Alonso chanceux, Button sacrifié?

Il se dit qu'un champion du monde ne commet qu'une (ou deux maximum) gaffes au cours d'une saison. Ce ne sera pas le cas en 2010. Fernando Alonso a commis le plus grand nombre d'erreurs (4) parmi les prétendants au titre et mène le championnat. Jenson Button n'en a commis aucune mais, est presqu'éliminé. Cherchez l'erreur.


Fernando Alonso (Ferrari) a profité des erreurs de deux de ses rivaux au Grand Prix de Corée.

Mark Webber (Red Bull), avec sa sortie de piste, et Lewis Hamilton (McLaren), avec son tout droit au premier virage à la suite d'une relance de la course, ont permis à l'Espagnol de gagner deux positions et de finalement remporter l'épreuve à la suite de l'abandon de Sebastian Vettel (Red Bull) sur bris de moteur.

Plutôt chanceux l'Espagnol. Il domine le classement pour la première fois depuis le mois de mars, alors que c'est bel et bien lui qui a commis le plus de fautes directes (pour emprunter un terme de tennis) cette saison.

Alonso 4

- en Chine, il anticipe le départ, ce qui lui vaut une pénalité de passage aux puits. Il termine 4e d'une course qu'il aurait pu remporter, car l'écurie Red Bull a mal géré l'utilisation des pneus sur une piste détrempée.

- à Monaco, l'Espagnol tape les rails dans la montée de Massenet lors de la séance d'essais libres du samedi matin. Résultat: il ne peut participer aux qualifications, pendant que ses mécaniciens réparent sa monoplace. Il part des puits et conclut au 6e rang.

- en Grande-Bretagne, Alonso dépasse Robert Kubica (Renault) pour la 4e position en court-circuitant une chicane. La manoeuvre est illégale aux yeux de tous, mais le pilote et son équipe refusent de voir la réalité. Au lieu de redonner la place à Kubica, Alonso poursuit son chemin jusqu'à ce qu'il reçoive une pénalité de passage aux puits. Résultat : une 14e place au lieu d'une 4e.

- en fin de course en Belgique, il sort de piste sur un revêtement détrempée et perd la 8e position.

Vettel 3

- en Turquie, l'Allemand, qui occupe la deuxième place, porte une attaque sur le meneur Webber. Ce dernier roule en milieu de piste et ne dévie pas de sa trajectoire. Vettel plonge à l'intérieur et se porte à sa hauteur en soulevant beaucoup de poussière puisqu'il est hors trajectoire. Il constate qu'il aura de la difficulté à bien freiner pour le virage qui suit. Il se déporte donc vers sa droite, vers la trajectoire de course, mais aussi vers Webber qui est (encore) là. Le contact sera fatal pour Vettel qui perd une 2e place.

- en Hongrie, Vettel reçoit une pénalité de passage aux puits pour ne pas avoir respecté la procédure lors d'une neutralisation sous drapeau jaune. Il avoue avoir un peu dormi et oublié le règlement obligeant les concurrents à rester à dix longueurs maximum de la Voiture de sécurité. Il est à vingt longueurs… une 2e place, sinon la victoire, s'envole.

- en Belgique, il s'approche de Button pour tenter une manoeuvre de dépassement. Constatant qu'il va manquer d'espace, il tente de corriger le tir en donnant un coup de volant qui lui fait perdre le contrôle de sa voiture. Après avoir heurté la McLaren de Button (abandon), il mène une course difficile (contact avec Liuzzi, pénalité, crevaison) pour éventuellement terminer 15e au lieu de 3e.

Webber 2

- en Australie, Mark Webber occupe une modeste 6e place avant de harponner Hamilton en fin de course. Il termine 9e.

- il perd le contrôle de sa voiture en Corée et les points de la 2e place s'envolent.

Hamilton 2

- après 13 courses impeccables, Hamilton s'emporte en Italie. Trois virages après le départ, il tente un dépassement impossible sur Felipe Massa et brise sa suspension. Sa course se termine dans un bac à gravier où il laisse une probable 4e place.

- en Corée, son tout droit le fait descendre de la première à la deuxième marche du podium.

Button 0

Bizarrement (?), c'est le pilote qui n'a pas commis de grosse gaffe cette saison qui se retrouve presqu'éliminé!

Bon, il y a quand même une explication à toutes ces erreurs. La saison 2010 est ultra compétitive, avec cinq pilotes dans la course au titre. Qui parfois en font trop pour tenter d'obtenir un meilleur résultat.

Alonso? Il ne dispose pas de la meilleure voiture (Red Bull) et doit donc forcer son talent pour compenser.

À l'opposé, on sent que Button ne prend pas de risques inconsidérés. Il gère ses courses, ce qui l'a bien servi l'an passé. Manque-t-il de motivation après son titre mondial ? Ou a-t-il été sacrifié par l'écurie McLaren dès le Grand Prix du Japon ?

Button sacrifié?

À l'issue du Grand Prix du Japon, l'épreuve précédant la Corée, Jenson Button se posait des questions.

Parmi les pilotes ayant participé à Q3, il a été le seul à prendre le départ en gomme dure alors que ses rivaux partaient en gomme tendre.

Sixième en début de course, il est passé en tête lorsque ses rivaux sont passés aux puits pour changer de pneus : Hamilton au 22e tour, Alonso-Vettel au 24e et Webber au 25e (Kubica deuxième en début d'épreuve ayant abandonné).

Button s'est alors retrouvé, avec ses pneus usés, devant Vettel-Webber-Alonso-Hamilton disposant de pneus neufs plus rapides.

LA question, celle qu'il s'est posé lui-même après la course : pourquoi l'avoir laissé en piste avec ses pneus usés, au lieu de lui donner des pneus à gomme tendre qu'il aurait pu mener jusqu'à l'arrivée?

Élément de réponse : son rythme relativement lent en tête de la course ralentissait les deux Red Bull et la Ferrari d'Alonso, ce qui permettait à Hamilton de se rapprocher. Possiblement au point d'inquiéter le pilote de la Ferrari.

Sur place, les ingénieurs de Red Bull avaient rapidement déduit que McLaren avait l'intention de laisser Button en piste jusqu'au tout dernier tour, dans le but d'avantager le plus possible son coéquipier.

Hamilton a connu des ennuis de boîte au 37e tour, ce qui l'a forcé à ralentir. Ne lui étant plus d'aucune utilité, Button a été “libéré” et a aussitôt fait son arrêt aux puits. Trop tard. Pour la course et pour le titre mondial.

Questions-réponses rapides

Si JV avait piloté une voiture de sa propre écurie, serait-il devenu le premier pilote-propriétaire?
- Eric Dufour, Laval


Non, mais le premier depuis fort longtemps. La chose était plus courante lorsque la F1 était plus simple et moins onéreuse.

Voici la liste :

Chris Amon 1974

Bill Aston 1952

Jack Brabham 1962 à 1970

Emerson Fittipaldi 1976 à 1980

Wilson Fittipaldi 1975

Dan Gurney (Eagle) 1967-68

Graham Hill 1975

Bruce McLaren 1966 à 1970

Arturo Merzario 1978-79

Hector Rebaque 1979

John Surtees 1970 à 1972

Jack Brabham a été le seul à être couronné champion au volant de sa propre voiture. Bruce McLaren et Dan Gurney ont chacun gagné une course.

J'aimerais savoir pourquoi Toro Rosso et Red Bull n'ont pas le même châssis?
- Daniel Avelt, Ile Perrot


Dans le but d'aider de nouvelles écuries à faire leur entrée en F1, la FIA avait lancé l'idée, dans les années 2000, de laisser tomber son règlement imposant aux écuries d'être constructeur de leur propre voiture.

C'est ainsi que David Richards (Prodrive), qui avait obtenu une place en F1 pour la saison 2007, avait basé tout son projet sur l'achat de châssis McLaren. En vain.

En effet certaines écuries existantes s'y sont opposées. Williams, par exemple, affirmait qu'il était illogique de dépenser une fortune pour construire sa propre voiture pour finalement se faire battre par une petite écurie se contentant d'acheter un bon châssis.

Toro Rosso a profité d'un certain laxisme de la FIA en achetant des plans de la compagnie Red Bull Technology (et non de l'écurie de F1 Red Bull Racing, bravo pour la subtilité) pour ses voitures 2007-08-09, mais ce privilège ne tient plus cette année.

J'aimerais savoir pourquoi certaines écuries de F1 utilisent de la peinture sur leur voiture lors des essais. Ils appellent cela de l'aeropaint, je crois.
- Jean-François Dubé, Rimouski


Mais vous avez la réponse dans votre question, mon cher Jean-François!

Cette peinture verte est appliquée sur la voiture et sa viscosité fait en sorte qu'elle ne dégouline pas sur la carrosserie. Par contre, l'effet du vent sur la monoplace qui roule en piste crée des motifs sur la carrosserie, qui permettent aux aérodynamiciens d'analyser l'écoulement de l'air sur les divers éléments de la voiture.

Cette méthode est normalement utilisée lors des essais hivernaux. Mais, avec l'interdiction d'effectuer des essais privés en cours de saison, on a vu Red Bull utiliser cette méthode le vendredi du récent GP d'Italie.