MONTRÉAL – Flottant toujours sur un nuage grâce à la conquête du Super Bowl, Antony Auclair a tout de même reconnu que la saison 2020 lui avait appris des leçons à retenir. D’abord, il a constaté à la dure que ça coûtait cher de se blesser, mais il a aussi retenu, grâce à Tom Brady et Rob Gronkowski, qu’il ne doit jamais oublier de s’amuser.

Moins de 48 heures après avoir goûté l’ivresse de soulever le trophée Vince Lombardi avec ses coéquipiers des Buccaneers de Tampa Bay, Auclair a répondu aux questions des journalistes avec générosité. Il a été en mesure de savourer ce moment malgré les contraintes de la COVID-19.  

« C’était incroyable! C’était ma première participation au Super Bowl et ça passait dans notre stade en plus. On savait qu’on avait de bonnes chances, on était vraiment contents du résultat. L’ambiance était extraordinaire, ils ont fait un bon travail de placer des photos sur les bancs ce qui faisait que ça semblait rempli quand on regardait vers les gradins. On avait beaucoup plus de partisans de Tampa que de Kansas City donc c’était vraiment cool, on pouvait sentir l’avantage de jouer à la maison », a-t-il raconté. 

Même s’il n’a pas eu l’occasion de revêtir son uniforme pour la rencontre ultime, il réalise que c’est peu banal de voir deux Québécois être sacrés champions de la NFL deux ans de suite. 

« C’est fou! Deux ans de suite, c’est énorme, du jamais vu. Juste de se rendre, c’est très difficile. Des membres du Temple de la renommée n’ont jamais vécu ce privilège. Ça démontre que la NFL te trouvera si tu as du talent et que tu travailles fort. C’est bon pour tout le pays », a-t-il évoqué. 

Personne n’avait besoin de lui dire que ce résultat aurait été encore plus magique s’il avait pu y contribuer sur le terrain. Comme on l’avait évoqué, mardi dernier, l’entraîneur des ailiers rapprochés des Buccaneers, Rick Christophel, avait admis que sa blessure subie hâtivement dans la saison expliquait son absence de la formation active. 

« Clairement, c’est l’élément. Je me suis blessé durant la deuxième semaine et j’ai manqué six matchs. Pendant ces parties, ils ont utilisé un autre joueur, un gars de ligne offensive, qui a très bien fait. À mon retour, j’ai été un peu utilisé et j’ai eu de bons matchs. Mais, question de logistique, il n’avait pas besoin de m’habiller vu qu’il était déjà en uniforme. Si je ne m’étais pas blessé, on aurait jamais découvert que Joe Haeg faisait un bon boulot à cette position. Le fait que je me suis blessé a beaucoup joué dans cette saison. Vu que Joe allait bien, on pouvait habiller un ailier rapproché avec un profil plus de receveur pour se donner de la profondeur à cette position. C’est l’histoire de la saison », a admis le Québécois de 27 ans qui n’avait disputé que le premier match avant de se blesser. 

« Il a saisi cette chance et il a fait un excellent travail. Je ne peux pas être fâché après mes coéquipiers s’ils ont bien fait et qu’on a gagné. Ultimement, c’est ça l’important », a ajouté Auclair avec classe. 

Pour ceux qui l’auraient oublié, Haeg est ce joueur qui a échappé une courte passe dans la zone des buts tôt au deuxième quart alors que les Bucs menaient 7 à 3. Ensuite, le porteur de ballon Ronald Jones a été stoppé deux fois d’affilée. Ainsi, on ne peut que s’empêcher de se dire qu’Auclair aurait eu la chance de capter une passe de touché et son talent de receveur aurait été utile sur ce jeu. 

Mais ce qui compte le plus dans cette histoire, c’est l’apprentissage effectué par Auclair. À ce sujet, l’ajout de Tom Brady et Rob Gronkowski a joué un rôle fort intéressant.  

« Ils ont une culture de gagnants. Ils travaillent jour et nuit, ils font attention à ce qu’ils mangent, ils s’entraînent bien et ils ont toute une équipe derrière eux pour les aider à rester en santé. J’ai appris beaucoup de tout ça. Pour moi, ce sera important à l’avenir de m’entourer de gens comme eux qui vont m’aider pour rester en santé. Ça m’a coûté cher cette année », a convenu Auclair avec lucidité. 

« Pour moi, dans le futur, ce sera important de rester en santé. C’est toujours ce qui arrive dans la NFL. Tu te blesses et d’autres joueurs obtiennent une occasion », a-t-il complété sur ce sujet. 

Ce n’est pas tout, Auclair remercie Brady et Gronk pour une autre raison.  

« Ces gars-là, ils ont du plaisir à jouer et c’est contagieux. Parfois, on l’oublie dans la NFL parce que c’est stressant et les entraîneurs sont souvent stressants et négatifs. Tu oublies d’avoir du plaisir, mais ça reste ce qui est important au final », a mentionné le colosse de six pieds six pouces qui rentrera au pays une fois que les célébrations, dont un défilé, seront complétées. 

Son contrat se termine et hommage à ceux qui n'ont pas quitté le bateau

À propos de son avenir, c’était impossible de ne pas aborder sa situation contractuelle. Auclair écoulait la dernière année de son entente avec les Buccaneers et il a été retranché de la formation durant les éliminatoires.  

« Je suis un gars de processus. Pour l’instant, le plan c’est de célébrer le Super Bowl et je ne pense pas à ce qui s’en vient », a répondu Auclair qui ne voulait pas trop se préoccuper de cet aspect maintenant. 

Avec raison, Auclair avait plus envie de se concentrer sur le positif. Ainsi, il a souligné le beau travail qui a été accompli dans les dernières années, même quand ce fut pénible au chapitre des victoires, pour mener à ce sacre. 

« Je pense à des joueurs comme Lavonte David, Mike Evans et Cameron Brate qui sont là depuis des années. C’est cool pour eux, ils sont la fondation de cette équipe. Je suis tellement content pour eux, ils ont subi des saisons de défaites année après année. Ils n’avaient jamais participé aux éliminatoires. Et là, on accède aux éliminatoires et on remporte le Super Bowl, c’est vraiment cool à voir », a témoigné l’ancien du Rouge et Or de l’Université Laval. 

« C’est sûr qu’on parle de Brady tout le temps, de Rob et de nos nouvelles acquisitions, mais la fondation s’est bâtie il y a longtemps avec des leaders positifs comme David, Evans, William Gholston, tous des gars qui sont là depuis longtemps. Ils auraient pu décider de partir et de quitter le bateau, mais ils sont restés. On a ajouté des éléments et ç’a cliqué avec tout le monde », a-t-il poursuivi dans cette voie. 

« Bien sûr, j’aurais voulu être en uniforme. Mais je suis avec les Bucs depuis quatre ans et j’ai traversé des saisons difficiles. Je crois que j’ai aidé à bâtir la fondation de cette équipe. Je suis simplement content de la victoire. Ne vous méprenez, j’aurais adoré jouer, mais c’est la victoire qui compte », a prononcé Auclair avec justesse. 

Il ne faudra jamais oublier que c’est un exploit d’avoir développé une chimie aussi vite.  

« Oui, on a réussi à gagner le Super Bowl, mais ça n’a pas été une année facile. Ça prend du temps pour bâtir cette relation et développer la cohésion. Normalement, ça prend plusieurs années. En plus, cette année, on n’a pas eu les semaines préparatoires ni de camp d’entraînement. Bref, les entraîneurs ont fait un excellent travail pour bâtir cette cohésion en peu de temps. On a réussi à le faire », a noté Auclair. 

Si le début de la saison se résumait à des hauts et des bas, les Bucs ont frappé leur creux en novembre avec trois défaites (38-3 face aux Saints, 27-24 face aux Rams et aux Chiefs) en cinq matchs.  

« Chaque année que j’ai remporté un championnat, il y a toujours eu un moment difficile à traverser. Cette année, ce fut en novembre, ce fut extrêmement difficile. On a mangé des volées en fait contre les Saints et les Chiefs. Mais ce sont des moments que tu dois vivre pour comprendre ce que tu dois corriger. À partir de notre semaine de congé, on a établi les points sur lesquels on devait travailler », a avoué Auclair. 

Le travail des entraîneurs a culminé avec un plan de match idéal pour enrayer la puissance des Chiefs. L’attaque et les unités spéciales ont brillé dans cette rencontre alors que la défense a été sensationnelle. 

« C’est sûr que notre défense est en feu depuis quelques matchs. Ils ont contenu Pat Mahomes pendant tout le match, c’était un excellent travail », a louangé Auclair. 

À Tampa, Auclair a dû se contenter de célébrer avec son frère Adam et l’un de ses meilleurs amis. Il pourra se reprendre avec ses parents et ses proches éventuellement. Si les restrictions le permettent dans les prochains mois, il souhaite se rendre en Beauce et au PEPS de l’Université Laval avec le précieux trophée Vince Lombardi. Après tout, c’est là que ce grand rêve a commencé. 

« Ça devient de plus en plus palpable et accessible. Tout le travail qui a été investi là-dedans, ce n’est pas facile à faire, au contraire. Mais en comprenant qu’il faut travailler fort, ça peut s’accomplir, ce n’est pas impossible », a conclu Auclair en donnant espoir à bien des jeunes qui ne doivent surtout pas perdre leur passion ces temps-ci. 

« Je suis champion du monde »