Le conte de fées s’est poursuivi avec une recette gagnante, cette fois contre les Eskimos d’Edmonton. La défense tient le fort alors que l’attaque est équilibrée et protège le ballon. L’équipe sort des blocs en force et termine avec  le pied sur l’accélérateur. Les plus récents succès ne sont pas étrangers à cette formule.

Force est d’avouer que Vernon Adams fils fait le travail au poste de quart. Il y a plusieurs statistiques à sa fiche qui ne sont pas les plus impressionnantes, mais celle qui compte le plus est tout à son avantage, soit celle concernant les victoires et les défaites.

Le quart des Alouettes en était à un huitième départ et il présente un dossier de six victoires contre deux revers. Il était d’ailleurs le dernier quart de la formation montréalaise à avoir aligné trois gains de suite, lors de son premier tour de piste avec l’équipe en 2016.

Avec les multiples déboires et changements au sein de l’équipe, le premier tiers du calendrier des Alouettes cette saison ne laissait présager rien de bon. L’équipe affrontait en deux occasions les Eskimos qui sont une bonne équipe, deux duels contre les Tiger-Cats de Hamilton, qui sont parmi les favoris dans l’Est, et aussi deux matchs devant le Rouge et Noir d’Ottawa qui a donné des difficultés aux Alouettes par le passé.

Il était difficile d’entrevoir une fiche positive et c’est ce qui se produit à l’aube de cette semaine de congé alors que l’équipe présente un dossier de 3-2 pour le deuxième rang dans l’Est.

Ce qui me fait le plus plaisir par contre avec ce dossier, ce sont les deux victoires contre aucun revers à domicile. À une certaine époque, Montréal était un cimetière pour les équipes adverses dans ce sens où elle savait que le match allait être difficile et elle ressentait que la défaite était proche. Les équipes arrivaient à reculons, mais depuis plusieurs années ce n’était plus cet état d’esprit qui les habitait. 

On ne va pas s’emporter après deux matchs devant ses partisans, mais au football, si tu prends soin de tes matchs à la maison et que tu joues pour à peu près .500 sur la route, il y a de fortes chances que la fiche soit appréciable au terme du calendrier et que les séries soient au rendez-vous. Il est encore tôt, mais après toutes les séquences difficiles, il faut prendre le temps de souligner une passe positive de la sorte.

Une formule qui fait ses preuves

Cette troisième victoire de suite a d’ailleurs été à l’image des deux précédentes alors que le début de match a été à la hauteur.

Pour un cinquième match consécutif, la défense a provoqué un revirement au premier quart. Elle sème ainsi un doute dans la tête de l’adversaire. L’unité défensive a arrêté les Eskimos sur un troisième essai et il y a eu l’interception de Greg Reid.

La défense a ainsi permis à l’attaque de prendre son élan. L’unité offensive a répliqué après le premier revirement avec le jeu truqué pour le touché de Vernon Adams avec la passe de Eugene Lewis.

Ce qu’il y a d’intéressant dans ce jeu, c’est que les Alouettes l’ont uniquement pratiqué cette semaine à l’entraînement, mais ils l’ont véritablement préparé depuis plusieurs semaines. La nuance est que la formation employée avec trois porteurs de ballon, on l’a vu à maintes reprises au cours des derniers matchs des Alouettes. La grande majorité du temps, William Stanback effectuait alors une course. Les autres équipes l’ont ainsi étudié sur les bandes vidéos, mais ils sont tombés dans le panneau.

Sur un premier essai et 10 verges à une vingtaine de verges de la porte des buts, tout indiquait un jeu au sol. C’est sur un jeu de la sorte que l’on peut entrevoir l’impact de Stanback. Même s'il ne touche pas au ballon, il est une menace. Il permet de sortir la fumée et les miroirs, car les équipes adverses n’ont d’autres choix que de respecter sa présence dans le champ-arrière.

Stanback a eu une telle influence sur deux touchés. Il y a comme je viens de le mentionner le jeu truqué à Adams, mais aussi sur la passe de touché à Jake Wieneke alors qu’il y avait eu une feinte de remise avant le majeur. Il n’a peut-être qu’amassé 47 verges au sol, mais il a fait sentir sa présence.

De son côté, Adams est béni présentement parce qu’il a signé trois victoires de suite, il réalise de belles passes en mouvement (c’est à ce moment qu’il paraît à son meilleur), mais il est surtout béni, car il évite des interceptions. À Hamilton, il avait lancé trois passes dans les zones profondes qui auraient pu être interceptées, mais il a obtenu des pénalités de l’équipe adverse pour obstruction. Devant le Rouge et Noir, il aurait facilement dû être intercepté à trois occasions et devant les Eskimos, il a été intercepté deux fois, mais elles ont été annulées en raison de pénalité pour Edmonton.

Lorsque tu dis tout fonctionne chez les Alouettes, Adams en est le parfait exemple.

Même si en général, les statistiques ne sont pas éclatantes à l’attaque, la distribution et l’équilibre rendent la prestation encourageante. Quatre porteurs ont été employés pour des gains de 132 verges. Un total de sept joueurs ont reçu le ballon en tant que receveur au cours de la rencontre. Cet aspect était important avec l’absence de DeVier Posey et B.J. Cunningham dans le groupe de receveurs.

C’est complexe pour les autres équipes de figurer qui touchera le ballon. De plus, tout le monde a le sourire, car il se sent impliqué dans le plan de match. Un receveur qui ne se sent pas regardé alors qu’il effectue 60 tracés dans une rencontre pourrait trouver le temps long. Quan Bray continue de s’offrir comme une ressource indispensable et il force la main de son entraîneur pour le garder impliquer dans le match.

Pour l’instant, Khari Jones a la main heureuse avec sa sélection de jeux. Ce qui l’aide à avoir un équilibre entre le jeu au sol et aérien, c’est son unité défensive qui lui offre cette opportunité.

Tout tombe en place en défense

Cette unité a complètement menotté l’attaque des Eskimos. C’était la première fois que je voyais Trevor Harris aussi frustré et hésitant.

C’est un quart-arrière de rythme qui n’aime pas garder le ballon longtemps entre ses mains. La pression se rend difficilement à lui, car il dégaine rapidement. Il faut donc lui enlever sa première lecture.

C’est pourquoi j’ai bien apprécié les commentaires d’après-match de John Bowman alors qu’il a félicité le travail des secondeurs et des demi-défensifs pour avoir enlevé cette première option à Harris. S’il demeure dans sa pochette, il devient nerveux et c’est ce qui s’est produit.

Les Eskimos n’ont pas été en mesure de signer de gros jeux et lorsque le ballon atteignait les receveurs, les plaqués étaient solides et instantanés. La défense a donné tout un spectacle et elle bâtit de très belles fondations.

On sent que la chimie s’installe et qu’il y a une belle cohésion au sein du groupe. Tout ce que les Eskimos ont gagné sur le terrain, ils l’ont chèrement gagné. Il n’y avait rien de gratuit et c’est exigeant pour une attaque une telle opposition.

Preuve que la tâche du quart des Eskimos a été compliquée, il a été victime de ses deux premières interceptions de la saison. C’est peut-être difficile de l’atteindre physiquement, mais sur le plan psychologique, Harris a été dérangé. Il n’a encaissé aucun sac du quart, mais il n’était pas à l’aise dans sa pochette. La pression l’a tout de même rendu nerveux.

Pour illustrer à quel point la défense des Alouettes a été dominante et a progressé, je vous rappelle que lors du premier duel entre les deux formations cette saison, les Eskimos avaient enregistré 608 verges en attaque. Ils ont été limités à 320 samedi soir. Les Eskimos ont uniquement converti huit de leurs 24 deuxièmes essais pour poursuivre leur séquence.

C’était aussi le jour et la nuit pour le porteur de ballon C.J. Gable. Lors du premier affrontement, il avait amassé 154 verges, mais il n’en a obtenu que 33 cette fois. Greg Ellingson, qui est habituellement utilisé à outrance n’a que trois réceptions pour 28 verges.

Lorsque tu t’apprêtes à jouer contre les Eskimos, tu as une liste de rêve. Celle-ci vient comme suit : tu mets de la pression sur Harris, tu arrêts C.J. Gable et enlève Greg Ellingson de l’équation. C’est exactement ce qui s’est produit.

Lorsque je parle de football complémentaire, c’est exactement ça, car le jeu au sol, bien que non productif par moment, est toujours demeuré dans le plan de match. L’équipe ne tirait de pas de l’arrière, donc n’avait aucune raison de se tourner à outrance vers le bras de Vernon Adams. Au final, Jones a sélectionné 23 passes contre 27 courses ce qui explique encore une fois le résultat final.

Les Alouettes s’en vont donc en semaine de congé dans un parfait état d’esprit avec cette victoire. Les partisans ont connu une autre belle soirée malgré les menaces d’orage, ils sont revenus pour la fin.

Une manière de garder la foule impliquée est de répliquer dès que l’adversaire frappe et l’attaque a encore une fois réussi le coup devant Edmonton.

Ça fait longtemps que les Alouettes n’ont pas créé un petit buzz de la sorte et avec tous les efforts qui sont déployés par les joueurs et le groupe d’entraîneurs, c’est mérité. Ils veulent que les résultats soient au rendez-vous pour les partisans et la présente série de succès découle de tout ce travail.

*Propos recueillis par Maxime Tousignant