L'amateur de football en moi a adoré le match de samedi entre les Alouettes et les Roughriders de la Saskatchewan. Beaucoup de points, des touchés spectaculaires, des gros jeux et deux équipes qui s'échangent les devants huit fois en deuxième demie. Depuis le début de l'année, on ne peut certainement pas reprocher aux hommes de Marc Trestman de ne pas donner un bon show.

Les plus fervents partisans, par contre, diront que c'est bien beau le spectacle, mais à quand les victoires?

À ceux-là, je dirais de rester positifs. Oui, les Alouettes ont commis des erreurs grossières qui ont finalement donné la victoire sur un plateau d'argent aux Roughriders, mais ils ont également accompli beaucoup de bonnes choses et il y a plusieurs raisons d'être optimistes.

Anthony Calvillo et ses receveurs ont fait de l'excellent boulot contre la meilleure défensive de la Ligue canadienne. Trente-deux passes complétées en 41 tentatives, pour un pourcentage d'efficacité de 78%, c'est assez élevé merci! Les Alouettes mettent énormément de temps à peaufiner leur jeu aérien, le dada de Marc Trestman, lors des entraînements et ça se voit.

D'un autre côté, j'espérais voir une attaque plus équilibrée, mais après avoir gagné 25 verges au sol la semaine dernière contre les Stampeders, les Alouettes en ont amassé un maigre total de 13 contre les Riders. Et là-dessus, il y a eu une course de sept verges de Calvillo!

Comme il fallait s'y attendre, cette unidimensionnalité a rattrapé les Alouettes en fin de match. C'est que, voyez-vous, quand vous lancez le ballon 90% du temps, vous devenez un tantinet prévisible, jusqu'au point où l'adversaire ne s'occupe même plus de votre jeu au sol et s'investit dans le jeu des pourcentages. Tu veux passer neuf fois sur dix? Et bien je vais demander à ma défensive de se consacrer uniquement au jeu aérien jusqu'à ce que tu me prouves que tu peux me battre autrement. Bref, en étant aussi prévisible, tu facilites la tâche de ton adversaire.

Il y a deux jeux qui m'ont particulièrement frustré dans le match de samedi et ils sont survenus en deuxième demie.

Sur le premier, les Alouettes faisaient face à un deuxième essai et quatre verges et ont décidé d'ignorer le jeu au sol. On a tenté une passe, mais Calvillo s'est fait plaquer derrière la ligne de mêlée pour une perte de dix verges et on a dû dégager notre territoire.

L'autre, c'est l'interception dont Calvillo a été victime à la fin du match. Là-dessus, je ne blâme aucunement le quart-arrière des Oiseaux. Le ballon a été dévié à la ligne d'engagement et il a fallu un très beau jeu du demi défensif pour aller cueillir la passe avant qu'elle ne touche le sol. Mais je voudrais rappeler aux partisans que ce jeu est survenu sur un deuxième essai et trois verges à franchir.

Voilà deux jeux où il aurait été bien de mélanger un peu la défensive des Riders, mais la menace de jeu au sol des Alouettes est inexistante. Je me dis que tant qu'à lancer le ballon dans ces situations, pourquoi ne pas amener Kerry Carter dans le champ arrière? Ce faisant, tu envoies le message à l'adversaire que s'il veut déployer sa défensive pour se protéger de la passe, tu as ton gros porteur qui est capable d'aller chercher trois ou quatre verges par course.

De plus, on ne le répétera jamais assez, une bonne attaque au sol te permet de contrôler le temps de possession du ballon, le tempo du match. Regardez ce qu'ont fait les Stampeders la semaine dernière : ils prenaient tout leur temps pour monter le terrain verge par verge et l'attaque des Alouettes n'a pratiquement jamais quitté le banc. Dans un match comme celui de samedi, j'aurais aimé voir une attaque capable d'imposer son rythme et d'écouler du temps, parce que de toute évidence, la défensive des Alouettes en avait plein les bras contre l'attaque des locaux.

Je me console en me disant qu'au moins, Avon Cobourne a retrouvé sa place dans le plan de match. Invisible la semaine dernière, on l'a retrouvé en deuxième demie samedi. Même s'il n'a porté le ballon qu'à quatre reprises, il a été un excellent dépanneur chaque fois que Calvillo n'avait nulle part où aller avec ses premières lectures.

Cobourne a touché au ballon 12 fois et personnellement, j'aimerais qu'on le lui remette une bonne vingtaine de fois par match. Ce gars-là est une petite dynamo, un gros moteur dont l'énergie est contagieuse sur le terrain. Chaque fois qu'il touche au ballon, quelque chose de positif survient. Il faut trouver le moyen de lui donner la balle plus souvent, peu importe comment.

Je comprends que Marc Trestman est vendu au jeu aérien. Ça crève les yeux dans ses entraînements et ça se traduit sur le terrain lors des matchs. Je suis également conscient que je suis loin d'avoir son expérience en coaching, mais je trouve simplement qu'on beurre un peu épais avec la passe chez les Alouettes.

Plus de sérieux dans les minutes critiques

En défensive, j'ai remarqué plusieurs plaqués ratés pour un deuxième match consécutif et l'indiscipline a vraiment fait mal par moments. Sans compter quelques erreurs majeures qui ont mené, entre autres, à une passe à Wes Cates le long des lignes de côté et au touché de Neal Hughes. Tous fins seuls, ces joueurs avaient été complètement oubliés par la défensive des Alouettes.

Il y a aussi une petite tendance qui commence à m'agacer : encore une fois, Montréal a accordé des points dans les dernières minutes de chaque demie.

Je suis bien conscient que la défensive a été placée dans de fâcheuses positions - par l'attaque sur l'interception de Calvillo et par les unités spéciales sur l'échappé de Jason Armstead - mais ça fait quand même deux matchs de suite qu'on craque avant de retraiter au vestiaire et dans les dernières minutes de la rencontre. Avant la mi-temps, ça a pour effet de donner un regain d'énergie à l'adversaire et sur la route, ça remet la foule dans le match. En fin de rencontre, évidemment, ça peut permettre à l'adversaire de remonter la pente et de te battre, ce qui est arrivé contre la Saskatchewan.

Les Alouettes ont de nouveau eu de la difficulté à contrer un quart-arrière mobile et Cates s'en est donné à cœur joie. Ça aussi c'est frustrant, parce que comme je l'expliquais dans ma chronique précédente, quand tu te prépares pour un match, tu cibles un joueur de l'autre côté que tu dois absolument arrêter pour espérer l'emporter. Tu accepterais de te faire battre par n'importe qui, mais pas lui. Cet homme que les Alouettes avaient ciblé samedi, c'était Cates, qui a répondu en amassant plus de 200 verges à lui seul.

Sur une note plus positive, je me réjouis de la performance de Reggie Hunt, LA grosse acquisition de la saison morte qui disputait son premier match avec les Alouettes. Deux interceptions, un sac du quart et huit plaqués, c'est une belle façon de faire les présentations. Chaque fois qu'il a créé un revirement, les Alouettes sont allés marquer un touché.

Pour un gars qui a été parachuté à la position de secondeur intérieur sans s'y être entraîné, il a été impressionnant. Il a mal paru sur par moments, mais en général, il a réussi pas mal plus de jeux qu'il n'a fait d'erreurs. J'avais peur qu'il manque d'énergie, mais il tenait vraiment à montrer à son ancienne formation qu'il pouvait encore jouer et il a été un joueur d'impact.

Des unités pas si spéciales

La cerise sur le sundae a été la performance des unités spéciales. C'est la même rengaine à chaque semaine, mais samedi, ça a été la différence entre une victoire et une défaite des Alouettes, c'est qui a fait changer le vent de côté. Les Alouettes menaient par huit points et semblaient avaient repris pour de bon le fameux momentum, mais tout s'est écroulé.

Il y a d'abord quelqu'un qui a erré en envoyant l'unité de retour de bottés courts après que les Riders eurent réduit l'écart à 33-31. Je n'ai pas eu l'occasion de poser la question, alors je ne fais que spéculer ici, mais j'imagine qu'un entraîneur des unités spéciales, quand il s'attend à un botté court et veut envoyer ses spécialistes en la matière, doit obtenir l'accord de son supérieur avant de procéder. Je ne sais pas si ça a été fait, donc je ne peux dire à qui revient le blâme.

Le fait demeure qu'il restait 2:36 au quatrième quart et les Riders avaient encore un temps d'arrêt. Personnellement, je m'attendais à 100% à ce qu'ils essaient de refouler les Alouettes le plus loin possible avec un botté régulier et c'est exactement ce qu'ils ont fait.

La deuxième erreur, c'est Armstead qui l'a commise en plaçant un genou au sol dès la réception du botté. Ça aurait été la consigne à appliquer sur un vrai botté court, mais Armstead aurait dû réaliser que la stratégie changeait maintenant qu'il avait les deux pieds profondément dans son territoire!

Ensuite, sur le retour suivant, le pauvre gars, probablement un peu ébranlé, échappe le ballon et voit s'envoler les chances de remontée des Alouettes. À la défense d'Armstead, le plaqué qu'il a encaissé était très sévère et je serais curieux de voir combien de retourneurs auraient conservé le ballon après un pareil choc. Il ne faut pas avoir peur des mots, il s'est fait royalement geler par un train qui n'a jamais été bloqué auparavant. Quelqu'un, à quelque part, n'a pas fait son travail et c'est Armstead qui porte le bonnet d'âne.

Voilà maintenant quatre matchs que les unités spéciales des Alouettes ne génèrent absolument rien. Il faudra maintenant redoubler d'ardeur et trouver des solutions.

L'une d'elles pourrait être le petit Larry Taylor, qui est sur l'équipe de pratique. Une autre possibilité serait de demander à Cobourne, qui est complètement déchaîné, de retourner les bottés d'envoi et de donner la commande des bottés de dégagement à Brian Bratton.

Les possibilités sont là, mais il va falloir faire vite parce que le prochain match est déjà à nos portes. Les Alouettes s'en vont à Vancouver, où les Lions ont retrouvé leur rythme de croisière.

*Propos recueillis par Nicolas Landry.