Georges St-Pierre m’a fait vivre de grandes émotions samedi soir au Madison Square Garden. Depuis que je suis chroniqueur sportif, les émotions face au sport ont laissé place à un esprit plus analytique et critique. Mais samedi, le fan de sport que je suis et que nous sommes tous, si vous lisez ces lignes, a explosé de joie! 

 

Je suis loin d’être un expert des arts martiaux mixtes, mais j’ai une passion depuis les premières cassettes VHS que j’ai regardées. Je les écoutais en boucle au club vidéo où je travaillais à Laval. Évidemment, un jour mon boss m’a surpris et trouvait ça un peu violent pour un commerce se voulant familial. Lorsque j’ai commencé à travailler à la défunte radio sportive CKAC Sports, je voulais parler de l’UFC. J’ai alors fait la première entrevue radiophonique de GSP à Montréal dans une émission de fin de semaine. Je me suis lié d’amitié avec l’arbitre Yves Lavigne qui m’apprenait beaucoup de choses sur la vie des combattants. Par la suite, il est devenu chroniqueur UFC pour moi et je lui parlais en direct des événements de l’UFC pour un modique cachet de zéro dollar! Il le faisait par passion pour le sport. Par la suite, j’ai fait la description de combats à RDS. Bref, vous voyez le topo? J’aime ça, mais je ne suis pas un expert! 

 

En attente d’être déçu 

 

En fin de semaine dernière, je me suis rendu à New York avec des collègues de radio Énergie 94,3 à Montréal et cinq personnes qui ont gagné le trip d’une vie à la radio. Allez voir le retour de GSP à New York au Madison Square Garden, et tout ça en jet privé. Eh bien jamais plus un concours ne sera aussi parfait! Trois ceintures étaient à l’enjeu et les trois ont changé de mains. Joanna Jedrzejczyk , la championne et favorite, s’est fait battre par K.-O. au 1er round. Autour de nous, la consternation se mêlait à l’enthousiasme car elle venait de perdre contre une Américaine!

 

Ensuite, les attentes étaient élevées pour le combat entre deux Américains : Cody Garbrandt, le champion et le favori de la foule, contre le vilain et le mal-aimé, T.J. Dillashaw. Ce dernier s’est montré arrogant et s’est donné en spectacle dès le 1er round avec son attitude condescendante, mais il y a ensuite eu une explosion de joie dans la foule à la fin du round lorsqu'il s’est fait ébranler avant d’être sauvé par la cloche. Garbrandt a débuté le deuxième round avec confiance et a nargué Dillashaw à son tour. Et puis, badaboum! Coup de pied à la tête du favori et le MSG a explosé! C’était indescriptible! Le bruit, les cris, les joies et les frustrations tous entremêlés! 

 

Comment le combat de GSP allait-il pouvoir surpasser cette montée d’adrénaline, cette émotion que nous venions de vivre?

 

Mission impossible 

 

Déjà que peu de gens donnaient une chance à GSP de l’emporter, ceux qui l’ont fait n’étaient pas prêts à y mettre un vieux deux piastres! Plusieurs combattants ont même été jusqu’à dire que les méthodes de St-Pierre étaient dépassées. GSP ne pouvait l’emporter que de sa façon traditionnelle, c’est-à-dire à l’aide de jabs efficaces et d’amenées au sol pour s’imposer par décision, disaient-ils. Transporter cette foule vers un autre niveau d’excitation allait être impossible si les prédictions de plusieurs experts se matérialisaient.

 

Pour moi, la situation était encore plus vouée à l’échec car je me suis mouillé en ondes en prédisant une victoire sans équivoque de GSP. St-Pierre est un homme excessivement intelligent et il n’aurait jamais choisi Michael Bisping s’il ne croyait pas que celui-ci était parfait pour son style. GSP avait peut-être fait une pause pendant quatre ans, mais on entendait qu’il était aussi souvent dans le gymnase qu'auraparavant, sinon plus. Bisping ne s’était quant à lui pas battu depuis un an et il était selon lui impossible d’être plus souvent dans le gymnase que George. Bref, j’étais convaincu de ma prédiction. 

 

Heureuse de voir GSP faire son retour, la foule était animée d’une excitation à son maximum. Celle-ci s’est toutefois transformée en une accalmie lorsque les deux combattants ont pris un bon moment pour s’étudier. Le jab de St-Pierre se faisait plutôt rare, alors que les droites sortaient plus souvent. GSP a plus tard expliqué que c’était sa stratégie. Encore une fois, il venait de prouver sa grande intelligence. Mais revenons au combat. La foule a repris feu à la suite du superman punch (coup de poing sauté) réussi par GSP à la fin du 1er round. Tout le monde avait GSP en avance, mais Bisping avait laissé sa carte de visite à St-Pierre dans le 1er round. Au deuxième, après l’amenée au sol, on se demandait si St-Pierre allait pouvoir tenir le coup avec cette nouvelle masse musculaire qui était perceptible du niveau 200 au MSG. 

 

Et puis pow! Lorsque GSP a atteint Bisping à la tête et provoqué sa chute, le MSG s’est levé d’un trait.  J’étais parmi ceux qui, debout, encourageaient le favori de tous à descendre des coups de coude au visage de Bisping. J’ai eu l’impression qu’il en a donnés une quinzaine tellement j’ai eu le temps de hurler ma joie et de dire à mon voisin que Bisping était un « tough » d’encaisser tous ces coups. J'ai fait du « shadow coup de coude » en même temps que le futur champion. Et c’est à ce moment que GSP est passé derrière Bisping pour l’étranglement. C’était irréel. Le bruit, la joie, et personne pour me dire : « no cheering on the press box » (pas de célébrations sur la galerie de presse). 

 

Le Mario Lemieux du AMM

 

Ce que George St-Pierre a réalisé comme exploit devrait passer à l’histoire comme le retour au jeu de Mario Lemieux. Lemieux avait quitté à son apogée en raison de problèmes de santé et il était revenu en étant non seulement dominant, mais aussi le meilleur joueur de la LNH même s’il avait raté plusieurs mois d’activités en raison de la maladie. On ne connaîtra peut-être jamais les raisons qui ont forcé GSP à prendre une pause, mais j’ai encore l’image de l’homme défait au centre de l’octogone qui dit qu’il doit prendre une pause pour régler ses problèmes. À sa façon et dans son sport, il a fait un retour historique : en remportant son combat de retour, un combat de championnat du monde, dans une catégorie de poids qui n’est pas la sienne et tout ça avec éclat.

 

Bravo champion!