Tomas, Mathieu, David ou Carey, du moins pour ceux qui les entourent. Le droit légitime d'être un conjoint, un papa, un fils, un ami…

Peu importe l'amplitude de ses propres croyances, la pause de Noël offre une occasion essentielle de recul, de réflexion mais aussi, de paix et de partage.

Je ne cherche surtout pas à imposer mon point de vue, loin de là. Mais ne trouvez-vous pas qu'il y a quelque chose de franchement extraordinaire quand toute la portion « mécanique » de la vie s'arrête pour une brève période? Que nous cherchions à nous regrouper simplement en famille ou entre amis? Que nous nous abandonnions soudainement à penser, ne serait-ce qu'une seconde ou deux, à ceux qui souffrent et qui sont seuls?

J'espère sincèrement que vous aurez l'occasion, mes bons amis, d'être entouré d'amour et de paix au cours de cette trève. Et si vous l'êtes, pourquoi ne pas en redistribuer un peu à ceux qui en manquent?

Joyeux Noël à tous.