La deuxième dimension des Cardinals
Football jeudi, 29 janv. 2009. 20:13 dimanche, 15 déc. 2024. 13:44
Il faut parfois creuser profondément pour trouver de l'or. À première vue, une défaite de 47-7 représente une énorme tache à un dossier, une humiliation qu'on préfère oublier. Mais c'est peut-être la meilleure chose qui pouvait arriver aux Cardinals de l'Arizona, qui ont subi cet affront le 21 décembre contre les Patriots de la Nouvelle-Angleterre.
En effet, cette claque au visage encaissée à quelques jours de Noël a permis aux Cardinals de retrouver leur attaque au sol.
Hors de lui, l'entraîneur des Cardinals, Ken Whisenhunt, a commencé à tenir des entraînements beaucoup plus intenses. Son message était clair : ça passe ou ça casse. Il a brassé ses troupiers, changé leurs habitudes de travail pour effacer leurs mauvais plis. Il faut croire que l'équipe a bien réagi.
Ça n'explique pas tout, mais c'est certainement l'une des raisons qui expliquent la présence des Cards au Super Bowl.
On ne se contera pas d'histoires, la force et l'identité des Cards demeurent le jeu aérien avec Kurt Warner et ses receveurs. Mais on dirait que Whisenhunt a compris qu'avec le jeu au sol, ce n'est pas tant le nombre de verges gagnées qui importe que le nombre de courses que tu effectues. C'est ça qui fait en sorte que l'adversaire respecte la menace et joue de façon honnête.
Quand on regarde les chiffres, c'est assez probant. En saison régulière, les Cards ont effectué 630 passes contre seulement 340 courses (le plus petit nombre, d'ailleurs, de toute la NFL), un ratio de 65:35, et n'ont gagné que 73 verges par match au sol. En éliminatoires, Warner a décoché 92 passes et remis le ballon 100 fois à ses porteurs. Le jeu au sol a donc constitué 52% de l'attaque des Cards, qui ont amassé 111 verges par rencontre de cette façon.
Efficace, donc, ce changement de philosophie? Je crois que les résultats parlent d'eux-mêmes.
Et ce n'est pas fini! Ce nouvel engagement envers le jeu au sol a eu des répercussions sur d'autres facettes du jeu des Cards. Vous voyez, quand vous prenez la décision de mettre plus d'accent sur le jeu au sol, eh bien vous le pratiquez davantage. Il n'y a alors pas que l'attaque qui s'améliore, votre front défensif prend du galon. Ce n'est quand même pas un hasard si les Cards ont excellé pour contrer le jeu au sol en éliminatoires.
Les Cards peuvent remercier leur entraîneur pour avoir serré la vis. Quand tu te prépares à affronter un rouleau-compresseur comme les Steelers, tu sais que les chances que tu en manges une sincère pendant toute la rencontre sont assez élevées. Dans ce temps-là, aussi bien être prêt à payer le prix et les Cards version 2.0, grâce à cette décision de leur entraîneur à quelques jours de Noël, le sont, prêts.
Le chat et la souris
Ceci étant dit, les Cards pourraient facilement baisser les bras devant la tâche qui les attend. Après tout, malgré toutes les bonnes choses qu'ils ont accomplies dernièrement, ils se préparent à affronter la grosse machine des Steelers.
S'ils veulent se consoler, les Cards n'ont qu'à faire leurs devoirs et ils s'apercevront que personne n'a été en mesure de courir contre Pittsburgh cette année. Donc si ça foire, il ne faut pas le prendre personnel! Mais plus sérieusement, c'est là que réside la clé : les Cards devront être patients même s'ils ont l'impression d'envoyer leurs porteurs sur un mur de briques. Il ne faut pas qu'ils tombent dans le piège d'insister avec la passe et de se retrouver devant des troisièmes essais et long.
J'ai hâte d'observer la stratégie qu'utiliseront les Cards. L'œil attentif pourrait assister à une belle partie d'échec lors de ce Super Bowl.
En effet, il a été démontré qu'en utilisant une formation à trois ou quatre receveurs de passes, il était possible de connaître un succès relatif au sol contre les Steelers. C'est qu'en vendant l'idée d'un jeu de passe, on incite les Steelers à sortir du terrain le plaqueur Casey Hampton et le secondeur intérieur James Farrior, qui excellent contre la course, pour les remplacer par Lawrence Timmons et Deshea Townsend. Et c'est là que ça devient intéressant.
C'est peut-être un petit jeu auquel les Cards décideront de jouer. Quand le mur formé par Hampton et Farrior sera sur le terrain, ce sera la passe. Quand ces deux piliers seront sur les lignes de côté, ce sera la course.
Une ligne bien soudée
Avec tout ça, je n'ai pas encore parlé de la ligne à l'attaque des Cardinals, qui n'a accordé que trois sacs du quart depuis le début des éliminatoires et seulement 28 lors du calendrier régulier. On parle d'ici d'une équipe qui a tenté 630 passes en saison régulière!
Ce qui fait le succès de ce groupe, c'est que les cinq joueurs qui le composent n'ont jamais été séparés dans les 19 matchs de l'équipe. Ce n'est pas un secret : sur la ligne à l'attaque, il faut du talent, oui, mais ça prend surtout de la continuité et de la cohésion.
Pour le réveil du jeu au sol aussi, il faudrait peut-être donner un peu de crédit à la ligne offensive des Cards.
Verra-t-on les Steelers de BLITZburgh?
J'ai déjà fait l'éloge de Kurt Warner et de sa capacité à lire les intentions de l'adversaire. Le vétéran a été exceptionnel à cet égard contre les Eagles, qui ont blitzé sans retenue dans l'espoir de le perturber. Doit-il s'attendre à un tel traitement contre Pittsburgh?
C'est sûr que les Steelers, comme les Eagles, sont reconnus comme des blitzeurs féroces, mais n'en reste pas moins que la façon de faire des deux équipes diffèrent en plusieurs points. À Philadelphie, on met le quart sous pression en créant des surnombres. Vous avez six bloqueurs? On va envoyer sept joueurs sur le quart. À Pittsburgh, on ne demande qu'à quatre, parfois cinq joueurs d'appliquer de la pression, mais ce n'est jamais les mêmes et pendant que ceux-ci sèment le chaos dans les tranchées, on continue à jouer une défensive de zone juste derrière.
Faites connaissance avec le zone blitz, une stratégie qui a le même effet qu'un blitz régulier, mais avec la sécurité d'une défensive de zone dans la tertiaire.
Pas évident d'expliquer clairement en quoi consiste le zone blitz. Dans le fond, c'est une stratégie où on demande aux joueurs en défensive d'inverser les rôles. Soudainement, les gars qui sont généralement appelés à mettre de la pression sur le quart reculent en couverture et vice versa. L'effet recherché : créer des confrontations favorables contre les bloqueurs adverses. On se retrouvera alors avec un ailier défensif devant un porteur de ballon ou un ailier rapproché tandis que les gros joueurs de ligne devront contenir les rapides demis défensifs.
Le zone blitz est la marque de commerce de Dick LeBeau, le coordonnateur de la défensive des Steelers, mais je ne suis pas si certain qu'on va foncer tête première sur Kurt Warner. Je me souviens qu'au Super Bowl XXL, contre l'attaque West Coast des Seahawks de Seattle, les Steelers avaient commencé le match en appliquant de la pression sans réserve, mais avait finalement viré leur capot de bord devant le manque d'efficacité de la tactique.
Après la rencontre, LeBeau avait raconté que le ballon sortait tellement vite de la main de Matt Hasselbeck que c'était du véritable gaspillage que d'envoyer des gars à sa poursuite. Même s'ils n'étaient pas bloqués, ils n'avaient même pas le temps de se rendre au quart avant que la passe n'ait été décochée.
Les entraîneurs tirent parfois des leçons du passé pour ne pas répéter les mêmes erreurs. Selon moi, il ne faudrait pas s'étonner de voir les Steelers démontrer beaucoup plus de réserve que ce à quoi ils nous ont habitués.
*Propos recueillis par Nicolas Landry.
En effet, cette claque au visage encaissée à quelques jours de Noël a permis aux Cardinals de retrouver leur attaque au sol.
Hors de lui, l'entraîneur des Cardinals, Ken Whisenhunt, a commencé à tenir des entraînements beaucoup plus intenses. Son message était clair : ça passe ou ça casse. Il a brassé ses troupiers, changé leurs habitudes de travail pour effacer leurs mauvais plis. Il faut croire que l'équipe a bien réagi.
Ça n'explique pas tout, mais c'est certainement l'une des raisons qui expliquent la présence des Cards au Super Bowl.
On ne se contera pas d'histoires, la force et l'identité des Cards demeurent le jeu aérien avec Kurt Warner et ses receveurs. Mais on dirait que Whisenhunt a compris qu'avec le jeu au sol, ce n'est pas tant le nombre de verges gagnées qui importe que le nombre de courses que tu effectues. C'est ça qui fait en sorte que l'adversaire respecte la menace et joue de façon honnête.
Quand on regarde les chiffres, c'est assez probant. En saison régulière, les Cards ont effectué 630 passes contre seulement 340 courses (le plus petit nombre, d'ailleurs, de toute la NFL), un ratio de 65:35, et n'ont gagné que 73 verges par match au sol. En éliminatoires, Warner a décoché 92 passes et remis le ballon 100 fois à ses porteurs. Le jeu au sol a donc constitué 52% de l'attaque des Cards, qui ont amassé 111 verges par rencontre de cette façon.
Efficace, donc, ce changement de philosophie? Je crois que les résultats parlent d'eux-mêmes.
Et ce n'est pas fini! Ce nouvel engagement envers le jeu au sol a eu des répercussions sur d'autres facettes du jeu des Cards. Vous voyez, quand vous prenez la décision de mettre plus d'accent sur le jeu au sol, eh bien vous le pratiquez davantage. Il n'y a alors pas que l'attaque qui s'améliore, votre front défensif prend du galon. Ce n'est quand même pas un hasard si les Cards ont excellé pour contrer le jeu au sol en éliminatoires.
Les Cards peuvent remercier leur entraîneur pour avoir serré la vis. Quand tu te prépares à affronter un rouleau-compresseur comme les Steelers, tu sais que les chances que tu en manges une sincère pendant toute la rencontre sont assez élevées. Dans ce temps-là, aussi bien être prêt à payer le prix et les Cards version 2.0, grâce à cette décision de leur entraîneur à quelques jours de Noël, le sont, prêts.
Le chat et la souris
Ceci étant dit, les Cards pourraient facilement baisser les bras devant la tâche qui les attend. Après tout, malgré toutes les bonnes choses qu'ils ont accomplies dernièrement, ils se préparent à affronter la grosse machine des Steelers.
S'ils veulent se consoler, les Cards n'ont qu'à faire leurs devoirs et ils s'apercevront que personne n'a été en mesure de courir contre Pittsburgh cette année. Donc si ça foire, il ne faut pas le prendre personnel! Mais plus sérieusement, c'est là que réside la clé : les Cards devront être patients même s'ils ont l'impression d'envoyer leurs porteurs sur un mur de briques. Il ne faut pas qu'ils tombent dans le piège d'insister avec la passe et de se retrouver devant des troisièmes essais et long.
J'ai hâte d'observer la stratégie qu'utiliseront les Cards. L'œil attentif pourrait assister à une belle partie d'échec lors de ce Super Bowl.
En effet, il a été démontré qu'en utilisant une formation à trois ou quatre receveurs de passes, il était possible de connaître un succès relatif au sol contre les Steelers. C'est qu'en vendant l'idée d'un jeu de passe, on incite les Steelers à sortir du terrain le plaqueur Casey Hampton et le secondeur intérieur James Farrior, qui excellent contre la course, pour les remplacer par Lawrence Timmons et Deshea Townsend. Et c'est là que ça devient intéressant.
C'est peut-être un petit jeu auquel les Cards décideront de jouer. Quand le mur formé par Hampton et Farrior sera sur le terrain, ce sera la passe. Quand ces deux piliers seront sur les lignes de côté, ce sera la course.
Une ligne bien soudée
Avec tout ça, je n'ai pas encore parlé de la ligne à l'attaque des Cardinals, qui n'a accordé que trois sacs du quart depuis le début des éliminatoires et seulement 28 lors du calendrier régulier. On parle d'ici d'une équipe qui a tenté 630 passes en saison régulière!
Ce qui fait le succès de ce groupe, c'est que les cinq joueurs qui le composent n'ont jamais été séparés dans les 19 matchs de l'équipe. Ce n'est pas un secret : sur la ligne à l'attaque, il faut du talent, oui, mais ça prend surtout de la continuité et de la cohésion.
Pour le réveil du jeu au sol aussi, il faudrait peut-être donner un peu de crédit à la ligne offensive des Cards.
Verra-t-on les Steelers de BLITZburgh?
J'ai déjà fait l'éloge de Kurt Warner et de sa capacité à lire les intentions de l'adversaire. Le vétéran a été exceptionnel à cet égard contre les Eagles, qui ont blitzé sans retenue dans l'espoir de le perturber. Doit-il s'attendre à un tel traitement contre Pittsburgh?
C'est sûr que les Steelers, comme les Eagles, sont reconnus comme des blitzeurs féroces, mais n'en reste pas moins que la façon de faire des deux équipes diffèrent en plusieurs points. À Philadelphie, on met le quart sous pression en créant des surnombres. Vous avez six bloqueurs? On va envoyer sept joueurs sur le quart. À Pittsburgh, on ne demande qu'à quatre, parfois cinq joueurs d'appliquer de la pression, mais ce n'est jamais les mêmes et pendant que ceux-ci sèment le chaos dans les tranchées, on continue à jouer une défensive de zone juste derrière.
Faites connaissance avec le zone blitz, une stratégie qui a le même effet qu'un blitz régulier, mais avec la sécurité d'une défensive de zone dans la tertiaire.
Pas évident d'expliquer clairement en quoi consiste le zone blitz. Dans le fond, c'est une stratégie où on demande aux joueurs en défensive d'inverser les rôles. Soudainement, les gars qui sont généralement appelés à mettre de la pression sur le quart reculent en couverture et vice versa. L'effet recherché : créer des confrontations favorables contre les bloqueurs adverses. On se retrouvera alors avec un ailier défensif devant un porteur de ballon ou un ailier rapproché tandis que les gros joueurs de ligne devront contenir les rapides demis défensifs.
Le zone blitz est la marque de commerce de Dick LeBeau, le coordonnateur de la défensive des Steelers, mais je ne suis pas si certain qu'on va foncer tête première sur Kurt Warner. Je me souviens qu'au Super Bowl XXL, contre l'attaque West Coast des Seahawks de Seattle, les Steelers avaient commencé le match en appliquant de la pression sans réserve, mais avait finalement viré leur capot de bord devant le manque d'efficacité de la tactique.
Après la rencontre, LeBeau avait raconté que le ballon sortait tellement vite de la main de Matt Hasselbeck que c'était du véritable gaspillage que d'envoyer des gars à sa poursuite. Même s'ils n'étaient pas bloqués, ils n'avaient même pas le temps de se rendre au quart avant que la passe n'ait été décochée.
Les entraîneurs tirent parfois des leçons du passé pour ne pas répéter les mêmes erreurs. Selon moi, il ne faudrait pas s'étonner de voir les Steelers démontrer beaucoup plus de réserve que ce à quoi ils nous ont habitués.
*Propos recueillis par Nicolas Landry.