Vous m'entendez souvent dire que les Alouettes devraient utiliser leur attaque au sol plus régulièrement, question d'avoir une attaque équilibrée et de permettre à la ligne offensive d'imposer un style plus robuste à l'adversaire.

Même si les Alouettes ont récolté 243 verges par la course dans le match contre Toronto, il ne faut pas croire que l'équipe va changer sa philosophie offensive. N'oublions pas que la structure défensive utilisée par les Argonauts invite l'adversaire à courir!

Les jeux au sol ont des effets bénéfiques pour toute l'équipe : une attaque moins prévisible, une meilleure protection pour le quart-arriere, la ligne retrouve le sourire et les receveurs peuvent frapper les demis défensifs au lieu de se faire plaquer.

De plus, puisque l'adversaire doit respecter la course, le jeu aérien devient encore plus facile à exécuter. Bref, cela a un effet rassembleur.

Même la défensive des Alouettes en est sortie gagnante puisqu'elle n'a passé que 22 minutes sur le terrain, résultat direct du jeu au sol qui a permis à l'attaque de contrôler le temps de possession.

Pour l'équipe adverse, c'est démoralisant! Il n'y a rien de pire que de se faire passer sur le corps, jeu après jeu ! Cela a carrément un effet de destruction sur l'esprit d'équipe. La frustration s'installe et la cohésion disparaît.

Grâce à leur excellent début de match et à leur jeu en puissance, les Alouettes ont montré aux Argonauts que la soirée allait être longue et ces derniers ont vite capitulé!

Une preuve?

Le meilleur exemple pour illustrer le fait que les Argos avaient lancé la serviette, c'est qu'ils n'ont jamais adapté leurs formations en défensive à celles que les Alouettes déployaient en attaque. Il n'y a qu'à observer le dernier touché de Robert Edwards pour le réaliser.

Sur le jeu, les Alouettes ont utilisé un seul receveur de passes, ils ont amené deux ailiers rapprochés et deux centres-arrières. Ça ne pouvait pas être écrit en plus gros caractères dans le ciel que Montréal allait courir avec le ballon, et malgré cela, les Argos n'ont rien fait. Pas de plaqueur supplémentaire, rien. Résultat : ils se sont fait traverser et Robert Edwards a pratiquement pu marcher jusque dans la zone des buts.

Dans mon livre à moi, c'est un signe évident de capitulation. Je trouve ça dommage pour les joueurs qui sont sur le terrain. J'ai d'ailleurs remarqué que les joueurs des Argonauts regardaient en direction du banc dans les instants précédant ce jeu et semblaient se questionner sur la stratégie utilisée par le coordonnateur de la défensive. Leurs regards auraient pu être traduits ainsi : « Vous nous envoyez à l'abattoir! Donnez-nous la chance de compétitionner! » On dirait plutôt que celui qui prenait les décisions sur les lignes de côté avait seulement hâte que ça se termine et de retourner à Toronto.

On a vu une équipe torontoise fragile jeudi. Les Alouettes ont connu un bon début de match et ont mis leurs adversaires dans les câbles rapidement. On voyait que les Argonauts n'avaient pas l'énergie ni la détermination pour sa battre pendant tout le match. Oui, il y avait toutes ces blessures. Non, Damon Allen n'était pas de la partie. Mais, à ce que je sache, Damon Allen ne joue pas en défensive.

Ces données mettent un certain bémol sur l'issue du match parce que ce n'est pas la vraie équipe de Toronto que nous avons vue, mais donnons quand même crédit aux Alouettes, qui eux ne peuvent faire autrement que de jouer contre l'équipe qu'on met devant eux.

Pièges à éviter

Même si les Alouettes fonçaient sur une proie en apparence facile, ils se devaient d'être prudents et d'éviter les quelques pièges qui étaient cachés sur leur chemin. Il peut être tentant pour une équipe dont la fiche est de 6-0 de prendre à la légère un adversaire décimé par les blessures. D'autant plus que les joueurs savaient qu'ils profiteraient de trois jours de congé après la rencontre. Il leur fallait rester concentrés et ne pas oublier qu'ils avaient d'abord un travail à faire.

Pour empêcher un relâchement, Don Matthews veillait au grain. Je suis allé voir les entraînements en semaine et je peux vous dire que malgré une fiche parfaite et même s'ils sont premiers dans plusieurs catégories de statistiques, les joueurs ont pratiqué comme des gars qui avaient encore des choses à prouver.

Malgré la chaleur intense, les entraînements n'ont pas été plus courts, ils ont même été plus longs. C'est la façon du coach de dire aux joueurs qu'il y a loin de la coupe aux lèvres.

Et les joueurs ont bien répondu. Ils jouaient contre une équipe affaiblie, mais ils ont été dominants et leur prestation a été convaincante. Oui, ils ont laissé des points sur le terrain et ont manqué d'opportunisme en certaines occasions dans la zone rouge, mais il faut souligner que les Alouettes sont la première équipe cette année à marquer plus de 30 points contre Toronto.

Les Argonauts ont une défensive qui plie, mais qui ne casse pas. Au moins, les Alouettes ont marqué des points chaque fois qu'ils sont entrés dans la zone critique. De la façon dont je vois ça, le verre est à moitié rempli, pas à moitié vide. On cherche toujours la perfection, mais elle n'existe pas.

Si près du blanchissage

Le jeu le plus décevant de la soirée aura sans aucun doute été l'interception lancée par Nealon Greene, que les Argonauts ont ramené pour un touché. J'espère que Nealon va se racheter et qu'il va payer le souper à l'unité défensive. Les Alouettes l'auraient emporté par blanchissage pour la première fois depuis 1976.

C'est sûr que le touché comme tel ne va pas contre la défensive, mais ça reste un élément de fierté de blanchir l'adversaire. Quand les gens voient le résultat dans le journal, ils lisent 31-7 et non 31-0.

C'est une mauvaise décision de la part de Greene qui a mené aux seuls points des Argos. On sait que le péché capital d'un quart-arrière est de lancer à contre-courant quand tu es en mouvement. Si tu cours à ta droite, tu ne vas pas essayer de passer à gauche. Mécaniquement, ça donne une passe pourrie sans force et inévitablement, cette passe est dirigée dans le trafic.

Par contre, je n'ai aucun problème avec la décision d'y aller avec des jeux par la passe. Ça ne serait pas correct d'amener le deuxième quart, de finalement lui donner du temps de jeu et de lui demander de remettre le ballon au porteur. Calvillo peut rester dans le match et faire ça si c'est ce qu'on veut. Il faut que tu donnes du temps de qualité à ton quart substitut, la chance de passer le ballon et de prendre de l'expérience.

D'ailleurs, tous les réservistes ont vu de l'action quand Matthews a senti que le match était dans la poche. C'est important de garder ces joueurs impliqués, de les faire jouer quand on en a la chance.

Propos extraits de la chronique Un autre angle et recueillis par RDS.ca