C’est en 2009 que sont arrivés, de peine et de misère à Montréal, deux boxeurs colombiens. L’un s’appelait Eleider Alvarez et l’autre Oscar Rivas.

Pourtant, tout était en ordre avec Immigration Canada pour leur entrée sur notre territoire, mais c’est chez eux en Colombie que les choses accrochaient.

« Tellement qu’il a fallu qu’ils passent par le Venezuela pour finalement aboutir chez nous », se souvient Bernard Barré.

À ce moment, ils étaient deux illustres inconnus au Québec, pourtant deux de nos plus grands connaisseurs de boxe les avaient à l’œil depuis plus d’un an. Ces deux grands de la boxe québécoise ne sont nul autre que Bernard Barré, le dépisteur pour le compte de GYM, et l’entraîneur Marc Ramsay.

L’histoire d’Oscar Rivas avec GYM remonte à 2007, aux Jeux Pan-Am, au Venezuela, où il avait mérité la médaille de bronze chez les super-lourds en battant l’Américain Mike Wilson 24-19. Son copain Alvarez avait lui aussi assez bien fait avec trois victoires, dont une avait été un K.-O./3 aux dépens du Cubain Yusiel Napoles.

« À ce moment nous avions non seulement un œil sur Rivas et Alvarez, mais aussi sur Artur Beterbiev et Bogdan Dinu, mais notre compagnie ne nageait pas dans l’argent, se souvient Bernard Barré. Il fallait donc y aller selon nos moyens. »

Après avoir assisté au Championnat du monde à Chicago, nos deux experts se sont retrouvés à Trinidad et ensuite au Guatemala où nos deux boxeurs se sont qualifiés pour les Jeux olympiques de 2008.

Aux Jeux olympiques

« À Beijing, en Chine, en 2008, je pensais pouvoir leur parler, leur remettre des enveloppes avec notre stratégie de carrière pour eux, mais la sécurité nous en a empêchés, de raconter Bernard. Impossible de s’approcher d’eux. Nous avons alors remis les deux enveloppes aux officiers de la sécurité et ils les ont ouvertes. Je m’en souviens. Je m’étais acheté des lunettes d’approche pour voir ce qu’ils feraient avec nos enveloppes où toute notre stratégie de carrière était étalée. J’avais une peur bleue que les choses se terminent mal, mais non... nos deux boxeurs ont bien lu nos recommandations et ils ont dit "oui"... »

À l’issue des Jeux olympiques, Alvarez a été éliminé par le Britannique Tony Jeffries dès la première ronde, mais Rivas s’est qualifié pour les quarts de finale en battant le Bulgare Kubrat Pulev 11-5.

En quart de finale, notre Colombien a été vaincu par l’Italien Roberto Camarelle 5-9. Mais ce qu’il faut retenir, c’est que seulement deux boxeurs sont parvenus à rester debout devant le médaillé d’or Camarelle, et Rivas a été l’un d’eux. Les deux autres, le Britannique David Price et le Chinois Zhang Zhihei, ont dû se retirer par arrêt de l’arbitre.

« Après les Olympiques, et leur acceptation de venir s’installer au Canada, il fallait leur trouver un gérant c’est là que nous avons fait appel à Stéphane Lépine qui est toujours avec eux jusqu’à ce jour », d’ajouter le directeur technique de GYM.

Un doute

Malgré tout, à ce moment, Marc Ramsay avait un doute. Rivas était plutôt comme un poids lourd d’antan. Environ un pouce de moins que l’immortel champion Joe Louis. Ramsay n’a jamais regretté son choix.

« À 6’ ½’’, il n’est pas de la taille idéale des mastodontes modernes, c’est vrai, ajoute Barré. Mais regardez-le aujourd’hui. Il a la même taille sur 240 livres de muscles, pas une once de graisse. Et il cogne comme une mule. Et il est toujours invaincu après 18 victoires, dont 13 par K.-O. Vraiment, Marc Ramsay a fait un travail gigantesque avec lui, poursuit Barré. Même ses partenaires d’entraînement prennent bien souvent la poudre d’escampette plus tôt que prévu tellement ils en ont assez de se faire tabasser les côtes et le visage avec ses coups précis. Allez demander au vétéran Michael Grant ce qu’il en pense. Après tout, Grant est un ex-aspirant à un titre mondial et un excellent partenaire d’entraînement de 6’7’’. Demandez-lui si la petite taille de Rivas est un handicap pour lui. »

Contre un mastodonte

Le samedi 27 février prochain, à Anaheim, en Californie, la force de frappe et l’endurance de Rivas seront vraiment mises à l’épreuve alors qu’il sera opposé à un mastodonte de 6’6’’. Il s’agit de Gerald Washington, un ex-militaire de la NAVY qui a tenté sa chance au football où il a porté les couleurs des Bills de Buffalo.

Tout comme Rivas, Washington (16-0-1, 11 K.-O.) est invaincu chez les pros. En octobre dernier, il a dû se contenter d’un verdict nul contre le quadragénaire Amir Mansour dans un match où les trois juges ont rendu des verdicts différents (95-95, 97-93, 94-96).

C’est la première fois de sa carrière que Rivas est opposé à un rival aussi grand de taille, dont la réputation est très bonne parmi les siens, en Californie. Une victoire contre ce quasi géant lui permettrait de mieux connaître sa valeur face à ces mastodontes d’aujourd’hui, tels Anthony Joshua (6 ‘6’’), Robert Helenius (6’6 ½’’), Aleksander Dimitrenko (6’7’’), Deontay Wilder (6’7’’), Alexander Ustinov (6’7 ½’’), Marius Wach (6’7 ½’’), David Price (6’8’’), Tyson Fury (6’9’’) sans oublier Wladimir Klitschko (6’6 ½’’).

Un des dix meilleurs

S’il n’est pas connu à sa juste valeur à Montréal, il est certainement pressenti comme un des dix meilleurs cogneurs chez les poids lourds en dépit de sa petite taille comparativement aux autres.

Rivas ne s’en fait aucunement pour sa taille face aux autres mastodontes, toujours selon Barré.

« Je le regarde s’entraîner et je ne peux faire autrement que de l’admirer, de poursuivre Bernard. C’est un bloc de muscles sur une charpente de 240 livres. Pour un poids lourd de sa taille, il est très rapide et de plus il possède un très bon menton. »

Pour retrouver le nom de Rivas parmi les aspirants à la couronne de Deontay Wilder, il faut descendre jusqu’au 36e rang. Son rival Gerald Washington, dont la fiche est moins reluisante que la sienne, se retrouve au 18e rang. C’est donc dire qu’un triomphe du Québécois contre ce géant le propulserait aux alentours du 15e rang de la WBC. Ensuite, il pourrait toujours défier Pulev. Disons qu’il est un peu comme Artur Beterbiev, qui a vaincu Sergey Kovalev à deux reprises chez les amateurs, mais à cause de son absence forcée à la suite d'une intervention chirurgicale, Beterbiev se doit d’attendre son tour qui viendra bien un de ces jours.

Rivas présente actuellement une fiche parfaite : 18 victoires, 13 K.-O. et aucun revers. Il a livré trois combats en 2015. Deux ont pris fin par K.-O. dès le premier round et l’autre s’est terminé au deuxième. En somme, Rivas n’a travaillé que dans quatre rounds de boxe au total au cours de la dernière année. Et vous savez quoi? Je crois qu’il va ajouter le nom de Gerald Washington sur sa liste de victimes. Qu’en pensez-vous?

Bonne boxe!