On a droit à un phénomène assez particulier cette année dans la Ligue canadienne. Croyez-le ou non, c'est la première fois depuis 1950 que le carré d'as du format éliminatoire est composé de quatre équipes qui n'y étaient pas la saison précédente.

La saison dernière, les Alouettes et les Argonauts de Toronto avaient croisé le fer en finale de l'Est alors que les Roughriders de la Saskatchewan avaient disputé la victoire aux Stampeders de Calgary en finale de l'Ouest. Cette année, ce sont les quatre autres formations du circuit qui peuvent toujours aspirer aux grands honneurs.

Dans une ligue à huit équipes, il faut admettre que cette situation n'est pas banale!

Les deux matchs de la fin de semaine seront diffusés sur les ondes de RDS. Analysons tout d'abord le premier affrontement à l'horaire, celui qui opposera les Tiger-Cats aux Blue Bombers.

Les deux équipes se sont rencontrées trois fois en saison régulière et à chaque occasion, les Bombers ont eu le dernier mot. On se retrouve donc face à deux écoles de pensée. D'un côté, il y a ceux qui suivent le courant, qui croient que les Bombers ont le numéro des Ti-Cats et qu'ils complèteront assez facilement la passe de quatre. Il y en aura toutefois pour dire que Hamilton est dû pour en gagner une!

Les Tiger-Cats n'ont qu'à reculer de quelques mois dans leur histoire pour prendre position dans ce débat. L'an passé, ils avaient battu les Argonauts de Toronto trois fois en saison régulière, mais avaient été éliminés par les représentants de la Ville Reine en demi-finale de l'Est. Ils savent donc que leur prochaine mission est réalisable puisqu'ils se sont fait faire le coup pas plus tard que l'année dernière.

Ça va peut-être vous paraître loufoque, mais je crois que le jeu le plus important dans ce match pourrait être... le tirage au sort. À Winnipeg, les conditions météorologiques risquent d'être froides et venteuses et le traditionnel lancer de la pièce de monnaie risque de déterminer l'équipe qui attaquera avec le vent dans le dos au quatrième quart. Alors avant même que la rencontre ne débute, les capitaines des Ti-Cats - l'équipe visiteuse a toujours le privilège de choisir « pile » ou « face » - feront face à une grosse décision!

Je ne rigole pas quand j'insiste sur l'importance de ce pari avec le hasard. La débandade des Alouettes, qui s'est terminée dimanche dernier au Stade olympique, avait en fait commencé au quatrième quart de leur 16e match de l'année, à Winnipeg. Montréal menait par 15 points, mais avait échappé son avance au quatrième quart alors que l'attaque des Bombers avait le vent dans le dos.

C'est donc réellement un élément qu'il faudra surveiller. Quand vous prenez possession du ballon avec le vent dans le dos, vous voulez en profiter pour marquer le plus de points possible. Quand vous prenez possession du ballon confronté au vent, vous voulez contrôler l'horloge pour limiter le temps d'action de l'adversaire alors que les conditions sont à son avantage.

Il y a aussi la dynamique des revirements. Le froid et la pluie, c'est dérangeant, mais les joueurs de football vous diront tous que leur pire ennemi, c'est le vent. Et à Winnipeg, le vent prend son élan depuis les Rocheuses! Alors tous ceux qui sont appelés à toucher au ballon, du quart-arrière aux demis offensifs aux receveurs de passes, devront être vigilants.

Forts de leur victoire contre les Alouettes, les Tiger-Cats fouleront le terrain gonflés à bloc, le réservoir de confiance rempli jusqu'au bouchon. Marquer 52 points à Montréal, c'est assez pour semer un petit doute dans la tête de ton prochain adversaire. Par contre, le prochain défi des Tiger-Cats, c'est d'éviter de tomber dans la complaisance en pensant qu'ils ne leur reste plus rien à accomplir. Il n'est pas rare de voir, dans le monde du sport, une équipe offrir une contre-performance après une grosse victoire émotive. C'est un piège que les visiteurs devront éviter.

Les Ti-Cats réaliseront aussi assez rapidement que la défensive des Blue Bombers est un peu plus solide que celle des Alouettes. C'est elle qui a terminé la saison avec le plus de sacs du quart (55) et qui a réussi le plus d'interceptions (25) dans la LCF. Elle a aussi terminé au troisième rang contre le jeu au sol. Hamilton a profité de belles courses d'Avon Cobourne et Marcus Thigpen la semaine dernière, mais ça risque d'être plus difficile dimanche.

En trois matchs cette saison contre Winnipeg, les quarts-arrières de Hamilton ont été victimes de six interceptions. Kevin Glenn, qui sera le partant pour la demi-finale de l'Est, en a commis cinq à lui seul, comparativement à seulement trois passes de touché. Vous savez l'erreur majeure qu'on s'attendait à ce que Glenn commette contre les Alouettes, mais qui n'est jamais venue? Eh bien contre Winnipeg en saison régulière, il en a faite une à chacun des matchs.

Du côté des Bombers, j'admire le courage de Buck Pierce, qui sera le quart partant de l'équipe alors qu'il se remet d'une entorse à un genou. Mais j'ai quand même un petit message à l'intention de Buck : n'essaie pas de trop en faire. Le jeu sur lequel il s'est blessé contre les Argonauts n'avait pas sa raison d'être. Il est allé à Vegas une fois de trop et il s'est fait plumer. C'est à souhaiter qu'il en a tiré une leçon. Il doit jouer à l'intérieur de ses moyens sans se laisser tenter de forcer l'action.

C'est pour cette raison que pour moi, le joueur clé pour Winnipeg, c'est le porteur de ballon Chris Garrett, qui est tout simplement spectaculaire depuis qu'il a remplacé Fred Reid. En 92 courses, Garrett a amassé 576 verges, une moyenne de 6,3 verges par portée. Ultra dynamique, il n'a pas le gabarit le plus imposant, mais il frappe fort, il joue gros. J'aime beaucoup sa fougue et son attitude. Et si jamais les conditions sont difficiles, il sera appelé à jouer un rôle important dans le plan de match offensif des siens.

La défensive des Tiger-Cats s'est classée septième contre le jeu au sol cette année. Quand elle a dû stopper Garrett, elle lui a concédé 131 verges sur 18 courses dans un match au cours duquel elle avait accordé un total de 177 verges au sol aux Bombers. Je pense que c'est la clé pour l'attaque de Winnipeg, puisque Pierce ne compte pas sur un groupe de receveurs dominant.

Sachant que leur destin repose en grande partie sur leur attaque au sol, il sera primordial pour les Bombers de s'inscrire à la marque tôt dans le match et d'éviter de jouer du football de rattrapage. À leurs deux derniers matchs, alors qu'ils avaient leur destin en mains, ils ont accusé un retard de 24-0 contre Calgary et 24-3 contre Toronto. Inutile de vous dire que ces matchs se sont soldés par des défaites. Les Bombers n'ont pas l'attaque explosive qui permet de combler des déficits aussi importants.

Autre point à surveiller : la bataille des gros jeux. Personnellement, je ne crois pas que l'attaque des Ti-Cats et celle des Bombers soient équipées pour traverser méthodiquement des terrains de 90 ou 100 verges. L'équipe qui parviendra à améliorer son positionnement sur le terrain avec des revirements opportuns ou des gros retours de bottés pourrait fort bien ressortir du Canad Inns Stadium avec son billet pour le match de la coupe Grey.

Les Tiger-Cats ont marqué 52 points contre les Alouettes, mais cinq fois ils ont pris possession du ballon dans le territoire adverse. Donnez-moi un demi-terrain à parcourir et j'aime mes chances d'aller porter le ballon dans la zone des buts. Sachez aussi que les Bombers ont fait appel à leur botteur de dégagement 143 fois cette saison, plus que toute autre équipe dans la ligue. Ça veut dire que Thigpen et Chris Williams devraient avoir plusieurs occasions de faire la différence.

En 2001, les Tiger-Cats avaient éliminé les Alouettes en finale de l'Est pour avoir la chance d'affronter les Blue Bombers à Winnipeg. Les locaux l'avaient emporté et Hamilton a dû attendre dix ans avant de gagner un autre match éliminatoire.

Le scénario se répètera-t-il cette année? On dit que les championnats se gagnent avec une bonne défensive. C'est exactement pourquoi les Alouettes sont en vacances présentement et c'est exactement pourquoi, selon moi, les Bombers auront raison des Tiger-Cats en fin de semaine.

Les Lions sont retournés aux sources

Quand on parle d'une progression spectaculaire, il ne se fait pas mieux que celle réalisée par les Lions de la Colombie-Britannique cette année.

Les Lions ont débuté leur calendrier avec une défaite de 30-26 contre les Alouettes, la première d'une séquence de cinq défaites. Ils ont par la suite gagné dix de leurs onze matchs suivants, bouclant la saison contre ces mêmes Alouettes avec une victoire de 43-1. L'amélioration est indéniable!

Les Lions ont remporté trois de leurs quatre matchs contre les Eskimos en saison régulière, leur seule défaite survenant au cœur de leur faux-départ estival. Ils ont été pratiquement imbattables dans les derniers mois de la campagne et leur seule ombre au tableau, une défaite de 42-10 contre Hamilton lors de la semaine numéro 16, a semblé les fouetter pour la fin de la saison.

Aucun doute, il n'y a pas une équipe qui rentre dans les finales avec plus de momentum que les Lions. Ils sont en feu, tout leur sourit et selon moi, l'explication réside dans une vieille recette de laquelle ils s'étaient éloignés et avec laquelle ils ont renoué juste à temps : le succès dans la guerre des tranchées.

La ligne défensive des Lions est incroyable. Elle est composée de véritables brutes qui allient robustesse, agilité et intimidation de façon spectaculaire. Et à l'attaque, on a retrouvé la formule gagnante grâce au brio de deux excellents bloqueurs, Ben Archibald - le joueur de ligne par excellence l'an dernier dans la LCF - et son collègue Jovan Olafioye, qui est nomination avec Josh Bourke cette année.

Les Lions se sont donc vraiment ressaisis dans les tranchées, une facette du jeu qui a été leur marque de commerce pendant longtemps. C'est là que tout commence et c'est à partir de cette fondation que tu peux construire tout le reste. La ligne défensive arrête le jeu au sol et met beaucoup de pression sur les quarts adverses avec seulement quatre joueurs, ce qui permet aux entraîneurs d'oser et d'innover en couverture.

La ligne à l'attaque, elle, est celle qui a accordé le moins de sacs à travers le circuit. En fait, elle a été si efficace que Travis Lulay est aujourd'hui en nomination pour le titre de joueur par excellence du circuit en compagnie d'Anthony Calvillo.

C'est toute une saison que vient de connaître Lulay. Au début de l'année, les critiques étaient virulentes à son endroit, des reproches auxquels n'ont pas échappé le coordonnateur offensif Jacques Chapdelaine et l'entraîneur chef Wally Buono. Mais il a réussi à redresser la barque. C'est un quart-arrière qui peut être dangereux avec son bras autant qu'avec ses jambes et qui se sert de tous les outils mis à sa disposition.

La preuve : dans les trois victoires contre les Eskimos, c'est un joueur différent qui s'est levé pour faire la différence. La première fois, on avait vu neuf sacs du quart et le Arland Bruce Show (9 attrapés, 129 verges, deux touchés). Dans la deuxième, c'est Andrew Harris (5 attrapés, 115 verges, deux touchés) qui avait volé la vedette. Puis dans la troisième, Lulay avait lancé pour 322 verges avec trois passes de touché.

Bref, c'est une équipe qui peut vous battre avec plusieurs joueurs différents.

Il s'agira seulement d'un deuxième départ en éliminatoires pour Lulay. L'an passé, contre les Roughriders, il avait complété 58% de ses passes avec deux touchés et deux interceptions. Ça avait été un festival offensif, alors ce serait injuste de lui faire porter le blâme pour la défaite de son équipe à l'époque.

De l'autre côté, on retrouve Ricky Ray, un vétéran qui incarne le calme et le parfait contrôle des émotions. Ray a une fiche de 8-3 avec dix passes de touchés et seulement trois interceptions en éliminatoires. Il a gagné une coupe Grey, il a joué dans plusieurs gros matchs. Il ne faut pas négliger cet avantage qu'il a sur son jeune rival.

Et quand on parle des armes qu'il a à sa disposition, c'est tout simplement spectaculaire. Fred Stamps, Adarius Bowman, Jason Barnes... J'imagine que les demis défensifs des Lions se sont arrangés pour que les joueurs de ligne soient traités aux petits oignons toute la semaine, parce qu'ils seront leurs meilleurs amis en fin de semaine.

Par contre, chez les Eskimos, il faudra composer avec l'absence du porteur de ballon canadien Jerome Messam, qui amenait une diversité à leur attaque et une dynamique très physique dans leur jeu au sol. Messam sera remplacé par Calvin McCarthy et Hugh Charles, qui sont néanmoins très efficaces et peut-être même meilleur que lui dans certains aspects du jeu. C'est un changement forcé qui pourrait même, en bout de ligne, sourire aux Eskimos, qui sont soudainement moins prévisibles à cet égard.

Or, où le bât pourrait blesser chez les Eskimos, c'est au niveau de la protection du quart-arrière. L'entraîneur Kavis Reed insiste pour dire que ses remplaçants sont aussi efficaces que Messam dans cet aspect du jeu. Je veux bien le croire sur parole, mais quand je regarde l'alignement, je vois que Charles mesure 5 pieds 8 pouces et pèse 190 livres. On est loin des 6 pieds 3 pouces et 245 livres de Messam. Je suppose qu'on aura notre réponse quand le gros Solomon Elimimian prendra son élan pour rentrer sur un blitz...

S'ils veulent avoir une chance de l'emporter, les Eskimos ne peuvent revivre le même scénario qu'à leur dernière visite au BC Place, alors qu'ils s'étaient creusé un trou de 14 points en début de match. Leur première mission, ce sera de fermer les écoutilles, laisser passer la tempête et s'arranger pour que le pointage soit égal après le premier quart.

La finale de l'Ouest met aux prises les deux meilleures défensives de la LCF. Il n'y a donc pas grand-chose qui sépare ces deux équipes, mais c'est difficile présentement de parier contre les Lions. Ils ont le vent dans les voiles et profiteront de conditions idéales devant leurs partisans.

Comme dans l'Est, je vois l'équipe avec la meilleure défensive avoir le dernier mot et je prédis une coupe Grey entre les Blue Bombers et les Lions.

Semaine XI dans la NFL

Je vous laisse avec d'autres prédictions, celles en vue de la onzième semaine d'activité dans la NFL.

NY Jets c. Denver
Oakland c. Minnesota
Buffalo c. Miami
Cincinnati c. Baltimore
Jacksonville c. Cleveland
Dallas c. Washington
Tampa Bay c. Green Bay
Caroline c. Detroit
Arizona c. San Francisco
Seattle c. St. Louis
San Diego c. Chicago
Tennessee c. Atlanta
Philadelphie c. NY Giants
Kansas City c. Nouvelle-Angleterre

Résultats de la semaine XI : 11 gains, 3 revers (78,6%)

Résultats après 11 semaines : 108 gains, 64 revers (62,8%)


Propos recueillis par Nicolas Landry.