C'est un coup dur pour la boxe québécoise, plus dur que toutes les défaites encaissées récemment. Le « chouchou » du public québécois depuis près d'une dizaine d'années, Lucian Bute, dont l'image a toujours été impeccable, est maintenant lié à une affaire de dopage. Une histoire qui, ironie du sort, survient quatre ans jour pour jour après la défaite de Bute contre Carl Froch.

Dans un communiqué, le WBC a indiqué que Bute avait échoué à un contrôle antidopage lié à son combat contre Badou Jack à la fin avril. La substance utilisée est l'ostarine.

La spécialiste de la lutte antidopage, Christiane Ayotte, a parlé des propriétés de ce produit, aussi connu sous l'appellation d'enobosarm, et qui favorise et accélère le processus de récupération après un effort physique.

« Le produit fait partie d'une nouvelle catégorie de molécules et joue le même rôle qu'un stéroïde anabolisant, sans en être un, et sans en porter les conséquences. Ce produit est populaire parmi les athlètes, car il est indétectable, mais comme on le voit, ça ne l'est pas. »

Au moment d'écrire ces lignes, on ne connaît pas la version des faits de l'ancien champion du monde. On peut toutefois établir des liens qui pourraient nous faire comprendre de quelle manière Bute en serait arrivé à ce test positif.

Depuis son retour en août 2015 contre Andrea Di Luisa, Lucian Bute travaille avec le préparateur physique Daniel Ortega qu'il a rencontré en Floride. Monsieur Ortega est le partenaire d'Angel Herredia. Ce dernier est un spécialiste de la préparation physique en athlétisme, qui a distribué à certains athlètes des hormones de croissance et de l'EPO. Monsieur Herredia a collaboré avec le FBI et l'agence américaine de lutte contre le dopage. Depuis ces témoignages, Angel Herredia travaille dans le domaine de la boxe, ayant travaillé entre autres avec Juan Manuel Marquez, Jean Pascal et Badou Jack. D'ailleurs, à la pesée, la veille du combat du 30 avril à Washington, Herredia et Ortega, les préparateurs physiques de Jack et Bute, ont passé de longues minutes à fraterniser. Est-ce que ceci explique cela? Probablement pas. Mais sachant que le partenaire du préparateur physique de Bute est un surdoué de la chimie ayant déjà trempé dans les affaires de dopage, il y a peut-être un lien à établir.

Grâce au travail de Daniel Ortega, Lucian Bute disait avoir plus d'énergie. Le boxeur de 36 ans affirmait se sentir comme s'il avait 10 ans de moins. Et ses performances sur le ring appuyaient ces propos. En l'espace de cinq mois, Bute a tenu tête pendant 24 rounds à deux champions du monde, sans l'emporter, mais en terminant chaque fois ces combats en force. Dans un entretien récent, l'actuel entraîneur de Bute, Howard Grant, m'expliquait à quel point Daniel Ortega ne laissait rien à l'improviste, et prélevait régulièrement des échantillons sanguins pour des fins d'analyse afin de « trouver des carences ».

Parce qu'on aime et que l'on respecte tant Lucian Bute, nous aimerions croire que l'ancien champion du monde est innocent. Qu'il ait consommé ce produit en toute connaissance de cause, ou non, n'enlève rien au fait que le test est positif et qu'il devra vivre avec les conséquences. À moins qu'une contre-expertise de l'échantillon « B » prouve le contraire. Mais ce type de renversement de situation est très peu fréquent.

Fin de carrière?

Quelles seront les conséquences professionnelles de ce test positif? Dans son communiqué, le WBC n'a annoncé aucune sanction dans l'immédiat, mais reviendra avec d'autres informations prochainement. Il y a quelques semaines, l'organisme de sanction basé au Mexique a eu affaire à une autre histoire de dopage. L'aspirant Russe Alexander Povetkin a été déclaré positif au meldonium, ce qui a mené à l'annulation de ce combat contre le champion des poids lourds Deontay Wilder, qui devait avoir lieu samedi dernier à Moscou. Le WBC n'a toujours pas annoncé de sanction envers Povetkin.

Dans le cas de Bute, on peut penser que cette nouvelle sonne la fin de sa carrière professionnelle. Âgé de 36 ans, Bute n'a récolté que deux victoires lors de ses derniers combats au cours des quatre dernières années. Et même s'il a obtenu un résultat « nul majoritaire » en avril contre Badou Jack et qu'il était en droit de s'attendre à un autre combat de championnat du monde que ce soit contre Badou Jack ou James DeGale, il serait surprenant que le WBC l'en autorise.

Dommage pour toute l'industrie de la boxe québécoise, qui est éclaboussée par cette histoire.