Un protocole de commotion cérébrale très rigoureux
NFL jeudi, 21 janv. 2016. 23:50 vendredi, 13 déc. 2024. 04:59Après avoir vécu ma première saison en tant que joueur partant dans la NFL, je suis de retour à la maison au Québec.
Étant donné la manière dont ma saison a pris fin, je tiens à vous rassurer : je suis remis de la commotion cérébrale qui m’a empêché de prendre part au match face aux Patriots. C’était la première fois que j’en subissais une et aussi la première fois de ma vie que je ratais un match en raison d’une blessure. Ce fut un dur coup lorsque j’ai appris que je ne pourrais pas jouer notre deuxième match en éliminatoires. Mais la bonne nouvelle, c’est que j’ai maintenant complété le protocole de la NFL en ce qui a trait aux commotions.
Dans le feu de l’action, tout ce qui te passe dans la tête, c’est de revenir au jeu. C’est pour cette raison que je salue vraiment le protocole de la NFL. Si cela avait été seulement de moi – et cela même avec mes connaissances en médecine –, je serais revenu au jeu puisque je ne ressentais plus de symptômes. Je voulais jouer, mais le protocole m’en a empêché et au bout du compte, cela prouve l'importance de son implantation afin de protéger les joueurs. C’est la première fois que je l’expérimentais et j’espère que c’était la dernière fois.
C’était ma première commotion et j’ai été chanceux qu’elle soit somme toute assez mineure. Jamais je ne banaliserais l'ampleur d'une commotion, mais je dois m'avouer quand même chanceux dans ma malchance d'avoir ressenti des symptômes uniquement durant les premiers jours de ma récupération. On sait que chez certains joueurs, les symptômes peuvent durer plusieurs semaines voire des mois. Personnellement, j’aimerais 100 fois mieux avoir des blessures musculo-squelettiques qu’avoir une commotion. Un cerveau, nous n’en avons qu’un.
Le fil des évènements
Lorsque j’ai subi la commotion face aux Texans de Houston, c’était dommage parce que je jouais probablement l’un de mes meilleurs matchs en carrière. J’étais gonflé à bloc et tout se déroulait très bien. Sur un bloc en décrochage, le secondeur était un peu plus près de moi que je ne le croyais et il m’a frappé la tête avec le côté de ses épaulettes. Après le contact, je me suis senti un peu étourdi sans toutefois perdre connaissance.
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Je suis resté sur le terrain pour la séquence qui s’est terminée par un placement. Par contre, je m’étais toujours promis que lorsque j’allais encaisser un bon contact, j’allais me demander si j’étais correct. Quand je me suis posé la question, je n’étais pas certain.
En retournant sur les lignes de côté, j’ai moi-même pris les devants pour dire que je ne me sentais pas normalement. Automatiquement, le protocole s’est enclenché. On m’a amené à l’intérieur où nos physiothérapeutes, notre médecin en médecine interne qui gère les commotions et le neurologue indépendant ont procédé à l’évaluation.
C’est difficile à gérer comme moment pour un joueur. Avec mes études en médecine, je me dis que c’était vraiment la meilleure chose à faire et je ne regrette pas ma décision. Mais c’est beaucoup de pression quand tu es un joueur qui tient à l’équipe et qui est très compétitif. Tu sens que tu laisses tomber tes coéquipiers dans un match où l’issue est incertaine en éliminatoires.
Le lendemain de notre match, j'ai commencé le protocole de la NFL en cinq étapes. Chacune d'entre elles doit être franchie avec une période minimum de 24 h sans symptômes. Ça rend les choses difficiles pour revenir la semaine suivant la commotion. Par la suite, il faut avoir le feu vert de la part du médecin de l’équipe et d'un neurologue indépendant.
Ma situation a évolué au jour le jour et la décision que je ne voyagerais pas avec l’équipe s’est prise vendredi. Ç’a été un dur coup.
Le sérieux des entraîneurs et des joueurs
Durant la semaine d’entraînement, je croyais que certains joueurs allaient me taquiner avec le fait qu’on m’avait diagnostiqué une commotion. Mais au contraire.
Plusieurs coéquipiers sont venus s’enquérir de ma condition et me disaient qu’ils savaient ce que je vivais puisqu’eux aussi en avaient subi une auparavant. Ils me disaient de prendre soin de moi et de prendre mon temps pour revenir. Mon entraîneur, quant à lui, m’a dit que je faisais du bon travail et de ne pas me stresser avec le fait de jouer ou non. Il m’a dit de me reposer.
Un premier match à la télévision
J’ai regardé le match à la télévision en compagnie de mon coéquipier et bon ami dans l’équipe Mitch Morse, également tenu à l'écart du jeu en raison d'une blessure. C’était le premier match de la saison de la NFL que je regardais à la télévision cette année. Je n’ai rien contre les descripteurs et les analystes à la télévision, mais écouter des commentateurs qui critiquent ton équipe, ça vient te chercher au plus profond de toi-même!
Mon plus gros stress en regardant la partie, c’était que la ligne offensive, et plus précisément mon remplaçant Jah Reid, fasse bien contre la défense des Pats.
Pendant la semaine d’entraînement, j’ai regardé des bandes vidéo de nos adversaires avec Jah. Vendredi, avant qu’il monte dans l’avion, je lui ai remis un sommaire des différents fronts et pressions qu’il allait voir. Je lui ai détaillé les différents appels que notre attaque pouvait faire. Je tenais vraiment à ce qu’il connaisse un bon match.
Pendant la rencontre, toute mon attention était rivée sur notre ligne offensive et sur Jah en particulier. La ligne à l’attaque a offert une vraiment bonne protection de passe. Elle n’a concédé qu’un sac et que deux ou trois pressions sur le quart-arrière. Dans l’ensemble, c’était mission accomplie.
Ce fut un match très serré où nous n’avons malheureusement jamais vraiment eu l’avantage. Nous sommes revenus forts en début de deuxième demie. Par contre, l’échappée de Knile Davis a coûté cher. Quand tu ne gagnes pas la bataille des revirements, c’est difficile de remporter un match. C’est la morale de l’histoire selon moi.
Durant nos 11 victoires consécutives, nous avons toujours gagné la bataille des revirements. Cette fois, nous l’avons perdue et, au bout du compte, nous nous sommes inclinés par un touché. Loin de moi l’idée de blâmer seulement ce point pour la défaite. Nous aurions pu mieux jouer sur beaucoup d’autres aspects également.
Malgré la défaite, j’étais très fier de mes coéquipiers sur la ligne offensive. On voyait qu’ils n’étaient pas du tout intimidés bien qu’ils étaient sur la route face aux champions en titre du Super Bowl.
*Propos recueillis par Christian L-Dufresne