Il n'en reste plus que quatre et dans quelques heures, nous connaîtrons l'identité des deux dernières formations qui nourriront, pendant les deux prochaines semaines, l'espoir de soulever le précieux trophée Vince Lombardi remis aux champions du Super Bowl.

L'affrontement entre les Jets de New York et les Colts d'Indianapolis, le premier de la fin de semaine, est intrigant. On connaît tous l'histoire qui unit ces équipes depuis la fin de la saison. Assurés d'une participation aux éliminatoires, les Colts ont reposé leurs joueurs réguliers lors de la 16e semaine d'activité et les Jets en ont profité pour les battre et améliorer leurs chances de se qualifier, ce qu'ils ont fini par faire.

Maintenant, les Jets ont la chance de retourner à Indianapolis et de prouver que leur présence là-bas n'a rien d'un coup de chance. Les Colts, eux, ont l'occasion de fermer le dossier une fois pour toute et de passer à autre chose.

Toute la pression est sur le dos des Colts. Les Jets, c'est la bonne petite équipe que personne ne veut affronter. Ils n'ont rien à perdre, ont une bonne attitude et sont gonflés à bloc. Leur entraîneur Rex Ryan a le don de faire croire à ses joueurs qu'ils forment une grande équipe. C'est ce qui pourrait mêler les cartes. Les Jets représentent une équipe correcte, mais ils pensent et jouent comme une équipe qui peut réaliser de grandes choses.

Les Jets arrivent de San Diego où ils sont allés battre les Chargers, une équipe qui a toujours trouvé le tour de donner du fil à retordre aux Colts. C'est évident que Ryan va se servir de ça pour motiver ses troupes. Aussi, lors du dernier match entre les Jets et les Colts, tous les partants étaient encore sur le terrain au troisième quart et Indy ne menait que 15-10. Ce sera un autre élément du discours du coach, qui pourra comparer son équipe aux Steelers de 2005 ou aux Giants de 2007. Deux wild card qui ont gagné tous leurs matchs sur la route pour remporter les grands honneurs.

C'est prouvé, les Jets sont difficiles à battre quand ils ne se tirent pas dans le pied. Mark Sanchez semble finalement l'avoir compris : depuis quatre matchs, il n'a été victime que d'une seule interception. C'est l'une des clés de la victoire pour les Jets.

Contre Indianapolis, les Jets devront absolument trouver des moyens de voler des possessions de ballon à Peyton Manning et ça, il y a plusieurs façons de le faire :

- Évidemment, en imposant le jeu au sol pour contrôler le temps de possession. La dynamique est intéressante à ce niveau chez les Jets. La recrue Shonn Greene semble avoir des jambes fraîches : il a récolté plus de verges au sol, 263, que tout autre porteur de ballon depuis le début des éliminatoires. C'est lui qui porte la majorité du fardeau sur ses épaules, mais quand son équipe se retrouve en situation de court gain ou à la porte des buts, Thomas Jones revient avec son attitude en puissance.

- En créant des revirements. Facile à dire, me direz-vous, mais Manning a quand même commis quelques petites erreurs la semaine dernière contre les Ravens. Sur une séquence en particulier, il a été sauvé par Pierre Garçon et une pénalité, parce qu'il a lancé deux interceptions à Ed Reed en l'espace de quelques minutes.

On sait que Manning excelle contre le blitz, une tactique que les Jets aiment beaucoup mettre en pratique. Mais dans le fond, ce que le quart des Colts va voir en fin de semaine, il l'a vu la semaine passée. Entre la philosophie défensive des Ravens et des Jets, la différence n'est pas énorme. C'est presque comme si les Colts avaient eu droit à un entraînement intensif une semaine avant la finale d'association.

- En réussissant un gros jeu sur les unités spéciales. Tôt ou tard dans le match, ça va en prendre un pour donner le momentum aux Jets. Ça peut être un botté court, une feinte sur un botté de dégagement... n'importe quoi, mais il faudra probablement prendre des risques calculés.

Le plus gros souhait des Jets, c'est probablement d'être encore dans le coup en deuxième demie. Ils voudront que le scénario de la semaine passée se répète : arriver au troisième quart avec un écart d'une possession. Dans cette situation, toute la pression serait sur les Colts.

Défensivement, les Jets devront être capables de déguiser leurs intentions. Manning est toujours bien préparé, il a une mémoire photographique exceptionnelle. Tu lui montres un jeu une fois et il le reconnaîtra toujours par la suite. Ainsi, sa décision est souvent prise avant même que le ballon ne soit mis en jeu. Tu dois donc t'organiser pour qu'il se branche seulement une fois que le ballon est dans ses mains, pas avant. Il faut que tu crées une petite hésitation dans sa prise de décision.

Il faut aussi faire sortir Manning de son salon, qui se situe quatre ou cinq verges en arrière de son centre Jeff Saturday. Tu dois le forcer à se déplacer avec des blitz au centre de la zone de protection. Tu veux le faire courir, parce que c'est prouvé qu'il n'est pas aussi bon quand il est en mouvement.

Évident, plus tu caches tes stratégies, moins tu en dévoiles à l'adversaire, mais l'effet pervers, c'est que tu t'éloignes de l'endroit où tu devrais être à la levée du ballon. La ligne est mince entre ne pas vouloir dévoiler trop de choses à Manning et arriver en retard dans ses assignations.

Ce que j'aime de cet affrontement, c'est que c'est vraiment du old school football contre la nouvelle génération. Les Jets jouent selon la philosophie des pères fondateurs du football, les Vince Lombardi de ce monde. Leurs succès passent par la défensive et le jeu au sol, comme dans le bon vieux temps. Tandis qu'avec les Colts, 32e cette saison pour les verges amassées par la course, ça se passe dans les airs.

Les Colts peuvent arrêter la course

Pour les Colts, le meilleur antidote aux problèmes que posent les Jets, c'est de marquer tôt et souvent. Il faut absolument que tu parviennes à prendre une avance d'au moins deux possessions, ce que les Chargers n'ont jamais été capables de faire. Il faut que tu mettes les Jets mal à l'aise, que tu les forces à sortir de leur système, que tu en demandes beaucoup à leur quart recrue. Les Colts ont tout intérêt à frapper fort et tôt pour baisser le niveau de confiance des Jets et leur envoyer le message que leur beau rêve se termine aujourd'hui.

Pour ce faire, ils devront commencer par arrêter le jeu au sol. Lors du dernier match entre les deux clubs, les Jets avaient gagné 202 verges de cette façon. Bon, ce sont des données plus ou moins valables quand on connaît l'histoire de ce match-là, mais quand même...

En arrêtant le jeu au sol, tu places Mark Sanchez dans des situations de « troisième et long ». Un quart recrue qui se retrouve devant cette problématique en finale d'association, dans un stade super bruyant de surcroît, et qui voit Dwight Freeney et Robert Mathis se préparer à lui arracher la tête... Disons que ce n'est pas une situation idéale.

Et les Colts sont capables de mettre un frein aux meilleurs porteurs de ballon de la NFL. La semaine dernière, ils ont limité les Ravens à 1,7 verge par course, Ray Rice ne parcourant que 67 verges. C'est 16 de moins qu'il n'en avait récolté seulement sur le premier jeu du match contre les Patriots la semaine précédente! Cette saison, les Colts n'ont accordé que 11 courses de plus de 20 verges. Ça me dit qu'ils sont bons sur les plaqués et que leurs maraudeurs, même sans Bob Sanders, sont fiables.

Les joueurs défensifs des Colts sont petits et rapides. Souvent, le front défensif va avoir l'ordre d'attaquer de façon coordonnée, c'est-à-dire en angle, en diagonale ou avec des jeux en croisée... Le but, c'est de boucher les trous à l'intérieur et de faire bondir les porteurs à l'extérieur. Là, ils peuvent profiter de leur grande force, la rapidité. Les Colts ne veulent pas se faire prendre en pleine ligne droite. C'est pour ça qu'ils sont actifs dans le front défensif, pour essayer de contrecarrer les blocs en puissance.

J'ai déjà parlé de la capacité de Manning à lire le blitz et à y réagir. Il est le probablement le meilleur de sa profession dans cet aspect du jeu.

C'est une des raisons pourquoi les Colts n'ont accordé que dix sacs du quart en 571 jeux par la passe cette saison. Manning lance rapidement et prend de bonnes décisions. Mais ce n'est pas le seul facteur. Sa ligne à l'attaque est excellente - et sous-estimée - et ses receveurs de passes sont sur la même longueur d'ondes que lui. Ça aussi, c'est un important. On pense souvent que la protection du quart repose entière sur les cinq ou six gaillards tout juste devant lui, mais c'est loin de la réalité.

Finalement, le plus nerveux à l'approche de ce duel est peut-être le botteur des Colts, Matt Stover. Regardez la performance des botteurs qui ont affronté les Jets en éliminatoires, c'est assez incroyable. Shayne Graham, des Bengals, a raté ses deux placements et Nate Kaeding, des Chargers, a été 0-en-3!!! Il n'y a pas à dire, Stover doit prier pour des touchés!

Je crois qu'on aura droit à un excellent match, mais je dois donner l'avantage aux Colts. Je ne veux rien enlever aux Jets, qui ont tous les éléments pour leur donner du trouble, mais... Je ne pense pas que les Colts vont rater trois bottés de précision, je ne pense pas que les Colts vont lancer deux interceptions, je ne pense pas que les Colts vont écoper de dix pénalités. Et je pense que les Colts devraient être capables de marquer plus de points que les Chargers en ont marqués.

Ça devrait changer toute la dynamique du match.

VIKINGS c. SAINTS

L'issue de l'autre rencontre de la fin de semaine, qui opposera les Saints de La Nouvelle-Orléans aux Vikings du Minnesota, est beaucoup plus difficile à prédire.

Il s'agira d'un face-à-face entre les deux meilleures équipes, les deux meilleures attaques, les deux meilleurs quarts-arrières de l'Association nationale. Deux équipes qui sont capables de passer le ballon et de marquer beaucoup de points. Donc pour moi, la grande question est la suivante : laquelle sera en mesure de mettre le plus de pression sur le quart adverse?

Les deux équipes s'y prennent de façon différente pour atteindre cet objectif. Les Vikings arrivent avec quatre gars, Jared Allen en tête, tandis que les Saints, pour réussir à arriver au même résultat, sont obligés d'inviter plus de monde au party. Alors au départ, j'aurais tendance à donner l'avantage aux Vikings, parce qu'ils ont le meilleur des deux mondes. Ils sont capables de mettre une excellente pression avec seulement quatre joueurs, ce qui veut dire qu'ils peuvent reculer avec sept gars en couverture de passe. Ce n'est pas à négliger quand tu affrontes Drew Brees!

D'ailleurs, le choc entre Allen et le bloqueur à gauche des Saints, le réserviste Jermon Bushrod, sera une bataille à surveiller. Bushrod recevra sûrement de l'aide d'un ailier rapproché ou d'un deuxième bloqueur, parce qu'on est conscient qu'il y a un désavantage pour les Saints de ce côté-là. De plus, quand on concentre tant d'énergie sur un joueur comme Allen, d'autres en profitent automatiquement. La semaine dernière, ça a été Ray Edwards, qui a réussi trois sacs du quart, cinq plaqués et a forcé un échappé. Il était partout. Il s'est blessé à un genou et on ne sait pas s'il va jouer, mais son réserviste, Brian Robison, est très bon.

L'autre question existentielle qu'il faut se poser est intimement reliée à la première. Qui sera en mesure de mieux protéger son quart?

J'ai toujours dit que la meilleure façon de protéger ton quart-arrière était de courir efficacement avec le ballon. Encore une fois, les Vikings ont les éléments pour faire ça avec Adrian Peterson et Chester Taylor.

Ce qui est quand même incroyable, c'est que malgré le fait qu'ils ont souvent joué avec des grosses avances, les Saints se sont classés au 20e rang au chapitre des points alloués dans la NFL. Il y a huit matchs au cours desquels ils ont accordé plus de 130 verges au sol, quatre de plus de 160. Et ils ont eu des ennuis contre des porteurs physiques : Michael Turner (151 verges), Stephen Jackson (131 verges) et DeAngelo Williams (135 verges) se sont tous payés une partie de plaisir à leurs dépens.

Mais attention, il ne faut pas s'endormir sur les Saints! On parle beaucoup de Brees et de son groupe de receveurs, mais eux aussi peuvent courir et plus ils courent, plus ils sont dangereux avec leur jeu de passe. Il ne faut pas oublier que dans le match contre les Cards, quatre demis offensifs différents ont touché au ballon pour des gains cumulatifs de plus de 170 verges au sol.

Bref, les Saints aussi ont besoin de leur jeu au sol pour être explosifs. Sauf qu'ils se préparent à affronter une équipe qui est numéro 2 contre le jeu au sol. C'est un autre avantage qu'il faut donner aux Vikings.

Les épaules de Reggie, les émotions de Brett

J'ai hâte de voir si Reggie Bush va, pour un deuxième match de suite, nous étonner avec un style plus physique. La semaine dernière, il a surpris tout le monde avec de bons coups d'épaule et des courses en ligne droite. Jusque-là, tout le monde se posait la question : est-il vraiment un porteur de ballon digne de la NFL ou seulement Monsieur Gadget? Un gars qui va être utilisé uniquement dans des situations particulières, pour des jeux truqués, ou un vrai porteur?

À son dernier match, il a couru comme un vrai porteur. Ça le rend encore plus dangereux, parce que les joueurs en face de lui ne savent plus comment l'aborder. L'adversaire qui l'a vu finir ses courses tout en robustesse va maintenant se dire « quand Reggie Bush s'amène, je dois être prêt à encaisser », mais s'il décide de te contourner, tu as l'air fou!

J'ai aussi hâte de voir comment les Vikings vont s'y prendre pour essayer de le menotter sur les retours de bottés. L'année passée, quand ils sont allés jouer à La Nouvelle-Orléans, Bush a retourné deux bottés de dégagement pour des touchés. Alors Chris Kluwe, le spécialiste des Vikings, va avoir du gros travail à faire pour s'assurer qu'il ne répète pas ses exploits.

D'ailleurs, ce match avait été complètement fou sur les unités spéciales. Ryan Longwell avait réussi un placement avec 13 secondes à faire pour gagner le match. Les Vikings avaient bloqué un botté de précision et l'avaient retourné pour un touché. Et Bush avait retourné deux dégagements pour des touchés. À surveiller dimanche!

Un petit mot sur Brett Favre, qui devra contrôler ses émotions et éviter, comme il l'a si bien fait cette année, de commettre des revirements. C'est quand même exceptionnel qu'il n'ait été victime que de sept interceptions en 555 passes. Et il n'y a pas un match dans lequel il a lancé plus d'une interception. On voit qu'il est maintenant capable d'accepter un sac du quart, de lancer le ballon à l'extérieur du terrain ou d'aller à son dépanneur plutôt que de forcer le jeu. Il faut que ça continue. Pas le choix, parce que les Saints se nourrissent de revirements.

Le facteur X, celui qu'il ne faut vraiment pas négliger, celui qui fait en sorte que cet affrontement est si difficile à prédire, c'est la foule endiablée qui sera derrière les Saints. L'ambiance survoltée qu'il y aura au Superdome sera un atout majeur pour l'équipe locale. Les Vikings auront tout intérêt à ne pas trop commettre de bourdes en début de match, à impliquer leur jeu au sol, à contrôler l'horloge et à laisser passer la tempête. Il faut à tout prix qu'ils évitent de faire comme les Cards la semaine dernière : ils avaient commis un revirement immédiatement après avoir accordé un touché. Deux gros jeux et c'était terminé.

D'un côté, on a la magie de Brett Favre et de l'autre, l'espèce de destin qui semble coller à la ville de La Nouvelle-Orléans. Depuis l'ouragan Katrina, les Saints sont l'élément rassembleur de toute une ville et une victoire de leur part poserait tout un baume sur les plaies de ses habitants. Ce sont là deux scénarios assez puissants.

En résumé, quand on regarde tout ça, on s'aperçoit qu'on assistera à un match rempli de super vedettes. Brees contre Favre, Peterson contre Bush, Marques Colston contre Sidney Rice... Mais moi, je pense que ce match sera gagné par les gros. Ça se jouera dans les tranchées et c'est pour cette raison que je donne l'avantage aux Vikings.

*Propos recueillis par Nicolas Landry.