Ce que je retiens surtout du premier voyage de la saison des Alouettes, c'est qu'ils viennent de signer deux victoires dans des endroits où ils avaient l'habitude de connaître beaucoup d'ennuis.

Après avoir battu les Eskimos à Edmonton, ce qui n'est déjà pas rien, les Alouettes ont finalement réussi à vaincre leurs démons en Colombie-Britannique en battant les Lions sur leur propre terrain vendredi soir. Ça veut dire qu'ils reviennent à la maison avec un dossier de 2-1 après trois gros matchs sur la route, un bilan que je qualifie de très positif.

Les partisans des Alouettes ont été gâtés au cours des dernières saisons et particulièrement l'an passé avec tous les records qui ont été brisés et la domination totale que leur club imposait à ses adversaires. Plusieurs d'entre eux ont donc l'impression que l'équipe a oublié comment jouer au football cette année, mais il faut faire attention! Ce que je retiens, et ce que tout le monde devrait retenir, c'est que les Alouettes reviennent d'un voyage de trois matchs de suite dans l'ouest avec une fiche positive.

Ceci dit, il n'y a évidemment rien de parfait encore dans le petit monde de Marc Trestman. Voici mes observations à la suite de la victoire de 16-12 contre les Lions.

La défensive a repris où elle avait laissé

On se demandait si la défensive qui s'était levée au quatrième quart à Edmonton serait celle qui allait se présenter au prochain match et la démonstration faite à Vancouver nous permet de répondre par l'affirmative.

Premièrement, les Alouettes n'ont alloué que sept verges au sol. Je pense qu'après quelques courses infructueuses, les Lions ont tout simplement abandonné ce chapitre de leur livre de jeux, ce qui a permis aux Alouettes de remplir leur première mission : rendre l'adversaire unidimensionnel. Sachant que les Lions étaient en mode aérien, les Alouettes ont pu se préparer en conséquence et tenter de provoquer des revirements. Là aussi, le plan a fonctionné : les Montréalais ont terminé la partie avec un différentiel de plus-3 dans cette facette du jeu.

Un revirement, c'es toujours l'objectif premier d'une défensive. Si on ne peut pas en créer, la deuxième meilleure solution est toujours de forcer l'adversaire à sortir du terrain après seulement deux jeux. Les Lions ont eu le ballon 15 fois et à six six reprises les Alouettes les ont chassés après le minimum de jeux. Résultat : la défensive des Lions a passé beaucoup plus de temps sur le terrain que celle des Alouettes et ça a fait toute la différence.

J'ai adoré la ténacité de la ligne défensive des Als. Elle a été bonne pendant tout le match, mais particulièrement au quatrième quart, parvenant notamment à rejoindre Casey Printers à plusieurs occasions. Ça ne s'est pas nécessairement traduit en plusieurs sacs du quart - un seul pour être précis - mais ce n'est pas synonyme d'inefficacité.

Combien de fois Printers a-t-il terminé un jeu sur le derrière? Combien de fois a-t-il été rabattu au sol en décochant sa passe? Le quart-arrière des Lions a en quelque sorte été victime du supplice de la goutte vendredi soir. On l'a frappé constamment et de façon encore plus régulière en deuxième demie. De toute évidence, au quatrième quart, il n'était plus capable d'en prendre davantage. Déjà handicapé par une blessure à une cuisse, il n'était plus capable de lancer le ballon. On voyait qu'il n'était plus à l'aise, que sa mécanique était affectée.

Bref, les Alouettes l'ont eu à l'usure. C'est tout à leur honneur quand on sait qu'ils ont bénéficié d'une semaine écourtée pour se reposer et se préparer en vue du match. Ça prouve qu'on a une équipe qui possède beaucoup de caractère, mais aussi qui est dans une excellente forme physique!

***

Pourtant, on a eu l'impression que le fameux blitz des Alouettes n'est pas encore à point. On l'a vu mal coordonné, avec deux joueurs qui se dirigeaient au même endroit, et on l'a vu prévisible. Trop souvent, les Lions savaient, ou du moins se doutaient très fortement, que le blitz s'en venait. Le plus bel exemple est le touché de Jamal Robertson à la fin de la première demie.

De toute évidence, le coordonnateur défensif des Alouettes, Tim Burke, a décidé de montrer aux adversaires que son unité allait être plus agressive cette année. Je ne sais pas si c'est une tendance qu'il veut installer tôt dans la saison pour ensuite revenir à son style traditionnel, mais pour l'instant, c'est une facette qui a besoin d'amélioration.

***

Une autre bonne note dans le cahier de la défensive des Alouettes : pour la première fois en trois matchs, elle n'a pas accordé de longs jeux, ou presque. En fait, elle a accordé deux jeux de plus de 20 verges, ce qui est minime comparativement aux parties contre les Roughriders et contre les Eskimos.

C'est vrai qu'il y a eu plusieurs pénalités d'obstruction appelées contre les Alouettes, mais au moins ça me dit que les attrapés étaient un peu plus contestés que lors des premiers matchs. C'est une bonne nouvelle, parce que quand tu joues du homme à homme, faut que tu sois dans les parages quand la passe arrive à destination.

Peut-être que certaines pénalités n'étaient pas méritées, mais il faut vivre avec ça. De toute façon, des décisions controversées, il y en a toujours des deux côtés.

***

Bravo à Jerald Brown, qui a été le héros de la défensive pour un deuxième match consécutif en provoquant un échappé et en réussissant une interception qui a permis aux Alouettes de fermer les livres en fin de match.

Ce que j'aime de Brown, c'est qu'il a une mémoire courte. Il a été victime de trois pénalités d'obstruction et quelques passes ont été complétées contre lui, mais il n'a pas abandonné, ne s'est jamais démoralisé et est sorti avec les gros jeux. Je trouve ça intéressant comme dynamique.

Et à la défense de Brown, il est souvent opposé au meilleur receveur de passes adverse. Vendredi, c'était Geroy Simon, un gars qui donne des ennuis à tous les demis défensifs de la Ligue canadienne. Ce serait donc injuste de critiquer Jerald Brown pour les jeux réussis par les Lions à ses dépens.

Duval n'est pas parfait, mais donnons-lui ce qui lui revient

J'en avais parlé dans ma chronique précédente : on s'attend à mieux de Damon Duval. Il est un botteur étoile et tous ceux qui suivent les Alouettes se rappellent des exploits qu'il a accomplis la saison dernière. Mais contre les Lions, ça a encore une fois été laborieux. Il a raté deux bottés de précision et a commis un botté d'envoi illégal.

Par contre, je crois qu'il faut rendre à César ce qui revient à César. Quand, au quatrième quart, les Alouettes étaient impliqués dans un match chaudement disputé et que le positionnement sur le terrain était plus important que jamais, Duval a fait du boulot impeccable.

Il a réussi les deux placements qu'il a tentés, mais surtout, il a décoché des bottés de dégagement de 53 et 60 verges. Ce dernier a permis aux Alouettes de prendre une avance de quatre points au quatrième quart.

Finalement, quand ça comptait, Duval a fait le travail. Ce n'est pas négligeable et je crois que c'est important de le souligner. On peut être sévère envers lui parce que les attentes sont élevées, mais quand il fait des bons coups, c'est important de le dire.

Pas le meilleur match de l'attaque

J'hésite à dire si on peut utiliser le mot « décevant » pour qualifier la performance de l'attaque. Probablement que oui...

Quatre placements, deux simples et un touché de sûreté, pour un grand total de 16 points. Aucun touché contre une jeune défensive qui alignait cinq recrues et qui était privée de son meilleur joueur de ligne (Keron Williams) et de son secondeur intérieur régulier (Anton McKenzie).

Deux séjours dans la zone payante qui n'ont pas donné de résultats. Plusieurs passes échappées par les cibles de Calvillo. On était en droit de s'attendre à plus.

Pour le prochain match, le mot d'ordre martelé par Trestman sera probablement FINIR. Finir les jeux, finir les séquences, finir les matchs.

En même temps, de façon réaliste, il ne fallait peut-être pas s'attendre à de miracles de la part de l'attaque des Oiseaux. Après tout, l'équipe n'avait pratiqué qu'une seule fois après son match à Edmonton. On avait sûrement mis un peu d'énergie sur le match à Vancouver avant de partir pour l'ouest et de se concentrer sur les Eskimos, mais ce n'est pas la même chose.

Et je veux donner du crédit à la défensive des Lions. Pour avoir du succès contre les Alouettes, il faut être capable de courir avec leurs receveurs, mais il faut surtout être capable de plaquer leurs receveurs. Ça peut paraître fou de dire ça, parce qu'évidemment, au football, tout jeu doit se terminer par un plaqué! Mais je le précise parce que les receveurs des Alouettes sont des experts pour convertir de courtes passes en longs jeux et il est important de les rabattre au sol aussitôt qu'ils ont le ballon en leur possession.

Les Lions l'ont compris et ont très bien exécuté cet aspect du jeu.

***

Chez les Alouettes, on a quand même tenté d'impliquer Avon Cobourne dans le plan de match. Il a couru 13 fois pour des gains de 79 verges, pour une moyenne de plus de six verges par portée.

On a également tenté quelques passes pièges, ce qui est intéressant parce que depuis le début de la saison, l'adversaire joue de façon très agressive contre l'attaque des Alouettes. Il faut donc être capable de courir et essayer d'être le moins prévisible possible. Pour ce faire, ça prend toutes les armes nécessaires pour faire avancer le ballon.

Je n'irais pas jusqu'à dire que l'attaque des Alouettes est maintenant équilibrée - on parle quand même de 14 courses pour 47 passes! - mais au moins, on observe une volonté d'imposer le jeu au sol. C'est un pas vers l'avant.

***

J'ai beaucoup aimé la performance de S.J. Green. Je parlais d'attrapés contestés en début de chronique... Green était étroitement couvert par deux demis défensifs quand il a capté une passe de 48 verges au quatrième quart. Il a vraiment offert une grande performance.

***

Un receveur format géant

Je m'en voudrais de terminer cette chronique sans parler de mon ami Luc Brodeur-Jourdain, qui s'est démarqué en captant une passe de dix verges en première demie. Je lui dis bravo pour son premier attrapé en carrière!

Par contre, j'ai hâte de lui demander ce qu'il retient de son expérience. Sur le jeu, il s'est fait plaquer solidement à la hauteur des genoux et je ne suis pas certain qu'il a apprécié!

Il faut comprendre qu'un demi défensif qui voit un gars de 325 livres attraper un ballon ne se cassera pas la tête en tentant de le plaquer à la hauteur des épaules. Il va descendre et viser les chevilles et les genoux.

Luc ne s'est pas blessé sur le jeu, mais je me dis que ce serait vraiment dommage de perdre un joueur de ligne régulier pour un petit attrapé de dix verges. Tant qu'à l'essayer, pourquoi ne pas attendre d'être à la porte des buts pour que ça donne un touché?

C'est l'humble avis d'un ancien joueur de ligne! À la semaine prochaine!

*Propos recueillis par Nicolas Landry.