Mon choix est facile : les Colts!
Football vendredi, 5 févr. 2010. 02:04 mercredi, 11 déc. 2024. 23:46
On y est! Dans quelques jours, les Saints tenteront d'écrire une suite de rêve à leur incroyable histoire en offrant à la ville de La Nouvelle-Orléans une première parade du Super Bowl. Mais pour ce faire, ils devront vaincre les Colts d'Indianapolis, l'une des équipes les plus dominantes des années 2000.
D'entrée de jeu, voici quelques statistiques qui pourraient aider ceux qui n'ont pas encore fait leurs prédictions à se brancher. Sachez qu'au cours de la dernière décennie, les représentants de l'Association américaine ont une fiche de 7-2 au match ultime. Seuls les Buccaneers de Tampa Bay (2002) et les Giants de New York (2007) ont réussi à briser l'hégémonie de l'AFC.
L'honneur de l'Association nationale sera représenté par une neuvième équipe différente en autant d'années. Au cours de la même période, trois formations de l'Américaine se sont partagé la lumière des réflecteurs qui brillent sur l'une des plus importantes tribunes du monde du sport : les Patriots de la Nouvelle-Angleterre, les Steelers de Pittsburgh et les Colts.
Les Saints sont également la cinquième équipe, depuis l'an 2000, à accéder au premier Super Bowl de son histoire. Des quatre équipes précédentes, une seule (encore les Bucs) a réussi à l'emporter. C'est d'ailleurs arrivé 19 fois dans l'histoire de ce championnat qu'une équipe y faisait sa première apparition. La fiche des petits nouveaux : 4-15.
La conclusion qu'on peut en tirer, c'est que l'expérience compte pour beaucoup dans un match d'une importance aussi significative. Personnellement, je crois que le facteur expérience est valable jusqu'à la fin du premier quart. À partir de ce moment, ça devient un match comme un autre. Mais souvent, rendu à ce point, il est déjà trop tard pour effectuer une remontée...
J'annonce donc une première mauvaise nouvelle aux Saints : l'alignement des Colts est composé de 25 joueurs qui ont participé à la conquête du championnat de la saison 2006.
***
Les Colts et les Saints ont en commun qu'ils ont terminé au premier rang de leur association respective en saison régulière, mais c'est à peu près tout. Les deux organisations sont différentes dans la façon dont elles ont été bâties et dans leur philosophie sur le terrain.
Chez les Colts, tous les joueurs qui touchent au ballon en attaque, sans exception, ont été repêchés par la concession. Peyton Manning, Dallas Clark, Reggie Wayne et Joseph Addai ont été des choix de première ronde tandis qu'Austin Collie (quatrième ronde) et Pierre Garçon (sixième ronde) représentent des surprises probablement inespérées. En défensive, les Dwight Freeney, Robert Mathis, Antoine Bethea et Clint Sessions ont tous grandi ensemble depuis leurs premiers pas dans la NFL. Deux des trois secondeurs partants et les quatre membres réguliers de la tertiaire sont issus du repêchage.
Les Colts croient beaucoup à cette méthode. Ils veulent des gars qui arrivent des rangs universitaires, qui n'ont pas encore développé de défauts dans une autre équipe, et vont prendre le temps de les former à leur façon, de les faire grandir dans leur système.
Les Saints aussi ont fait de bons choix au repêchage, mais plusieurs de leurs joueurs d'impact ont d'abord fait leurs classes sous d'autres cieux. Ça commence avec le visage de la franchise, le quart-arrière Drew Brees. Il y a ensuite Jeremy Shockey, Darren Sharper, Jabari Greer. Les trois secondeurs, Jonathan Vilma, Scott Fujita et Scott Shanle, ont tous évolué ailleurs avant qu'on fasse appel à leurs services. Même chose pour l'ailier défensif Bobby McCray.
Les Saints avaient un passé un peu douteux et parfois, pour que les choses changent le plus vite possible, tu dois employer des méthodes moins conventionnelles. C'est ce que les Saints ont fait et ils ne se sont pas trompés.
Bref, c'est plaisant de voir qu'il y a plusieurs façons d'arriver au sommet dans la NFL.
***
Comparons maintenant les styles défensifs des deux clubs.
Les Saints, c'est une équipe qui mise beaucoup sur l'intimidation et le jeu robuste. C'est une mentalité que le coordonnateur de la défensive, Gregg Williams, a amené avec lui dans ses bagages le jour de son embauche. Il voulait changer la réputation de son unité, en faire un groupe qui est craint à travers la NFL. Williams aime que ses joueurs frappent tout ce qui bouge, qu'ils fassent sentir leur présence, qu'ils passent leur message, souvent en jouant à la limite de la légalité.
C'est maintenant bien connu, c'est aussi une défensive qui se nourrit de revirements. Ça a été sa grande marque de commerce pendant toute la saison. Elle profite du fait que l'attaque inscrit généralement beaucoup de points pour jouer de façon très agressive et constamment tenter de provoquer des échappés. Williams est capable de vivre avec le fait que ses joueurs vont manquer des plaqués pour prendre une chance de causer un revirement.
Pour les quarts-arrières adverses, les Saints amènent leur pression de partout sur le terrain. Secondeurs, demis défensifs, maraudeurs... tout le monde est appelé, tôt ou tard, à foncer vers le général de l'attaque adverse avec une panoplie de blitz. Ça arrive de partout.
Chez les Colts, on favorise depuis plusieurs années une pression à quatre joueurs avec une couverture de zone. Quoique maintenant, avec le nouveau coordonnateur Larry Coyer, on voit plus de variations sous ce thème. Le secondeur Gary Brackett est notamment mis plus souvent à contribution pour percer la ligne offensive adverse.
Mais en bout de ligne, c'est encore la bonne vieille philosophie du « plier sans casser » (bend, but don't break, en anglais). On concède beaucoup de verges, mais on accorde peu de points.
Les trois principes de base de cette unité sont rapidité, qualité des plaqués et discipline. Elle ne fait rien de bien compliqué, mais tout se fait tellement vite que les occasions se referment extrêmement rapidement pour l'équipe adverse. On dit parfois qu'elle manque de poids et qu'elle est plus vulnérable contre le jeu au sol, mais les trous que ça crée se referment quand même très rapidement. Il ne faut pas la sous-estimer parce que si on oublie les deux derniers matchs de la saison régulière, qui ont été joués en majeure partie par des remplaçants, cette défensive se classe dans le top 5 de la NFL!
***
En attaque, c'est encore une fois le jeu des contrastes. Les Saints sont le genre d'équipe à faire le même jeu à partir de 13 formations différentes tandis que les Colts vont faire 13 jeux différents à partir d'une seule formation.
L'intention des Saints, c'est de faire réfléchir les membres de la défensive adverse. Pour eux, une défensive qui pense, c'est une défensive qui hésite et quand tu hésites, c'est difficile d'être combattif.
En comptant la défensive, les Saints comptent 21 joueurs différents qui ont marqué au moins un touché cette saison. Vingt-et-un! Ils comptent aussi sur sept receveurs qui ont capté au moins 35 passes, sans oublier que leur attaque au sol s'est classée parmi les cinq premières de la Ligue. Vraiment, c'est une attaque très, très dangereuse.
De l'autre côté, il y a un super athlète qui n'a plus besoin de présentation. Peyton Manning est un vrai chef d'orchestre. Je sais qu'il y a bien des gens qui sont fatigués de le voir faire tous ses simagrées derrière sa ligne de mêlée, mais moi je le trouve incroyable. Parfois, il fait tout ce cirque pour changer de jeu, d'autre fois c'est simplement du bluff. Il arrive derrière son joueur de centre avec trois jeux en tête et décide de celui à exécuter une fois en position. Personne ne contrôle un match de football comme lui.
Chez les Colts, tout est une question de précision, d'exécution et de synchronisme. Le défi qu'ils lancent à l'adversaire est simple : notre niveau d'exécution va être meilleur que le vôtre. Manning ne se casse pas la tête. S'il voit sept joueurs dans la boîte défensive, il va passer. S'il en voit moins, il va demander un jeu de course. S'il ne voit qu'un maraudeur, il va viser les lignes de côté. S'il en voit deux, il va cibler le centre. C'est simple, mais tout est fait avec une précision chirurgicale.
L'attaque au sol peut sembler le maillon faible de la chaîne, mais ce n'est pas le cas. Les Colts s'en servent intelligemment pour préparer le play action, c'est-à-dire la feinte de course suivie d'une passe. Leur but n'est pas tant d'aller chercher beaucoup de verges au sol. Ce qu'on veut, c'est exécuter un nombre important de courses pour mettre la table pour le reste. Et dans la zone payante, leur jeu au sol est une arme redoutable : Addai a inscrit 13 touchés cette saison.
Plus facile à dire qu'à faire!
Vous avez maintenant un aperçu général des forces en présences. Mais qui sera en mesure d'obtenir le meilleur de ses effectifs dans le match le plus important de l'année? Je ne vous ferai pas languir : je favorise les Colts pour l'emporter.
À la blague, je vous dirais que le plan de match des Saints est très simple.
Objectif #1 : Amener Curtis Painter dans le match. Il faut frapper Peyton Manning souvent et sans pitié. Une fois que son auxiliaire sera sur le terrain, les Saints devraient avoir le beau jeu.
Objectif #2 : Amener Pat McAfee dans le match. Si on n'est pas capable de faire mal à Peyton Manning, il faut à tout le moins le garder le plus loin du terrain pour le plus longtemps possible. Plus McAfee effectuera de bottés de dégagement, meilleures seront les chances des Saints d'avoir l'avantage au tableau indicateur.
Objectif #3 : Créer des revirements. Ce fut le pain et le beurre des Saints en 2009, mais je crois qu'ils devront vivre d'amour et d'eau fraîche en fin de semaine!
Objectif #4 : Inviter les Colts à courir avec le ballon. Ça ne garantit pas la victoire, mais c'est peut-être moins douloureux de mourir à petit feu!
Objectif #5 : Finalement, la règle d'or : ne pas laisser Payton Manning prendre possession du ballon dans les deux dernières minutes du match!
Vous aurez compris que ce sont toutes là des choses beaucoup plus faciles à énumérer sur papier qu'à exécuter sur le terrain...
« L'avantage numérique » des Saints
L'une des questions qu'il faut se poser est la suivante : les Saints sont-ils capables de battre les Saints s'ils ne parviennent pas à provoquer de revirements. Ils en ont causé sept en deux matchs éliminatoires, mais les Colts seront-ils vraiment victimes d'autant de larcins? Je ne pense pas...
Je sais qu'il y a beaucoup d'amateurs de hockey sur le RDS.ca. Je vais donc me gâter et glisser une petite analogie avec notre sport national pour expliquer le danger qui guette les Saints. C'est que voyez-vous, des revirements, tout le monde sait que c'est important et tout le monde veut en créer, mais rien ne garantit que ça va arriver. C'est comme au hockey. Tu n'auras pas des avantages numériques à la tonne à chaque match. À un moment donné, il faut que tu sois capable de marquer à cinq contre cinq!
Ça me ramène à la grande question : si jamais la défensive des Saints est incapable de ravir le ballon aux Colts, pourra-t-elle tenir le coup contre Peyton Manning?
On sait que les deux équipes ont ce qui faut pour marquer des points à profusion. Souvent, dans ce genre d'affrontements, la question est de savoir laquelle saura le mieux limiter les dégâts. Le simple fait d'accorder un placement à la place d'un touché pourrait faire la différence dans ce match. Et je pense que les Colts seront meilleurs que les Saints, juste un peu plus souvent, dans la zone payante.
Pas de pitié pour Freeney
Le gros point d'interrogation dans le clan des Colts concerne l'état de santé de Dwight Freeney. On ne se fera pas de cachette, leur défensive est meilleure quand il est en uniforme. Sauf que les statistiques qui ont été compilées dans les onze parties que Freeney a ratées depuis qu'il est avec les Colts ne sont pas alarmantes. Au contraire!
Sans leur ailier défensif étoile, les Colts montrent une fiche de neuf victoires et deux défaites. Quand il est de l'alignement, ils ont accordé une moyenne de 19,6 points par match contre 16,6 points par match en son absence. Avec Freeney à l'extrémité droite de la ligne défensive, Indy donne en moyenne 193 verges par la passe par partie; c'est 34 de plus que lorsqu'il est laissé de côté!
La seule statistique qui souffre quand Freeney ne joue pas, c'est celle des sacs du quart. Les Colts en réussissent 2,2 par matchs avec lui, 1,7 sans.
Si je dirige la défensive des Saints et que je vois Freeney sur le terrain dimanche, je veux le mettre à l'épreuve dès le départ. Je dirige des jeux de course directement vers lui pour voir s'il est capable d'absorber des blocs, de planter son pied droit dans le sol. Je demande aussi à mes gars d'aller le faucher à la hauteur des jambes, de le forcer à sauter et à atterrir sans arrêt. Vous me trouvez peut-être dur, mais c'est la loi de la jungle! Le Super Bowl! Si tu es sur le terrain, tu n'auras pas de cadeau.
Il ne faut pas non plus négliger l'effort collectif dont sont capables les Colts. Robert Mathis est menaçant du côté gauche de la ligne et il serait une erreur d'oublier la présence de Raheem Brock, un vétéran qui est capable de jouer du gros football.
Chez la défensive des Colts, j'ai hâte de voir...
Le jeu des deux maraudeurs, Antoine Bethea et Melvin Bullitt.
Dans leurs deux premiers matchs éliminatoires, contre les Ravens et les Jets, les Colts ont pu remplir la boîte défensive pour arrêter le jeu au sol et forcer l'adversaire à passer. Tout ça, c'est bien beau quand c'est Joe Flacco ou Mark Sanchez de l'autre côté de la ligne d'engagement, mais là, le problème est tout autre. Il se nomme Drew Brees.
Les Colts ne peuvent pas vraiment changer complètement de stratégie. Ils n'ont pas le choix, ils devront arrêter le jeu au sol et les petites passes pièges des Saints. C'est la meilleure façon, sinon la seule, d'enrayer la menace du long jeu. Mais contre Brees, ils devront trouver une façon de déguiser leurs intentions.
C'est ici qu'entrent en jeu Bethea et Bullitt. Ils seront souvent appelés à reculer avant la mise en jeu pour faire croire qu'ils sont affectés à la couverture des zones profondes et, à la dernière seconde, venir s'ajouter à la boîte défensive. Ou encore foncer dans les allées et réussir de solides plaqués. Leur contribution sera une clé dans ce match.
Chez la défensive des Saints, j'ai hâte de voir...
Leur stratégie pour contrer l'effet Manning.
Jusqu'ici, les Saints, avec le goon Bobby McCray en tête, ont été intransigeants envers les quarts adverses. L'un d'eux, Kurt Warner, a déjà annoncé sa retraite et l'autre, Brett Favre, pourrait faire de même sous peu!
Mais Manning vient de jouer contre deux défensives agressives et les a taillées en pièces. Quelle stratégie adopteront les Saints? Vont-ils vraiment utiliser le blitz à profusion? La preuve est faite que ce n'est pas nécessairement la meilleure solution.
Vont-ils plutôt opter pour une pression à trois pour garder huit joueurs en couverture de passe? Ou encore emprunter la stratégie employée par les Ravens en 2006, qui consiste à garder un seul joueur pour appliquer de la pression et demander aux dix autres de retraiter?
La vie n'est pas un conte de fées
On connaît tous l'histoire des Saints. Elle est belle, inspirante et c'est vrai que ce serait le fun qu'ils gagnent, ne serait-ce que pour mettre un baume sur toutes les plaies des habitants de La Nouvelle-Orléans. Mais malheureusement, c'est Peyton Manning, et non un producteur de Hollywood, qui a le script en main.
Je prédis une victoire des Colts par le pointage de 31-23. Bon match à tous!
*Propos recueillis par Nicolas Landry.
D'entrée de jeu, voici quelques statistiques qui pourraient aider ceux qui n'ont pas encore fait leurs prédictions à se brancher. Sachez qu'au cours de la dernière décennie, les représentants de l'Association américaine ont une fiche de 7-2 au match ultime. Seuls les Buccaneers de Tampa Bay (2002) et les Giants de New York (2007) ont réussi à briser l'hégémonie de l'AFC.
L'honneur de l'Association nationale sera représenté par une neuvième équipe différente en autant d'années. Au cours de la même période, trois formations de l'Américaine se sont partagé la lumière des réflecteurs qui brillent sur l'une des plus importantes tribunes du monde du sport : les Patriots de la Nouvelle-Angleterre, les Steelers de Pittsburgh et les Colts.
Les Saints sont également la cinquième équipe, depuis l'an 2000, à accéder au premier Super Bowl de son histoire. Des quatre équipes précédentes, une seule (encore les Bucs) a réussi à l'emporter. C'est d'ailleurs arrivé 19 fois dans l'histoire de ce championnat qu'une équipe y faisait sa première apparition. La fiche des petits nouveaux : 4-15.
La conclusion qu'on peut en tirer, c'est que l'expérience compte pour beaucoup dans un match d'une importance aussi significative. Personnellement, je crois que le facteur expérience est valable jusqu'à la fin du premier quart. À partir de ce moment, ça devient un match comme un autre. Mais souvent, rendu à ce point, il est déjà trop tard pour effectuer une remontée...
J'annonce donc une première mauvaise nouvelle aux Saints : l'alignement des Colts est composé de 25 joueurs qui ont participé à la conquête du championnat de la saison 2006.
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Les Colts et les Saints ont en commun qu'ils ont terminé au premier rang de leur association respective en saison régulière, mais c'est à peu près tout. Les deux organisations sont différentes dans la façon dont elles ont été bâties et dans leur philosophie sur le terrain.
Chez les Colts, tous les joueurs qui touchent au ballon en attaque, sans exception, ont été repêchés par la concession. Peyton Manning, Dallas Clark, Reggie Wayne et Joseph Addai ont été des choix de première ronde tandis qu'Austin Collie (quatrième ronde) et Pierre Garçon (sixième ronde) représentent des surprises probablement inespérées. En défensive, les Dwight Freeney, Robert Mathis, Antoine Bethea et Clint Sessions ont tous grandi ensemble depuis leurs premiers pas dans la NFL. Deux des trois secondeurs partants et les quatre membres réguliers de la tertiaire sont issus du repêchage.
Les Colts croient beaucoup à cette méthode. Ils veulent des gars qui arrivent des rangs universitaires, qui n'ont pas encore développé de défauts dans une autre équipe, et vont prendre le temps de les former à leur façon, de les faire grandir dans leur système.
Les Saints aussi ont fait de bons choix au repêchage, mais plusieurs de leurs joueurs d'impact ont d'abord fait leurs classes sous d'autres cieux. Ça commence avec le visage de la franchise, le quart-arrière Drew Brees. Il y a ensuite Jeremy Shockey, Darren Sharper, Jabari Greer. Les trois secondeurs, Jonathan Vilma, Scott Fujita et Scott Shanle, ont tous évolué ailleurs avant qu'on fasse appel à leurs services. Même chose pour l'ailier défensif Bobby McCray.
Les Saints avaient un passé un peu douteux et parfois, pour que les choses changent le plus vite possible, tu dois employer des méthodes moins conventionnelles. C'est ce que les Saints ont fait et ils ne se sont pas trompés.
Bref, c'est plaisant de voir qu'il y a plusieurs façons d'arriver au sommet dans la NFL.
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Comparons maintenant les styles défensifs des deux clubs.
Les Saints, c'est une équipe qui mise beaucoup sur l'intimidation et le jeu robuste. C'est une mentalité que le coordonnateur de la défensive, Gregg Williams, a amené avec lui dans ses bagages le jour de son embauche. Il voulait changer la réputation de son unité, en faire un groupe qui est craint à travers la NFL. Williams aime que ses joueurs frappent tout ce qui bouge, qu'ils fassent sentir leur présence, qu'ils passent leur message, souvent en jouant à la limite de la légalité.
C'est maintenant bien connu, c'est aussi une défensive qui se nourrit de revirements. Ça a été sa grande marque de commerce pendant toute la saison. Elle profite du fait que l'attaque inscrit généralement beaucoup de points pour jouer de façon très agressive et constamment tenter de provoquer des échappés. Williams est capable de vivre avec le fait que ses joueurs vont manquer des plaqués pour prendre une chance de causer un revirement.
Pour les quarts-arrières adverses, les Saints amènent leur pression de partout sur le terrain. Secondeurs, demis défensifs, maraudeurs... tout le monde est appelé, tôt ou tard, à foncer vers le général de l'attaque adverse avec une panoplie de blitz. Ça arrive de partout.
Chez les Colts, on favorise depuis plusieurs années une pression à quatre joueurs avec une couverture de zone. Quoique maintenant, avec le nouveau coordonnateur Larry Coyer, on voit plus de variations sous ce thème. Le secondeur Gary Brackett est notamment mis plus souvent à contribution pour percer la ligne offensive adverse.
Mais en bout de ligne, c'est encore la bonne vieille philosophie du « plier sans casser » (bend, but don't break, en anglais). On concède beaucoup de verges, mais on accorde peu de points.
Les trois principes de base de cette unité sont rapidité, qualité des plaqués et discipline. Elle ne fait rien de bien compliqué, mais tout se fait tellement vite que les occasions se referment extrêmement rapidement pour l'équipe adverse. On dit parfois qu'elle manque de poids et qu'elle est plus vulnérable contre le jeu au sol, mais les trous que ça crée se referment quand même très rapidement. Il ne faut pas la sous-estimer parce que si on oublie les deux derniers matchs de la saison régulière, qui ont été joués en majeure partie par des remplaçants, cette défensive se classe dans le top 5 de la NFL!
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En attaque, c'est encore une fois le jeu des contrastes. Les Saints sont le genre d'équipe à faire le même jeu à partir de 13 formations différentes tandis que les Colts vont faire 13 jeux différents à partir d'une seule formation.
L'intention des Saints, c'est de faire réfléchir les membres de la défensive adverse. Pour eux, une défensive qui pense, c'est une défensive qui hésite et quand tu hésites, c'est difficile d'être combattif.
En comptant la défensive, les Saints comptent 21 joueurs différents qui ont marqué au moins un touché cette saison. Vingt-et-un! Ils comptent aussi sur sept receveurs qui ont capté au moins 35 passes, sans oublier que leur attaque au sol s'est classée parmi les cinq premières de la Ligue. Vraiment, c'est une attaque très, très dangereuse.
De l'autre côté, il y a un super athlète qui n'a plus besoin de présentation. Peyton Manning est un vrai chef d'orchestre. Je sais qu'il y a bien des gens qui sont fatigués de le voir faire tous ses simagrées derrière sa ligne de mêlée, mais moi je le trouve incroyable. Parfois, il fait tout ce cirque pour changer de jeu, d'autre fois c'est simplement du bluff. Il arrive derrière son joueur de centre avec trois jeux en tête et décide de celui à exécuter une fois en position. Personne ne contrôle un match de football comme lui.
Chez les Colts, tout est une question de précision, d'exécution et de synchronisme. Le défi qu'ils lancent à l'adversaire est simple : notre niveau d'exécution va être meilleur que le vôtre. Manning ne se casse pas la tête. S'il voit sept joueurs dans la boîte défensive, il va passer. S'il en voit moins, il va demander un jeu de course. S'il ne voit qu'un maraudeur, il va viser les lignes de côté. S'il en voit deux, il va cibler le centre. C'est simple, mais tout est fait avec une précision chirurgicale.
L'attaque au sol peut sembler le maillon faible de la chaîne, mais ce n'est pas le cas. Les Colts s'en servent intelligemment pour préparer le play action, c'est-à-dire la feinte de course suivie d'une passe. Leur but n'est pas tant d'aller chercher beaucoup de verges au sol. Ce qu'on veut, c'est exécuter un nombre important de courses pour mettre la table pour le reste. Et dans la zone payante, leur jeu au sol est une arme redoutable : Addai a inscrit 13 touchés cette saison.
Plus facile à dire qu'à faire!
Vous avez maintenant un aperçu général des forces en présences. Mais qui sera en mesure d'obtenir le meilleur de ses effectifs dans le match le plus important de l'année? Je ne vous ferai pas languir : je favorise les Colts pour l'emporter.
À la blague, je vous dirais que le plan de match des Saints est très simple.
Objectif #1 : Amener Curtis Painter dans le match. Il faut frapper Peyton Manning souvent et sans pitié. Une fois que son auxiliaire sera sur le terrain, les Saints devraient avoir le beau jeu.
Objectif #2 : Amener Pat McAfee dans le match. Si on n'est pas capable de faire mal à Peyton Manning, il faut à tout le moins le garder le plus loin du terrain pour le plus longtemps possible. Plus McAfee effectuera de bottés de dégagement, meilleures seront les chances des Saints d'avoir l'avantage au tableau indicateur.
Objectif #3 : Créer des revirements. Ce fut le pain et le beurre des Saints en 2009, mais je crois qu'ils devront vivre d'amour et d'eau fraîche en fin de semaine!
Objectif #4 : Inviter les Colts à courir avec le ballon. Ça ne garantit pas la victoire, mais c'est peut-être moins douloureux de mourir à petit feu!
Objectif #5 : Finalement, la règle d'or : ne pas laisser Payton Manning prendre possession du ballon dans les deux dernières minutes du match!
Vous aurez compris que ce sont toutes là des choses beaucoup plus faciles à énumérer sur papier qu'à exécuter sur le terrain...
« L'avantage numérique » des Saints
L'une des questions qu'il faut se poser est la suivante : les Saints sont-ils capables de battre les Saints s'ils ne parviennent pas à provoquer de revirements. Ils en ont causé sept en deux matchs éliminatoires, mais les Colts seront-ils vraiment victimes d'autant de larcins? Je ne pense pas...
Je sais qu'il y a beaucoup d'amateurs de hockey sur le RDS.ca. Je vais donc me gâter et glisser une petite analogie avec notre sport national pour expliquer le danger qui guette les Saints. C'est que voyez-vous, des revirements, tout le monde sait que c'est important et tout le monde veut en créer, mais rien ne garantit que ça va arriver. C'est comme au hockey. Tu n'auras pas des avantages numériques à la tonne à chaque match. À un moment donné, il faut que tu sois capable de marquer à cinq contre cinq!
Ça me ramène à la grande question : si jamais la défensive des Saints est incapable de ravir le ballon aux Colts, pourra-t-elle tenir le coup contre Peyton Manning?
On sait que les deux équipes ont ce qui faut pour marquer des points à profusion. Souvent, dans ce genre d'affrontements, la question est de savoir laquelle saura le mieux limiter les dégâts. Le simple fait d'accorder un placement à la place d'un touché pourrait faire la différence dans ce match. Et je pense que les Colts seront meilleurs que les Saints, juste un peu plus souvent, dans la zone payante.
Pas de pitié pour Freeney
Le gros point d'interrogation dans le clan des Colts concerne l'état de santé de Dwight Freeney. On ne se fera pas de cachette, leur défensive est meilleure quand il est en uniforme. Sauf que les statistiques qui ont été compilées dans les onze parties que Freeney a ratées depuis qu'il est avec les Colts ne sont pas alarmantes. Au contraire!
Sans leur ailier défensif étoile, les Colts montrent une fiche de neuf victoires et deux défaites. Quand il est de l'alignement, ils ont accordé une moyenne de 19,6 points par match contre 16,6 points par match en son absence. Avec Freeney à l'extrémité droite de la ligne défensive, Indy donne en moyenne 193 verges par la passe par partie; c'est 34 de plus que lorsqu'il est laissé de côté!
La seule statistique qui souffre quand Freeney ne joue pas, c'est celle des sacs du quart. Les Colts en réussissent 2,2 par matchs avec lui, 1,7 sans.
Si je dirige la défensive des Saints et que je vois Freeney sur le terrain dimanche, je veux le mettre à l'épreuve dès le départ. Je dirige des jeux de course directement vers lui pour voir s'il est capable d'absorber des blocs, de planter son pied droit dans le sol. Je demande aussi à mes gars d'aller le faucher à la hauteur des jambes, de le forcer à sauter et à atterrir sans arrêt. Vous me trouvez peut-être dur, mais c'est la loi de la jungle! Le Super Bowl! Si tu es sur le terrain, tu n'auras pas de cadeau.
Il ne faut pas non plus négliger l'effort collectif dont sont capables les Colts. Robert Mathis est menaçant du côté gauche de la ligne et il serait une erreur d'oublier la présence de Raheem Brock, un vétéran qui est capable de jouer du gros football.
Chez la défensive des Colts, j'ai hâte de voir...
Le jeu des deux maraudeurs, Antoine Bethea et Melvin Bullitt.
Dans leurs deux premiers matchs éliminatoires, contre les Ravens et les Jets, les Colts ont pu remplir la boîte défensive pour arrêter le jeu au sol et forcer l'adversaire à passer. Tout ça, c'est bien beau quand c'est Joe Flacco ou Mark Sanchez de l'autre côté de la ligne d'engagement, mais là, le problème est tout autre. Il se nomme Drew Brees.
Les Colts ne peuvent pas vraiment changer complètement de stratégie. Ils n'ont pas le choix, ils devront arrêter le jeu au sol et les petites passes pièges des Saints. C'est la meilleure façon, sinon la seule, d'enrayer la menace du long jeu. Mais contre Brees, ils devront trouver une façon de déguiser leurs intentions.
C'est ici qu'entrent en jeu Bethea et Bullitt. Ils seront souvent appelés à reculer avant la mise en jeu pour faire croire qu'ils sont affectés à la couverture des zones profondes et, à la dernière seconde, venir s'ajouter à la boîte défensive. Ou encore foncer dans les allées et réussir de solides plaqués. Leur contribution sera une clé dans ce match.
Chez la défensive des Saints, j'ai hâte de voir...
Leur stratégie pour contrer l'effet Manning.
Jusqu'ici, les Saints, avec le goon Bobby McCray en tête, ont été intransigeants envers les quarts adverses. L'un d'eux, Kurt Warner, a déjà annoncé sa retraite et l'autre, Brett Favre, pourrait faire de même sous peu!
Mais Manning vient de jouer contre deux défensives agressives et les a taillées en pièces. Quelle stratégie adopteront les Saints? Vont-ils vraiment utiliser le blitz à profusion? La preuve est faite que ce n'est pas nécessairement la meilleure solution.
Vont-ils plutôt opter pour une pression à trois pour garder huit joueurs en couverture de passe? Ou encore emprunter la stratégie employée par les Ravens en 2006, qui consiste à garder un seul joueur pour appliquer de la pression et demander aux dix autres de retraiter?
La vie n'est pas un conte de fées
On connaît tous l'histoire des Saints. Elle est belle, inspirante et c'est vrai que ce serait le fun qu'ils gagnent, ne serait-ce que pour mettre un baume sur toutes les plaies des habitants de La Nouvelle-Orléans. Mais malheureusement, c'est Peyton Manning, et non un producteur de Hollywood, qui a le script en main.
Je prédis une victoire des Colts par le pointage de 31-23. Bon match à tous!
*Propos recueillis par Nicolas Landry.