J’aurais dû y penser avant. Les deux derniers jours de janvier n’ont jamais été favorables à nos boxeurs.

Le 30 janvier  2001, Gaétan Hart annonçait sa retraite de la boxe. En 2009, Herman N’Goudjo perdait son match de championnat des super-légers face à Juan Urango et le lendemain, Hercules Kyvelos se faisait littéralement assommer par Antonio Margarito au deuxième engagement.

Maintenant, il faut ajouter le nom de Jean Pascal à cette liste de malchanceux.

Ceux qui croyaient que Freddie Roach serait un atout important dans la carrière de Pascal ont vite compris qu’un bon entraîneur ne fait pas nécessairement un bon boxeur. Pascal n’a absolument rien montré de nouveau, ni dans son style ni dans sa manière d'approcher son affrontement avec Sergey Kovalev. Bien au contraire, après quelques minutes du combat, il semblait totalement perdu dans son style.

Ce qui a fait dire à Krusher : « Si j’étais Pascal je laisserais tomber Freddie Roach comme entraîneur. En tout cas, je n’ai rien vu de changé dans son style ».

Si Pascal croyait que son premier duel avec Kovalev avait été arrêté trop tôt à son goût, cette fois-ci, on peut dire que le deuxième a peut-être duré deux ou trois rounds de trop.

Et ma croisière?

Malheureusement pour moi et mon porte-monnaie, je devrai me débrouiller sans les gains que j’aurais pu faire si Pascal était sorti victorieux. Disons que ma croisière dans les Caraïbes est en péril, ou presque...

Un fait demeure : on ne pourra jamais dire que je n’ai pas été un de ceux qui croyaient vraiment que Pascal pouvait gagner. Disons que j’ai été incrédule, pour ne pas dire naïf. Mais quand vous connaissez un jeune boxeur depuis une vingtaine d’années, ce n’est pas facile de ne pas tenter par tous les moyens de l’encourager.

Pascal a donc suivi le même chemin que certaines de nos têtes d’affiche, tels que Lucian Bute, Bermane Stiverne et David Lemieux, en subissant la défaite.

Souvenez-vous de cette phrase d’encouragement  lancée à Pascal par Roach quelques jours avant combat : « Tu es meilleur que Roy Jones... », avait-il crié. Roach avait totalement raison. Pascal est meilleur que Roy Jones... Pas comme boxeur, mais plutôt comme rappeur!

Ce que je ne parviens pas à comprendre, c’est le style que Pascal a utilisé tout au long du combat. Alors que le jab du Russe lui martelait la face round après round, Pascal ne dégainait toujours pas. Il passait son temps à reculer et à se réfugier dans les câbles. J’ose croire que ce n’était pas la tactique pressentie par Freddie Roach.

Pascal était perdu

Dès le début des hostilités, on aurait dit que Pascal était totalement perdu entre son style naturel et celui enseigné par l’instructeur de renom.

« C'était plus facile cette fois-ci » - Kovalev

Kovalev aurait pu mettre un terme à l’affrontement bien avant le huitième assaut, mais comme il l’a si bien dit à Max Kellerman après la rencontre : « Je ne l’aime pas. J’ai fait exprès pour étirer le combat. Je voulais  vraiment qu’il souffre ».

En somme, après cinq rounds, le combat était terminé. Seule la force physique et mentale de Pascal lui permettaient de rester debout et d’absorber tous les coups de son rival tant bien que mal.

Les menaces et les pitreries étaient maintenant choses du passé. Terminées les insultes, l’histoire des bananes montrées en guise de dérision, les menaces lancées à droite et à gauche. Maintenant à moitié assommé, il n’était plus sur la même longueur d’onde que son rival, qui le martelait à volonté.

Je parie qu’à partir de maintenant, Freddie Roach n’est plus l’entraîneur de Jean Pascal, et c’est Marc Ramsay, son ex-entraîneur, qui doit se sentir encore plus à l’aise aujourd’hui. C’est sous la tutelle de Ramsay que Pascal a connu ses meilleurs jours, et ce dernier n’a rien à envier au vétéran instructeur.

Roach n’a pas fait de miracle avec Pascal, pas plus qu’avec Manny Pacquiao contre Floyd Mayweather, et pas plus qu’avec Miguel Cotto face à Canelo Alvarez. Aussi populaire puisse-t-il être, il ne peut se payer le luxe de voir ses meilleures têtes d’affiche subir défaite après défaite. C’est sa réputation qui est en jeu.

Au fond, si vraiment Jean Pascal a l’intention de poursuivre sa carrière de boxeur, le meilleur conseil qu’on pourrait lui donner serait de reprendre sa liaison avec Ramsay, si jamais ce dernier est toujours disposé à le prendre sous sa charge. Mais il faut bien comprendre que les beaux jours de Jean Pascal sont maintenant derrière lui, tout comme les bourses millionnaires qu’il a empochées au cours des dernières années.

Au milieu de l'échelle

Tout comme Lucian Bute, il devra recommencer, peut-être pas au bas de l’échelle, mais disons... au milieu. À 33 ans, c’est un peu plus difficile de remonter la côte et il faut bien se mettre dans la tête qu’on n’est plus une tête d’affiche. D’après moi, c’est là que Pascal souffrira le plus. Avant ce cuisant revers, il se croyait  encore plus populaire qu’Adonis Stevenson. Combien de fois l’avons-nous entendu dire que ses fans passaient avant tout? Maintenant qu’il a subi deux revers désastreux contre Sergey Kovalev, il va vite comprendre que les fans s’esquivent rapidement quand les choses vont mal. Parlez-en à Michel Therrien ou bien encore Marc Bergevin...

Pascal aime se pavaner, lancer des défis à droite et à gauche, se moquer de ses rivaux. Ces beaux  jours-là sont finis. Il ne fait plus peur à personne. Son talent n’est pas égal à ses menaces et les adversaires le savent trop bien. J’espère juste qu’il constate qu’il ne fait pas le poids contre ces champions, tel Sergey Kovalev. C’est bien beau croire en son talent, mais il faut aussi comprendre que le talent a ses limites.

Quant au champion russe, j’aimerais bien vous dire qu’on le reverra un de ces jours à Montréal, mais je me garde une petite gêne. Je crois fermement qu’on ne le verra jamais dans un duel contre Adonis Stevenson, qu’il se plaît à appeler Adonis « Chickenson ».  Le seul qui pourrait nous le ramener parmi nous est Artur Beterbiev, qu’on reverra à l’œuvre le printemps prochain. Mais ce dernier est encore jeune en termes de boxe, bien qu’il ait battu Kovalev à deux occasions chez les amateurs.

Un champion talentueux

Qu’on l’aime ou bien qu’on le déteste, on ne peut faire qu’admirer le talent de Sergey Kovalev. Il ne deviendra jamais un humoriste, pas plus que le relationniste d’une grande compagnie, mais sa force de frappe et sa science de boxe épatent tout le monde.

Quand un boxeur peut terrasser un rival avec un jab, c’est qu’il est extrêmement fort, et je crois que Michael Griffin a fait une erreur en ne comptant pas la chute au tapis de Pascal au premier round. Il y avait eu bel et bien un coup et Griffin aurait dû lui décerner un compte.

Maintenant, place à un affrontement entre Kovalev et Andre Ward, pourvu que ce dernier se décide enfin à remonter sur le ring. On aura une meilleure idée de ce que vaut Ward en mars prochain alors qu’il se mesurera au Cubain Sullivan Barrera.

Ward n’est pas le boxeur le plus actif. Contre Berrera, il en sera à son quatrième combat en quatre ans. C’est très peu.

Combat épique entre Lafrenière et St-Juste

Enfin, je ne peux terminer ce billet sans féliciter Francis Lafrenière pour sa victoire sur le quadragénaire Renan St-Juste. Les deux ont été le clou de la soirée et livrant un duel digne des meilleurs combats de l’histoire de la boxe à Montréal, et même ailleurs. Pas surprenant que les gens les aient applaudis à tout rompre du commencement à la fin de l’affrontement.

Ce Lafrenière m’épate par son ardeur au travail et sa détermination. Si son affrontement a été aussi spectaculaire contre Renan St-Juste, c’est que le boxeur de 43 ans a tout donné tout au long de la soirée contre un jeune homme extrêmement talentueux. N’eut été de son courage, St-Juste aurait pu abdiquer bien avant, mais non… Il a tenu le coup devant une bête féroce.

Bravo à ces deux pugilistes qui ont livré un spectacle qui sort de l’ordinaire!

Mon dernier point, c’est la masquarade qui a eu lieu après la fin du combat entre Pascal et Kovalev. Pourquoi Adonis Stevenson se trouvait-il sur le ring flanqué de ses gardes du corps? Avait-il été invité avec son groupe? Et pourquoi y avait-il autant de monde sur le ring?

Je demeure convaincu que Michel Hamelin, le président de la Régie des alcools, des courses et des jeux (RACJ), n’a pas tellement aimé cet affrontement entre deux clans et que c’est la dernière fois qu’un tel écart de conduite se produit sur le ring.

Bonne boxe!