L'exécution au rendez-vous
Montréal Alouettes mardi, 8 oct. 2013. 21:35 jeudi, 12 déc. 2024. 06:46La victoire de la fin de semaine dernière contre les Eskimos à Edmonton était très importante pour toute la dynamique des éliminatoires et pour éviter d’avoir une équipe de l’Ouest qui traverse dans l’Est grâce au fameux règlement du croisement.
Mathématiquement, les Eskimos ont encore une chance, mais avec le gain des Alouettes, le patient ne montre pas de gros signes vitaux. Il est sur le respirateur artificiel!
J’ai beaucoup apprécié la victoire des Alouettes parce qu’elle est survenue sur la route. Les Alouettes ont réglé le cas d’Edmonton. Ils ont gagné les matchs qu’ils sont censés remporter. Avec sa fiche, Edmonton ne représentait clairement pas une bonne équipe. Néanmoins, le football se joue sur le terrain et non sur papier. Les Alouettes ont fait ce qu’ils devaient faire et ils ont joué à leur niveau. Ils ont probablement disputé un de leur meilleur match de la saison. Ce qui était plaisant, c’est que toutes les unités se sont complétées.
Du côté de l’attaque, le niveau d’exécution a rejoint le niveau de préparation. Parfois, tu peux avoir une très bonne préparation et un excellent plan de match, mais si l’exécution est mauvaise, ça ne fonctionnera pas. Il est également difficile d’avoir une bonne exécution si tu n’as pas un bon plan de match et de bonnes stratégies pour que les joueurs se démarquent. Lors de cette partie, le niveau d’exécution a été jumelé à une bonne préparation pour donner la meilleure performance de l’attaque cette année.
Cette dernière a récolté 441 verges de gains au total. Ce que je retiens c’est l’équilibre de celle-ci : 188 verges au sol et 262 par la passe. Tu ne peux pas avoir un meilleur ratio. J’ai aimé aussi la sélection des jeux.
J’ai un petit conseil pour les prochains adversaires des Alouettes. Quand ces derniers sont profondément dans leur territoire et qu’ils sont en premier essai et 10, ne vous endormez pas! Ça fait trois matchs que je vois Doug Berry sélectionner des feintes de jeu au sol suivies de longues passes. On en a vu quelques-unes au fil des semaines avec Duron Carter. Cette fois, on a commencé en lion avec une bombe de 55 verges à Brandon London.
Ce que j’ai aimé dans tout ça, c’est la sélection agressive de jeux alors que l’équipe était profondément dans son territoire. C’était le début du match. Tu serais porté à jouer de façon plus conservatrice. Tu ne veux pas cafouiller. Tu veux prendre le pouls de ce que la défense adverse a en tête pour le match.
Les Alouettes affrontaient les Eskimos qui sont derniers contre le jeu au sol. Ils ont profité du fait que, toute la semaine, on a parlé de l’importance de l’attaque terrestre pour aider un jeune quart. Alors que fait-on? On utilise la feinte de jeu au sol pour surprendre Edmonton et on lance une passe de 55 verges à Brandon London. C’était de toute beauté!
C’était aussi une belle façon d’impliquer London dès le début du match. On dit souvent que les receveurs de passe doivent être mis à contribution tôt dans le match pour rester concentrés. De plus, London avait échappé trois passes lors de la dernière rencontre en Saskatchewan. Ce jeu a donc donné le ton à la partie, mais cela lui a aussi permis de retrouver sa confiance. Ceci ne peut qu’être bénéfique pour l’attaque en général.
On marque un premier touché. On commence la deuxième séquence encore profondément dans le territoire. Qu’est-ce qu’on fait encore une fois? Feinte de jeu au sol, dérobade du quart et passe de 62 verges à Arland Bruce et on va marquer un deuxième touché. C’est clair qu’on venait d’ébranler les Eskimos. Sur la route, on venait d’éliminer carrément le 13e joueur, soit la foule. C’était rendu très tranquille dans le stade. Les Alouettes n’étaient donc pas dérangés pour la cadence et la communication sur le terrain. C’était mission accomplie!
Une nouvelle arme pour Neiswander
Un autre point que j’ai beaucoup apprécié est les courses de Josh Neiswander. Pour mettre le tout en perspective, depuis le début de l’année, il n’avait que 21 verges de gains au sol. Contre les Eskimos, il a effectué deux courses pour 27 verges. Les deux étaient en situation de deuxième essai et long. Cela me dit que Neiswander a réagi au lieu de trop penser et ses instincts ont pris le dessus. Cela veut dire que ça commence à aller un peu moins vite dans sa tête.
En plus, un quart qui ne court généralement pas, et qui va chercher des premiers jeux sur des deuxièmes et longs, c’est très démoralisant pour une unité défensive. Neiswander a réalisé les deux courses tôt dans la rencontre. Cela a permis d’étirer des séquences et l’attaque est restée plus longtemps sur le terrain. Elle a fait plus de jeux et elle a pris son rythme.
En début de match, si tu fais des séquences de deux jeux suivies d’un dégagement, tu ne prends pas ton rythme et la défense adverse prend confiance. J’ai beaucoup aimé ces courses et j’espère que ce n’est pas la dernière fois qu’on verra cela de la part de Neiswander.
Évidemment, quand on parle de 188 verges au sol et d’un seul sac du quart contre une bonne ligne défensive, on doit dire bravo à la ligne à l’attaque! Elle a été excellente. La fameuse ligne défensive d’Edmonton a été complètement menottée. Les noms de Marcus Howard, Odell Willis et Ted Laurent ont été à peine mentionnés pendant la rencontre.
L’attaque en a profité et elle a pris son envol tôt. Les Alouettes ont marqué 47 points, un sommet cette année pour l’équipe de Jim Popp.
On ne peut pas répondre tout de suite à la grande question existentielle chez les Alouettes à savoir si Neiswander est le futur remplaçant d’Anthony Calvillo. Par contre, ce qui est encourageant dans son cas, parce qu’on se concentre sur le présent, c’est qu’on voit une amélioration et une progression. Le jeune me semble solide entre les deux oreilles.
Souvenez-vous de son cheminement. Quand il a eu son premier départ contre les Lions à Montréal, on lui a donné la chance d’effectuer trois passes seulement. Il en a complété une pour trois verges et il a été intercepté une fois (1 en 3 pour 3 verges de gains). On l’a sorti du match immédiatement. Tanner Marsh est arrivé et celui-ci a réalisé des miracles. Les Alouettes ont gagné et il est devenu le partant. Quand Marsh s’est blessé à Vancouver, Neiswander a lancé deux passes de touché et deux interceptions.
Depuis qu’il est redevenu le quart partant lors des trois dernières rencontres, ce que je retiens c’est qu’il a sept passes de touché contre une seule interception. Il complète 64 % de ses passes. C’est non négligeable. Avant de parler du futur remplaçant de Calvillo, je suis content de voir une progression et une amélioration chez Neiswander. C’est là-dessus qu’il faut se concentrer du côté des Alouettes.
J’ai aussi bien apprécié le travail de Tyrell Sutton. J’ai trouvé qu’on avait une bonne combinaison de porteurs de ballon avec Sutton et Jerome Messam. On a revu un peu ce que j’appelais avec Messam et Whitaker « le tonnerre et l’éclair ». Bien que Sutton soit plus du style de Whitaker, il a tout de même un petit côté physique que je ne déteste pas. Je l’ai vu aller chercher des verges après le contact et briser des plaqués. Il a eu neuf courses pour 63 verges.
On a donc vu Messam avoir plus de succès, Neiswander courir et Sutton obtenir de bons gains. Si tout le monde peut contribuer, cela rendra l’attaque plus difficile à arrêter.
Un répit pour l'unité défensive
Du côté de la défense, finalement, celle-ci a eu la chance de relaxer un petit peu et de s’amuser. Elle n’a pas été « sur le gros nerf » pendant tout le match parce qu’elle ne pouvait pas se permettre de faire une erreur en raison du peu de production de l’attaque.
L’unité défensive a finalement eu un coussin. Elle a profité du fait que l’attaque adverse était unidimensionnelle puisqu’elle jouait du football de rattrapage. Elle a provoqué sept revirements, dont cinq interceptions. On a sorti du match le quart partant, Mike Reilly. On s’est amusé aux dépens du quart réserviste, Jonathan Crompton.
On avait des couvertures serrées. J’imagine que du côté des Alouettes, on se doutait que les Eskimos n’allaient pas utiliser des jeux qui prenaient beaucoup de temps à se développer étant donné que Reilly revenait d’une commotion cérébrale. J’imagine qu’on devait se dire qu’il allait dégainer rapidement pour qu’il ne se fasse pas frapper.
Bref, on était dans les souliers des receveurs de passe et on a intercepté beaucoup de ballons.
Néanmoins, on pourrait parler d’un petit relâchement de l’équipe parce qu’elle menait 40-3 au début du quatrième quart et que le match s’est terminé 47-24. Les entraîneurs pourraient dire qu’il faut finir en force et qu’il faut jouer 60 minutes. Ils auraient totalement raison.
En même temps, c’est la nature humaine et le sentiment d’urgence n’était plus là. Personne n’a fait exprès, mais je me dis que ce n’est peut-être pas mauvais en soi ce petit relâchement général. Cela va permettre aux entraîneurs de continuer à diriger. Avec la fin de match, les joueurs ne pourront pas faire autrement que d’être réceptifs aux messages qu’on leur donnera cette semaine.
Les entraîneurs auront un travail psychologique à faire cette semaine puisque les Alouettes affrontent les Blue Bombers lundi prochain, eux qui ont une fiche de deux victoires et douze défaites. Il ne faut pas manquer de respect envers Winnipeg et croire que la victoire est dans la poche.
Si les Alouettes avaient gagné 50-0, ce serait beaucoup plus difficile pour les entraîneurs de garder les joueurs sur terre et de leur dire qu’ils ont fait des erreurs. Mais avec la fin de match, ce sera plus facile d’apporter des correctifs et de passer des messages.
Il ne faut surtout pas manquer de respect envers les Blue Bombers, mais il faut encore moins penser au prochain match contre Hamilton avant de régler le cas de Winnipeg. Les Alouettes disputeront deux rencontres contre les Tiger-Cats et on sait que ce sera des affrontements très importants pour le classement final.
En terminant, il y en a peut-être qui dégraderont la performance des Alouettes en affirmant qu’ils affrontaient les Eskimos d’Edmonton. Je répéterai ce que je dis depuis les 12 dernières années. Il n’y a pas un joueur qui devrait avoir à s’excuser pour une victoire.
Tu affrontes la formation qui se présente sur le terrain et tu fais ce que tu as à faire. En fin de compte, les Alouettes avaient une mission. C’était d’aller à Edmonton et de gagner le match. Ils sont allés sur la route et l’ont emporté de façon convaincante. Ils sont allés chercher une deuxième victoire consécutive et ils ont gagné en confiance.
Les Alouettes ont suivi leur plan de match et ils ne sont pas responsables des problèmes des Eskimos.
*Propos recueillis par Christian L-Dufresne