Les sept leçons de Prost
Formule 1 vendredi, 23 mai 2014. 11:11 mercredi, 11 déc. 2024. 21:33MONACO - Alain Prost, 59 ans, était surnommé Le Professeur à l'époque de ses quatre titres mondiaux en Formule 1; quatre fois vainqueur du GP de Monaco, il a livré jeudi à la presse française une analyse de la F1 actuelle, digne des leçons qu'il donnait autrefois à ses rivaux sur la piste.
Leçon 1 : le bruit des nouveaux moteurs V6 turbo hybrides
« Je suis partagé, car je comprends les fans qui sont un peu déçus, mais ça ne me dérange pas car je n'appréciais pas spécialement le bruit strident des V8. Au GP historique de Monaco, il y a 15 jours, les bruits étaient plus mélodieux, et surtout différents. Quand j'étais en F1, il y a eu un début de saison avec un moteur turbo (Renault), des V8 et trois moteurs V12, le Ferrari, le Lamborghini, le Matra. »
Leçon 2 : la baisse d'audience de la F1
« Le bruit est une sorte d'excuse pour d'autres choses qui ne vont pas très bien en F1. Les gens adhèrent un peu moins et on a du mal à attirer l'attention des plus jeunes, alors qu'il y a beaucoup d'électronique dans les nouvelles F1. Ça manque aussi d'humain : on parle beaucoup trop de stratégie et de choses qui sont programmées et décidées dans les puits. »
Leçon 3 : le besoin de pédagogie
« Le défi technique a été gagné assez vite, notamment en termes de fiabilité. Mais on est allés trop loin dans l'aéro(dynamique), alors que c'est le seul truc qui n'est pas en relation directe avec la voiture de série. L'autre défi est plus pédagogique : c'est d'expliquer aux gens pourquoi on a changé, et que les nouveaux moteurs sont plus proches de la série. Sur ce plan-là, ce n'est pas encore une grande réussite... »
Leçon 4 : la domination de Mercedes-AMG
« Je m'y attendais. Mercedes était prête à un moment où l'intégration du moteur dans le châssis, à cause du nouveau règlement, était extrêmement importante : ils construisent les deux et ils ont commencé très tôt à concevoir les monoplaces de 2014. Peut-être plus tôt que les autres, avec un plan de bataille très précis et les moyens nécessaires, en s'organisant à l'allemande et en se renforçant. Ils ont forcément un avantage sur les écuries qui dépendent d'un motoriste et sur un motoriste comme Renault qui était en train de gagner quatre titres de suite, en fournissant quatre équipes. Mercedes a aussi développé une suspension très réussie, on s'en est rendu compte à Barcelone. »
Leçon 5 : la rivalité entre Lewis Hamilton et Nico Rosberg
« C'est rare d'avoir deux pilotes aussi proches, avec des qualités différentes, sans qu'un numéro 1 et un numéro 2 soient définis par contrat, comme à l'époque de (Michael) Schumacher chez Ferrari. Là-dessus, il faut vraiment rendre hommage à l'équipe (Mercedes) et ça peut durer jusqu'au bout, mais ce sera difficile, car c'est dans la nature des choses. En plus, avec la course à 50 points à la fin (NDLR : le GP d'Abou Dhabi, fin novembre, où les points seront doublés), les choses ne seront jamais vraiment figées. Ça va peut-être les obliger à prendre une décision et il faudra les comprendre. Car ils ne peuvent pas se permettre de perdre ce championnat. »
Leçon 6 : le GP de Monaco
« Ce GP est une occasion à saisir pour les rivaux de Mercedes car c'est le circuit le plus lent de l'année et assez différent des autres. Mais Mercedes domine tellement sur les autres tracés qu'il n'y a aucune raison que ce soit différent ici. Sur ce tracé, le moteur Renault doit être la deuxième force, mais sur un tour, en qualifications, la partie pilote est importante et certaines équipes, comme Williams ou McLaren, peuvent faire des prouesses. Mais pas forcément au point d'aller chercher les ténors, les cadors. »
Leçon 7 : les qualifications de samedi
« Ici à Monaco, les meilleurs pilotes montent en puissance pour être au top et donner le maximum d'énergie le samedi en qualifications. Il y a une attitude spéciale à avoir, car la qualif se joue à la fois sur la maîtrise et la prise de risque, obligatoire pour aller chercher un très bon temps. On retient son souffle, comme aussi au départ et dans les premiers tours, car ça va très vite et on ne peut pas s'échapper. On frise très souvent la correctionnelle. »