Au-delà des ceintures
Boxe jeudi, 22 mai 2014. 19:17 dimanche, 15 déc. 2024. 15:59L’heure est venue pour Adonis Stevenson de prouver que Showtime ne s’est pas trompé.
Face à Andrzej Fonfara samedi soir au Centre Bell, Stevenson tâchera non seulement de défendre ses titres pour la troisième fois, il s’efforcera surtout d’entretenir sa réputation. Sa notoriété.
Élu en 2013 boxeur de l’année par The Ring, Sports Illustrated, Boxing Scene et ESPN, Stevenson a fait sa renommée avec son coup de poing dévastateur et son sens du spectacle.
Les yeux étant rivés plus que jamais sur Stevenson, il sera inévitablement jugé, et ce, peu importe l’issue du combat. À moins qu’il ajoute un autre retentissant K.-O. à sa collection...
Car s’il l’emporte par décision, certains diront que finalement, il ne cogne pas si dur que ça. S’il dispute un combat serré, d’autres affirmeront qu’il n’est pas si bon que ça.
Voilà pourquoi Adonis vise un autre knock-out. Et il n’hésite pas à le dire bien haut, ce que bien d’autres boxeurs n’osent jamais faire. Le dire à sa garde rapprochée, c’est une chose, mais en faire la prédiction devant les caméras, ç’en est une autre.
Adonis est toutefois tout à fait à l’aise avec cette pression supplémentaire qu’il pose sur ses épaules. Même lors de ses premiers combats dans les rangs amateurs, il frappait déjà pour faire mal. C’était sa marque de commerce et ce l’est toujours.
Son combat contre Donovan George en octobre 2012 est un bon exemple de sa détermination. Blessé à la main gauche – sa main la plus forte – dès le troisième round, Adonis n’avait pas pour autant renoncé à un K.-O.. Face à un adversaire qui a fait preuve de caractère en se relevant de ses quatre premières chutes au tapis, Stevenson avait gardé le meilleur pour la fin.
Bien que son entraîneur venait de l’implorer de lever le pied lors du 12e et dernier round puisqu’il avait remporté les 11 précédents, Stevenson a été fidèle à sa réputation et a forcé l’arbitre à mettre un terme au combat.
C’est avec des victoires comme celle-là qu’Adonis a créé une surenchère entre Showtime et HBO. Maintenant que Showtime a remporté la bataille entre ces deux réseaux, c’est au tour d’Adonis d’entretenir sa marque de commerce.
Et face à Fonfara, le défi est réel. La plus grande qualité de ce boxeur d’origine polonaise, c'est qu’il n’a vraiment pas peur. Il n’est pas intimidé.
À 26 ans, il n’a pas l’expérience d’un vétéran qui serait tenté de laisser passer la tempête sans trop réagir face à Stevenson. Je suis convaincu que si Adonis lui fait mal tôt dans le combat, Fonfara ne modifiera en rien son plan de match. Il demeurera sans doute agressif en tentant constamment d’appliquer de la pression afin de placer ses meilleurs coups.
Quand Tavoris Cloud a reçu le premier coup de poing d’Adonis en septembre dernier, son plan de match a changé complètement, tout comme la plupart des adversaires qui ont croisé la route du Québécois jusqu’à maintenant.
Fonfara, lui, risque de mordre à pleines dents dans son protecteur buccal tout en tentant de faire mal à Adonis avant que ce dernier lui réserve le même sort.
Le signal
Stevenson ne sera pas le seul à jouer gros dans l’arène du Centre Bell samedi soir. Frappant à nouveau à la porte de l’élite de la division des poids moyens, le Québécois David Lemieux tentera de l’ouvrir un peu plus alors qu’il fera les frais de la demi-finale du gala en se mesurant à Fernando Guerrero.
Ramenons-nous trois ans en arrière. Tout juste avant le combat de David contre Marco Antonio Rubio, j’étais à New York pour faire la promotion du duel entre Jean Pascal et Bernard Hopkins. Alors réunis avec le président de HBO Ross Greenburg et le vice-président exécutif du réseau Kerry Davis, nous avions alors conclu une entente dans l’éventualité d’une victoire de Lemieux contre Rubio.
David avait tout ce que les réseaux recherchent, c’est-à-dire le charisme, la puissance, la présence et la personnalité, en plus de parler anglais, français et espagnol. On parlait même d’éventuels combats contre Canelo Alvarez et Julio Cesar Chavez fils.
Sa réputation était donc élevée, mais sa défaite contre Rubio a contrecarré les plans. Et pour le mieux...
Avec le temps, on réalise en effet que ce revers est survenu à un bon moment dans la carrière de Lemieux. Cette défaite a démontré qu’il n’avait peut-être pas les fondations requises pour pouvoir performer à ce niveau.
Il avait peut-être fait mal à Rubio en plus de remporter les cinq premiers rounds, mais il avait ensuite manqué d’énergie avant de s’avouer vaincu. Si Lemieux avait passé le K.-O. à Rubio, la chute aurait peut-être été plus douloureuse si elle était survenue plus tard.
Lemieux a depuis fait le ménage. Quand Marc Ramsay (entraîneur) et Camille Estephan (gérant) sont entrés dans le portrait, nous avons établi un plan de développement à long terme pour lui et au moment où il serait prêt, j’allais recevoir un signal pour repartir la machine.
Malgré la défaite de Lemieux contre Rubio, qui est actuellement champion WBC intérimaire, les réseaux n’avaient pas perdu leur intérêt. Un accident de parcours, ça peut arriver. Et après avoir démontré lors de ses deux plus récents combats qu’il est capable de bien répartir ses énergies et d’être encore puissant lorsque le combat s’étire, Lemieux est prêt pour l’étape suivante.
S’il l’emporte face à Guerrero et qu’il est aussi spectaculaire qu’il l’est habituellement, ce pourrait bien être sa dernière demi-finale pour longtemps.
En cas de victoire, Showtime a en effet déjà évoqué la possibilité d’un duel contre le champion WBO de la catégorie Peter Quillin.
Mais au-delà de tout ça, une victoire à la Lemieux nous confirmerait qu’il est prêt à être lancé contre les boxeurs établis de la division. Qu’il y ait ou pas de titres à l’enjeu, les réseaux de télé lui feront des offres.
Sans oublier Alvarez
En terminant, un petit mot sur Eleider Alvarez, pour qui la performance face à Alexander Johnson sera elle aussi déterminante pour sa carrière.
Classé neuvième dans la division des poids mi-lourds selon The Ring, une position devant Fonfara, Alvarez suscite l’intérêt de Showtime, tout comme Artur Beterbiev d’ailleurs. Le réseau nous a demandé de lui opposer un adversaire américain alors que son combat sera présenté sur les ondes de Showtime Extreme.
Les choses pourraient vite débloquer pour lui aussi…
*Propos recueillis par Mikaël Filion