Enfin, les trois juges qui ont officié lors du match entre Saul « Canelo » Alvarez et Daniel Jacobs à Las Vegas ont fait amende honorable. Cette fois, ils ont vu juste, même qu’ils ont été un peu favorables à Jacobs. Dave Moretti et Steve Weisfeld ont remis des cartes de 115-113, tandis que Glen Feldman a opté pour un compte de 116-112.

Il ne faut pas oublier qu’une pression énorme pesait sur les épaules des trois officiels depuis déjà quelque temps.

Le match a été assez serré, mais contrairement à ce que prétend Jacobs, il n’en a pas fait assez pour remporter la victoire. D’ailleurs, il avait fait le même commentaire après sa défaite contre Gennady Golovkin.

Comment un vétéran comme Jacobs, auteur de 38 combats peut-il se lancer dans le feu de l’action en laissant son rival prendre l’initiative? C’est exactement ce qui s’est produit dans les six premiers rounds du match.

Les preneurs aux livres de Las Vegas avaient donc vu juste en favorisant « Canelo » par 6-contre-1.

Pour reprendre les paroles de Golovkin : « Ce fut un match sans saveur... » Et il a raison. « Canelo » lui-même l’a admis après sa victoire.

Par contre, dans la deuxième partie du combat, on a constaté que « Canelo » avait ralenti. Pourquoi? Se sentait-il assez en avance pour prendre les choses aisément? Si Jacobs avait été un peu plus agressif, il aurait pu remporter la victoire, mais il se contentait d’y aller à fond-de-train dans les 20 ou 25 dernières secondes des rounds, pas plus.

Parfait ambidextre

Jacobs a tenté de mélanger son rival en changeant de main arrière. Tantôt il se battait à droite, tantôt à gauche. Ça n’a pas fonctionné, surtout quand il devenait gaucher.

Aujourd’hui, « Canelo » est donc plus riche d’une quarantaine de millions de dollars et Jacobs va encaisser son chèque de neuf millions lundi matin. Sa bourse devait être de dix millions, mais il devra payer une amende d’un million de dollars pour avoir dépassé la limite de poids par trois livres et quelques onces lors de la pesée de samedi matin.

Je demeure convaincu que Jacobs n’est pas fait pour se battre à 160 livres et je suis certain qu’il anticipe de passer chez les super-moyens d’ici peu.

Triple champion

Aujourd’hui, « Canelo » est donc un triple champion. Le seul titre qui lui échappe est celui de la WBO, qui appartient à Demetrius Andrade. On parle d’un éventuel combat entre Alvarez et Andrade, mais ce ne sera pas avant l’automne, si jamais l’affrontement se produit. Andrade doit défendre son titre le 29 juin prochain contre Maciej Sulecki. Si jamais ce duel contre Andrade ne se matérialise pas, « Canelo » peut toujours remonter chez les 168 livres et défendre sa couronne WBA contre Callum Smith, Caleb Plant et qui encore.

J’ignore combien de gens ont vu le combat sur DAZN, mais si je me fie à l’assistance de plus de 20 000 personnes dans l’enceinte du T-Mobile Arena, de Las Vegas, le match a dû attirer un nombre record d’adeptes.

Si Golovkin avait été l’adversaire au lieu de Jacob samedi soir, je ne crois pas que « Canelo » serait sorti victorieux. Surtout si je me fie au nouvel entraîneur de GGG, Johnathon Banks qui veut que son protégé lance plus de coups qu’il ne le faisait auparavant.

Naturellement, ce que les amateurs de boxe voudraient c’est un troisième affrontement entre « Canelo » et GGG. C’est possible... Sauf que « Canelo » aimerait avant tout devenir le quadruple champion des poids moyens. Golovkin doit se battre le 8 juin prochain au Madison Square Garden, contre le Canadien Steve Rolls, donc lui non plus ne serait pas disponible avant l’automne.

Le phénomène Flores

J’ai assisté samedi soir quelque chose que je n’avais jamais vu dans ma vie et je m’explique. Artur Beterbiev défendait sa couronne IBF des mi-lourds ce soir-là contre un certain Radivoje Kalajdzic. Pas moins de 10 100 personnes avaient envahi l’Arena de Stockton, en Californie.

Pourquoi autant de monde? Pas pour la finale entre Beterbiev et Kalajdzic, mais pour voir un jeune homme de 19 ans, la coqueluche de Stockton auteur d’une fiche de 12-0, 5 K.-O. livrer un match de six assauts.

Le jeune pugiliste a fait son entrée en voyant de larges photos de lui bien en vue dans la foule. Et avant même que le match ne commence, on pouvait entendre les cris d’encouragement pour ce jeune natif de Stockton.

Pourtant, c’était la première fois qu’il se battait dans sa ville natale. Comme on l’avait prédit, Flores a gagné son match contre un boxeur marginal du nom de Eduardo Pereira dos Reis (23-5, 19 K.-O.). Sa performance a été bien ordinaire lorsque soudainement, au troisième engagement, il a laissé partir un foudroyant crochet de la gauche qui a assommé son rival.

La foule était en délire. On chantait, on criait Flores... Flores. Puis soudainement, les gens ont commencé à quitter l’aréna en masse. Des 10 000 amateurs qui avaient vu Flores à l’œuvre, il n’en restait à peine 5000 quand Beterbiev est monté sur le ring.

Je vous jure... C’est la première fois que je vois des gens venir assister à un combat de boxe pour la préliminaire et qui quittent quand vient le temps de présenter la finale même s’il s’agissait d’un match de championnat.

Un Beterbiev plus fougueux

Portant une forte barbe, Beterbiev (14-0, 14 K.-O.) n’a fait qu’une bouchée de son adversaire Kalajdzic (24-1, 17 K.-O.) qu’il a éclipsé au cinquième engagement sur les ordres du médecin.

C’est un nouveau Beterbiev qu’on a vu à l’œuvre. Totalement inconnu aux États-Unis, et voyant qu’il se présentait devant la grosse télé c’est comme s’il avait voulu montrer aux amateurs de boxe qu’il avait un style fougueux. Dès le premier son de cloche, il s’est lancé sur son rival, laissant partir des coups des deux mains. La plupart du temps, il a été erratique dans ses coups, mais il était évident que Kalajdzic n’était pas de son calibre. D’ailleurs, selon BoxRec, Kalajdzic vient au 54e rang des meilleurs mi-lourds au monde. Même le Canadien Ryan Ford, d’Edmonton vient en avant de lui au 31e rang et pourtant sa fiche est peu reluisante à 16-4, 11 K.-O.

Mais au moins, Beterbiev a réussi son entrée chez son nouveau promoteur Top Rank et il a prouvé que sa force de frappe est la meilleure de tous les autres champions mi-lourds. Lorsqu’on lui a demandé ses plans pour le futur, il a répondu dans un anglais respectable qu’il voulait unir tous les titres sans nommer personne en particulier.

Déjà, Sergey Kovalev lui a lancé un défi et Dmitry Bivol tout comme Oleksandr Gvozdyk n’ont aucune préférence pour un rival. C’est donc à Bob Arum que revient la tâche d’organiser le prochain match, où Beterbiev pourra défendre sa couronne IBF pour une troisième fois.

Le clou de la soirée... L’entrée du jeune Gabriel Flores dans l’aréna de Stockton aux cris délirants de la foule. Je n’ai jamais rien vu de pareil de toute ma carrière de chroniqueur. Même Sugar Ray Leonard et Oscar De La Hoya, pourtant des vedettes olympiques, n’ont pas connu cet engouement par leurs partisans à leurs premières armes et pourtant leurs exploits dépassaient de beaucoup ceux de Flores.

Bonne boxe!