MONTRÉAL – Le jeu des comparaisons est l’un des exercices les plus prisés des amateurs de boxe et lorsqu’on s’y adonne pour analyser l’affrontement à venir entre Marie-Ève Dicaire et Cynthia Lozano, il paraît être indiscutablement à l’avantage de la pétillante boxeuse québécoise.

D’un côté, il y a d’abord l’ancienne championne des poids super-mi-moyens de l’IBF qui possède 18 combats et 114 rounds d’expérience et de l’autre, une Mexicaine de 7 duels qui n’a jamais combattu à l’extérieur de son pays ni croisé le fer avec une adversaire avec une fiche gagnante.

Mais parole de Dicaire (17-1), il ne faut pas se fier aux apparences pour deux principales raisons : elle a des choses à prouver à la suite de sa défaite contre Claressa Sheilds dans un mégacombat d’unification le 5 mars dernier et surtout, elle a déjà été dans cette position de l’inexpérimentée.

« Ce combat me permettra de démontrer où est rendue ma boxe et à quel point je dois être supérieure avant de mériter d’autres choses (des duels de l’importance de celui contre Shields, NDLR), a dit Dicaire pendant une visioconférence visant à promouvoir son choc du 17 décembre qui sera présenté dans le cadre d’un événement de Groupe Yvon Michel organisé au Centre Bell.

« J’ai déjà été dans [la] position de [mon adversaire], contre Lisa Noel Garland notamment, alors qu’elle affirmait qu’elle avait plus de victoires par knock-out que j’avais de combats. Je me rappelle de mon désir et de ma rage de vaincre à ce moment-là. Je me souviens de mon état d’esprit. »

L’athlète de Saint-Eustache reconnaît cependant qu’elle est déjà tombée dans ce genre de piège dans le passé et que son clan s’est assuré qu’elle soit en pleine possession de ses moyens face à Lozano (9-0, 7 K.-O.), combat qui sera pour la ceinture vacante des super-mi-moyennes de l’IBF.

« C’est une des premières choses qui ont été discutées avec mon équipe après la défaite contre Shields. Comment faire pour que je demeure alerte?, a expliqué Dicaire. Dès que les choses allaient vraiment bien pour moi dans le gymnase, il pétait ma balloune en vue du 17 décembre.

« C’est très loin d’être un walk in the park. Peu importe qui il y a sur mon chemin, je dois m’en débarrasser pour la suite des choses. C’est un combat obligatoire qui a été imposé par l’IBF. »

La dure défaite contre Shields aurait facilement pu plonger Dicaire dans le négativisme, mais au contraire, la Québécoise et son équipe se sont accrochées à chacune des poignées possibles pour tenter d’en tirer des enseignements qui lui serviront à court terme, mais aussi à long terme.

« Marie-Ève a profité d’un long congé cet été et ce repos a été bénéfique, car il lui a permis de reposer son corps après un rythme d’entraînement intensif, a détaillé son entraîneur Stéphane Harnois. À son retour dans le gymnase, je souhaitais ensuite corriger certaines lacunes, dont celle de continuellement sautiller comme c’est le cas en karaté et dans les arts martiaux mixtes.

« En étant un peu plus basse sur sa position de base, elle peut placer des coups qui sont plus en puissance. Ça lui permettra d’être plus agressive que dans le passé sans la dénaturer complètement. À vrai dire, Marie-Ève est redevenue celle qu’elle était avant de devenir championne du monde. »

« Il y a un énorme gain de confiance qui a été fait après mon combat contre Shields, à savoir que j’avais ma place dans le même ring que la meilleure "livre pour livre" de la planète, a continué Dicaire. J’ai vu que j’avais des croûtes à manger, mais je suis capable d’appartenir à cette élite.

« Dans le passé, c’était facile d’être complaisante avec moi-même, parce que je dominais mes combats, même si je savais que j’avais travaillé très fort. Je ne voyais pas l’intérêt à lever le bras à l’entraînement pour me protéger, car je répondais que mes adversaires ne me touchaient pas. Depuis Shields, j’ai compris que j’avais tout intérêt à écouter les instructions de mon équipe. »

« Un très bel honneur »

Pionnière dans son domaine, Dicaire a obtenu une importante marque de reconnaissance lundi en étant nommée récipiendaire du prix Maurice-Ricard, remis par la Société Saint-Jean-Baptiste.

La distinction, qui vise à souligner l’excellence sportive d’athlètes québécois, a été remise à Serge Savard, Gatéan Boucher, Bruny Surin et Mario Lemieux dans le passé. Dicaire est la troisième femme après Sylvie Fréchette et Myriam Bédard à la mériter depuis son instauration en 1979.

« Gagner des ceintures, c’est une chose, mais les reconnaissances pour une implication dans la société, c’est encore plus significatif, a mentionné Dicaire. C’est une très belle tape dans le dos pour terminer mon camp d’entraînement en force. C’est vraiment un très bel honneur. »