Après 28 tentatives infructueuses, la boxe à poings nus est de retour
Combat lundi, 4 juin 2018. 15:55 samedi, 14 déc. 2024. 01:32La dernière fois qu’un gala de boxe à poings nus avait été présenté, c’était le 8 juillet 1883 alors que John L. Sullivan était parvenu à vaincre Jake Kilrain après 75 rounds alors qu’un mandat d’arrêt et une récompense de 1 000$ avaient été placés sur leurs têtes.
Il s’est donc passé 130 ans entre ce gala et celui de Chyenne, au Wyoming, présenté samedi soir dernier devant plus de 2 000 personnes.
Aucune mortalité. Quelques fractures. Quelques entailles et beaucoup de sang. Mais les deux médecins n’ont décelé aucune blessure grave et les deux ambulances sur place sont restées immobiles.
Dix combats étaient à l’affiche parmi les vingt combattants, dont deux femmes. 15 des pugilistes étaient des artistes des arts martiaux, quatre autres étaient des boxeurs et le dernier venait du kickboxing.
Seulement trois des dix duels se sont rendus à la limite de cinq assauts.
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Tous les combats étaient de cinq rounds de deux minutes chacun. Trois combats se sont rendus à la limite et deux autres ont pris fin en moins d’une minute.
Ces combats ont eu lieu sur un ring circulaire et les pugilistes avaient le droit d’avoir des bandages aux pouces et aux poignets. Mais les jointures ne devaient pas être couvertes.
Règlements assez simples
Les règlements étaient assez simples. Pas de coups de pied, ni de coup de coude, mais un pugiliste pouvait tenir son rival par le cou et le frapper de l’autre main.
C’est la première fois qu’une Commission athlétique d’état sanctionnait un tel gala. En 2011, sur la réserve indienne de la nation Yavapai, en Arizona, on avait présenté un tel gala et le champion poids lourd Bobby Gunn en avait profité pour vaincre Richard Stewart.
Pas moins d’un million de téléspectateurs avaient acheté le gala à la télévision payante. Cette fois, le spectacle a aussi été présenté à la télé payante au coût de 29,99 $, mais le nombre d’acheteurs demeure inconnu pour le moment.
Ce que l’on sait c’est que le promoteur du tournoi, David Feldman a dépensé 500 000 $ pour l’organisation de la soirée. Il attend donc le résultat de la télé payante pour dévoiler l’endroit et la date du prochain gala, qui devrait avoir lieu en septembre prochain.
D’autres états viendront-ils rejoindre celui du Wyoming? Seul le temps le dira.
Ce que je sais, c’est que l’on ne verra pas de tels galas sur le territoire du Québec. Quand j’en ai parlé au patron de la Régie des sports de combat, Michel Hamelin, il m’a répondu qu’il ne tolèrerait pas ces duels barbares sur son territoire.
Remarquez qu’il n’est pas le seul à penser ainsi. Mais souvenez-vous de la naissance des combats ultimes alors qu’à peu près tous les coups étaient permis.
Début en 1993
Ce n’est que le 12 novembre 1993 que les Régies des sports ont commencé lentement, mais surement, à accepter les combats d’arts martiaux mixtes. Ce fut lors de la présentation de l’UFC1, au McNicolls sports arena, de Denver, au Colorado, que tout est devenu légal dans certains états.
Pas moins de 7 800 personnes avaient assisté à cet évènement où le Brésilien Royce Gracie avait remporté les honneurs de ses trois combats successifs. Finalement, il avait été couronné champion grâce à sa victoire par soumission sur Gerard Gordeau.
Pendant sept ans, Feldman a tenté de présenter un gala de poings nus dans 28 états américains, mais sans succès. Finalement, quand il a cogné à la porte du 29e état, le Wyoming, il a trouvé preneur en Bryan Pedersen, le grand patron des sports de combat de son état.
Il faut dire que Pedersen est un fin connaisseur. Après tout, en 2013, il avait livré lui-même un combat d’arts martiaux mixtes. Il avait alors perdu par soumission contre un certain Jesse Trejo.
Pedersen est aussi un politicien qui veut accélérer les retombées économiques de son état. On sait que la ville de Chyenne est la capitale de l’état du Wyoming. Cette ville est habitée par moins de 65 000 habitants et est reconnue surtout pour ses mines de charbon. Mais quand même les temps sont durs.
La tête d'affiche
La tête d’affiche a été Bobby Gunn qui a conservé sa fiche intacte (73-0) en battant Irineu Beato Costa fils par K.-O. dès le premier round. Une droite du corps et un crochet à la tête ont signé la fin du combat.
Gunn livre non seulement des combats à poings nus, mais il est aussi un boxeur professionnel (23-7-1—20/K.-O.) en dépit de ses 44 ans. Il a été battu par TK.-O./8 par Roy Jones en février 2017, mais est revenu à la charge avec deux victoires par TK.-O./2 sur James Morrow et Gilvert Matheus Domingos.
Lorsqu’on lui a demandé si ces combats à poings nus n’étaient pas plus dangereux que la boxe conventionnelle, il a répondu : « Jamais de la vie. À la boxe, il y a une vingtaine de mortalités par an. À poings nus, il n’y en a aucune. Disons qu’il faut faire plus attention qu’en boxe. Surtout pour nos mains, nos jointures. »
Et il poursuit en disant : « En boxe il y a des dizaines et des dizaines de coups sur la tête, ce qui éventuellement cause des séquelles. À poings nus, il n’y a pratiquement pas de coup sur la tête. »
En 18 secondes
C’est à Sam Shewmaker, (Bellator) un maçon de métier, de la ville de Gravois Mills, au Wyoming, qu’est revenu l’honneur du K.-O. le plus rapide de la soirée. Il n’a pris que 18 secondes, un seul coup de poing, pour terrasser son rival Eric Prindle (11-9-0), un pugiliste des arts martiaux.
Un ex-combattant de l’UFC, Bec Rawlings, a réarrangé le nez d'Alma Garcia pour finalement gagner par arrêt du médecin au deuxième engagement.
Le combat le plus sanguinaire de la soirée a été celui que se sont livré Joey Beltran et Tony Lopez pendant dix minutes.
Les deux saignaient abondamment après cinq rounds et c’est à peine s’ils pouvaient se tenir debout tellement ils étaient exténués.
Le kickboxeur Maurice Jackson, n’a pris que 70 secondes pour avoir raison de son rival Dale Sopi.
Si jamais ce tournoi se poursuit en septembre prochain, il est pressenti que le favori sera Sam Shewmaker, un pugiliste qui a remporté par trois fois les honneurs des Gants dorés de l’état du Wyoming.
Devrait-on permettre ces combats?
Maintenant, il reste à se poser la question : devrait-on permettre ce genre de combats à poings nus?
Plusieurs prétendent que c'est retourner en arrière, que c’est barbare, que c’est trop dangereux, que ce n’est pas assez contingenté, bref que c’est inacceptable en ces temps modernes. Mais souvenez-vous, il n’y a pas si longtemps, on disait la même chose des combats d’arts martiaux mixtes.
Bonne boxe