Les événements se sont enchaînés à un rythme endiablé en Formule 1 au cours des derniers jours et quelques conclusions ressortent naturellement après les différentes annonces. L'une d'elles, c'est que Mercedes sort indéniablement grande gagnante de cette chaise musicale des pilotes. Et quand on dit « Mercedes », on ne parle pas que de l'écurie qui porte ce nom, mais aussi du constructeur qui fournit ses moteurs à l'écurie McLaren, notamment.

L'arrivée de Lewis Hamilton au sein de l'équipe dirigée pas Ross Brawn pourrait s'avérer le coup de levier qu'elle recherche désespérément depuis qu'elle affiche les couleurs de la grande firme allemande. L'ex-champion du monde démontre présentement une remarquable forme sportive, celle des beaux jours et il a manifestement réussi à mettre beaucoup d'ordre dans sa vie personnelle. Tout ceci lui procure une sérénité évidente, essentielle à l'aube du défi colossal qui l'attend.

Par ailleurs, le transfert de Sergio Perez est aussi un coup fumant pour McLaren-Mercedes. L'arrivée du jeune prodige aux côtés de Jenson Button va donner un merveilleux équilibre à cette équipe qui est reconnue pour donner un traitement égal à ses pilotes et leur laisser la place nécessaire pour rivaliser entre eux.

Quant au départ de Michael Schumacher, c'est un peu malheureux à dire, il s'agit d'un soulagement pour tout le monde. Le septuple champion du monde a d'ailleurs avoué ressentir ce sentiment lors de l'annonce de sa retraite définitive et nul doute que les mêmes états d'âme furent partagés dans les hautes sphères de Mercedes, malgré tout le respect qui s'impose envers ce grand pilote.

Le rôle de sa vie

Lewis Hamilton vient donc de prendre la décision la plus importante de sa carrière, une décision dictée par bien plus que l'argent si l'on se fie aux propos de Ross Brawn et de Martin Whitmarsh. Après avoir grandi dans le giron de McLaren et y avoir passé toute sa carrière en F1, Hamilton ressentait le besoin d'aller ailleurs, pas juste pour le principe de la chose, mais pour saisir l'occasion de contribuer à bâtir une écurie championne, comme Schumacher l'a fait avec Ferrari à l'époque et comme Alonso l'a fait à son tour avec la Scuderia.

Sans discréditer Nico Rosberg et même si cela n'est pas avoué directement, Hamilton deviendra la pièce centrale des prétentions de Mercedes et cela lui donnera les coudées franches qui lui manquaient probablement chez McLaren. Or, pour un ancien champion du monde et pour un surdoué comme lui, une telle opportunité est trop belle pour la laisser passer, surtout si elle vient d'un groupe aussi sérieux que Mercedes.

Cela dit, Lewis possède-t-il de façon intrinsèque le leadership nécessaire au succès de son nouveau rôle? Voilà une question légitime. Mais honnêtement, la réponse n'appartient qu'à lui. D'ici la fin du présent championnat, il aura l'occasion d'y répondre en partie, de par son niveau d'engagement envers l'écurie qu'il a choisi de quitter. Au cours des essais hivernaux, on pourra mieux juger aussi de l'impact de son arrivée chez Mercedes. Mais ce n'est qu'à long terme qu'on pourra porter le jugement définitif sur son apport. On ne saura que bien plus tard s'il est capable d'assumer les nombreuses responsabilités qui incombent à un très grand pilote.

Lewis Hamilton va donc jouer le rôle de sa vie à compter de 2013. Il a choisi de le faire consciemment, en reconnaissant les risques inhérents à une telle décision. Pour cela, il faut le saluer. À lui maintenant de faire le reste.

Perez sous les réflecteurs

Tous ceux qui ont suivi la F1 de près depuis l'an dernier connaissent le talent exceptionnel du mexicain Sergio Perez. Au volant d'une voiture respectable, Perez, âgé d'à peine 22 ans, a fait des prodiges et a donné à son écurie des points inespérés au classement, des points extrêmement payants! Cela dit, Peter Sauber savait très bien, comme tout les observateurs le moindrement avisés, que le jeune homme allait lui glisser entre les doigts d'ici la fin de la saison et il s'était certainement préparé à cette éventualité.

Ce qui en étonne plusieurs, c'est que Perez ait quitté la filière Ferrari, filière à laquelle il est associé depuis les premiers balbutiements de sa carrière. Combien de fois avons-nous entendu le nom de Perez associé au baquet de Felipe Massa, même dès cette année? Comment, par ailleurs, Ferrari pouvait-elle laisser filer un tel joyau vers une organisation rivale?

La réponse s'explique assez facilement, d'abord par la présence de Fernando Alonso, étiqueté sans le moindre doute comme le grand pilote numéro un de Ferrari, celui vers qui sont tournés exclusivement tous les efforts de championnat. À ses côtés, la direction veut un bon numéro deux, avec une expérience suffisante pour à la fois accepter ce rôle sereinement et à la fois composer avec la pression énorme qui incombe à un pilote de la Scuderia. Or, Perez ne répondait pas à ces critères. Et il y a fort à parier qu'il ne voulait rien savoir du volant #2 de Ferrari, à ce stade de sa carrière.

Chez McLaren, il aura un environnement parfait. Button est très à l'aise dans son rôle de « grand frère » et il a prouvé qu'il peut très bien cohabiter avec un pilote rapide et plus jeune. Il sait aussi que ses nouveaux patrons voudront de lui qu'il fonce tête première, même si cela se fait aux dépens de son coéquipier.

Sage décision de Schumi

Que l'on soit un fan de Michael Schumacher ou non, il est impossible de ne pas reconnaître la place exceptionnelle qu'il occupe dans l'histoire de la F1. Il était donc devenu tout aussi impossible de le voir aussi brouillon et malchanceux depuis son retour en F1. « Triste », est probablement le mot le plus juste mais heureusement, le grand champion aura eu la sagesse de comprendre et de ne pas chercher à s'accrocher davantage.

Au fond de lui-même, je suis convaincu qu'il ne regrette aucunement d'avoir renoué avec la F1 chez Mercedes en 2011. Un peu comme Brett Favre à l'époque, il jugeait avoir renoncé à sa passion prématurément et il croyait pouvoir en donner encore à ce sport qui fut toute sa vie. Cela lui permettait aussi de boucler la boucle professionnelle, soit de revenir au sein de l'environnement qui lui a donné ses premières chances, à l'époque des flèches d'argent en prototypes au début des années 1990.

Mais la F1 a tellement évolué depuis ses grandes conquêtes qu'il lui était devenu impossible de s'adapter à l'interdiction des essais privés, à l'absence d'assistance électronique, à l'abolition des ravitaillements, à l'obsession de préserver les pneus, aux gadgets qu'on retrouve sur les monoplaces d'aujourd'hui. Bref, il avait fait son temps, dans le contexte actuel.

Il pourra maintenant recevoir, entièrement et sans nuance, la reconnaissance qu'il mérite!