Vendredi 13. Le chat noir, qui détenait un numéro symbolisant la malchance, est parti en longeant les murs. Après avoir sorti les griffes et écorché beaucoup de monde, il est parti en réprimant difficilement un sourire de satisfaction. Le sourire de celui qui quitte une bande de perdants pour mettre le cap sur les Flames où il a bien l'intention d'en faire des gagnants.

Ainsi va la vie. Ainsi va Michael Cammalleri.

Il gagne toujours, Cammalleri. Quand il n'est pas à l'aise quelque part, il se trouve toujours une nouvelle niche. Il connaît une grosse saison et il en soutire 30 millions. Dans son for intérieur, il est sans doute convaincu de pouvoir faire une différence à Calgary. LA différence, évidemment.

Il ne lui est probablement jamais arrivé de se demander pourquoi un marqueur naturel comme lui en est déjà à sa quatrième formation, à 29 ans seulement? S'il l'a fait, il a sans doute conclu que c'est parce qu'il est en demande. Jamais parce qu'on l'a assez vu ou assez entendu.

Je m'attarde un instant sur ce que le directeur général des Flames, Jay Feaster, a déclaré aux médias quelques instants après la transaction. «Quand je lui ai parlé, la première chose que Mike m'ait dite est: «Où sommes-NOUS en ce moment? À quatre points d'une place en séries? Je ne peux pas attendre d'être là»

Un beau parleur, Mike. Dire les bonnes choses est sans doute la chose qu'il sait faire le mieux. Rappelez-vous à quel point il était heureux et fier de joindre une organisation jouissant d'une telle réputation quand il s'est présenté à Montréal. Il s'intéressait à son histoire, à sa tradition. À l'occasion de la grande réunion des joueurs de toutes les époques, dans le cadre de la soirée du centenaire, il avait été le seul membre actuel de l'équipe à aller serrer la main des grands du passé. Ceux qui avaient contribué à écrire l'histoire du Canadien avaient été impressionnés de sa gentillesse. Fans et médias avaient considéré son arrivée comme une bouffée de fraîcheur dans une équipe qui donnait l'impression de se projeter dans le futur grâce à l'embauche de joueurs autonomes ayant coûté les yeux de la tête.

Pendant que Cammalleri apprenait qu'il n'était plus un Canadien, les Flames étaient en train de battre les Ducks d'Anaheim, jeudi soir. C'était leur huitième victoire de suite à domicile. L'ancien numéro 13 se présente donc dans une formation où règne déjà une meilleure ambiance. D'ailleurs, ses prochains coéquipiers voient dans cette transaction une intention ferme de la direction de les mener en séries. Quand une formation obtient un marqueur naturel, spécialiste de l'attaque massive, cela crée inévitablement de l'enthousiasme dans le groupe.

Les Flames vont probablement participer aux séries. Si cela se produit, attendez-vous à ce que Cammalleri, à qui on accordera un certain crédit, se bombe le torse de fierté.

Ainsi va la vie. Ainsi va Cammalleri.

Un coup de chance

Qu'est-ce que le Canadien obtient dans l'échange? Un gros bonhomme capable du meilleur et du pire, semble-t-il. Capable de marquer des buts, mais également capable de s'octroyer des soirées de congé sans trop sourciller. Pas un champion de la discipline non plus, puisqu'il termine actuellement sa deuxième suspension de la saison.

Calgary obtient des habiletés naturelles et Montréal du poids. Et durant les deux prochaines années, les Flames devront aussi absorber une galette quatre millions $ de plus par saison.

Dans un sens, elle est là, la bonne nouvelle pour le Canadien. Quand une organisation se voit dans l'obligation d'amorcer une reconstruction, on doute toujours qu'elle puisse se départir de joueurs possédant de lourds contrats. Le Canadien, qui a déjà rendu de fiers services aux Rangers et aux Hurricanes en les débarrassant des ententes de Scott Gomez et de Tomas Kaberle, vient de se voir retourner l'ascenseur par les Flames.

On connaît peu René Bourque. Il faudra donc attendre avant de se forger un jugement. À première vue, il est sûrement le type de joueur qui peut convenir à une petite équipe comme le Canadien. Néanmoins, la transaction n'était vieille que de quelques minutes qu'on apprenait que sa carrière est marquée par un manque de constance. Il peut disparaître du radar durant trois ou quatre matchs, puis rebondir avec une ou deux bonnes performances. Il me semble qu'on a déjà connu un bonhomme du même genre à Montréal.

On dit de lui qu'il est inévitablement un joueur digne de jouer au sein des deux premiers trios quand il joue bien. Quand il n'est pas dans son assiette, il a à peine l'efficacité d'un membre de troisième trio.

On ne le jugera pas trop vite. Laissons-lui le temps de nous montrer de quel bois il se chauffe. Chose certaine, il arrive trop tard pour permettre à sa nouvelle équipe de participer aux séries. Il y parviendra peut-être l'an prochain si d'autres bonnes décisions sont prises d'ici-là.