MONTRÉAL – Au printemps 2007, un petit, très petit attaquant d’à peine 143 livres s’est présenté aux évaluations tenues par le Canadien avant le repêchage. Au final, l’état-major du Tricolore a déterminé qu’il ne ferait tout simplement pas le poids dans la LNH.

Ainsi, l’organisation montréalaise a sauté son tour quelques jours plus tard et ce sont plutôt les Sabres de Buffalo qui ont décidé d’investir un choix de sixième ronde sur ce frêle, mais talentueux joueur des Olympiques de Gatineau, Paul Byron. 

Dix ans plus tard, les hasards du hockey ont fait que Byron évolue maintenant avec le Canadien et il connaît la meilleure saison de sa carrière alors qu’il s’approche du plateau des 20 buts. Même s’il a préféré s’abstenir sur lui en 2007, Trevor Timmins s’est assuré de le féliciter pour le chemin qu’il a parcouru.

« Je lui ai dit qu’il a une tonne de crédit d’avoir eu autant de caractère pour se rendre dans la LNH », a confié Timmins, le vice-président principal des opérations hockey. 

« Il avait l’air d’un joueur pee-wee comparativement aux autres, il était si chétif. Il n’est pas tellement plus gros aujourd’hui, mais il a trouvé une façon d’atteindre son but avec de la détermination et du caractère. Je suis très content pour lui », a-t-il ajouté.

Byron n’a pas oublié ce souvenir. Il se rappelle notamment que Steve Bégin avait pris le temps de discuter avec lui.

« C’était vraiment spécial de rentrer dans l’univers du Canadien. Tu vois tous les noms et les chandails des grands joueurs, c’était vraiment une très belle expérience pour moi », a indiqué Byron quand on lui a demandé de remonter dans le temps.

Certes, le marchand de vitesse ressent de la fierté quand Timmins lui lève son chapeau pour souligner ses accomplissements. Cependant, Byron est habité par cette confiance fascinante – sans une once d’arrogance - de l’athlète qui a toujours cru qu’il appartenait à ce monde.

Paul ByronSon ami et ancien capitaine avec les Olympiques, Jean-Philip Chabot, n’a pas eu besoin de beaucoup de temps pour faire ce constat.

« C’est certain que quand il est arrivé, j’étais comme 99% des personnes dans le monde du hockey, je me demandais s’il était à sa place. Mais mon opinion a changé dès que je l’ai vu patiner », a raconté Chabot au RDS.ca.

« Il a beaucoup de caractère, ce n’est pas le plus grand ni le plus gros, mais ce sont des choses qui vont lui passer 100 pieds par-dessus la tête. Pour lui, il mesure six pieds cinq pouces », a expliqué celui qui s’implique comme entraîneur tout en poursuivant sa carrière.

Cette attitude n’est pas étrangère à son milieu familial. Byron a été élevé dans une famille modeste dans laquelle les parents ont travaillé très fort.

 « J’ai toujours joué à des sports physiques comme la crosse et le rugby. Je n’ai jamais eu peur des contacts. Je ne sais pas pourquoi des gens m’ont dit que je ne pourrais pas réussir parce que les autres sont plus grands. Je n’ai jamais craint de me frotter à eux. Dans ma tête, j’ai toujours pensé que j’avais ma place », a noté le père d’une fille et un garçon.

« Même si j’étais petit, mon père m’a toujours enseigné à être un joueur fort sur la patinoire à l’image du style de son équipe préférée, les Bruins », a poursuivi celui qui a d’ailleurs marqué trois buts, dont deux gagnants, contre Boston cette saison. 

Le patineur originaire d’Ottawa avait beau croire en ses moyens, mais il lui fallait devenir un professionnel. C’est là que l’entraîneur Benoit Groulx est entré en scène. Après s’être laissé convaincre par ce hockeyeur venant du Junior B, Groulx s’est attelé à lui inculquer le nécessaire.

Dans ce milieu, ça se passe rarement dans la gentillesse et l’harmonie, mais le principal demeure de faire passer le message.

« Je peux confirmer que Benoit a été tough avec lui surtout au début quand il est arrivé. Mais ç’a fait en sorte qu’il a aidé Paul pour son éthique de travail pour qu’elle soit constante. Il lui doit une fière chandelle notamment pour ça », a témoigné Chabot qui communique encore régulièrement le numéro 41 du CH.

Byron admet que ce traitement était nécessaire.

« Oui, parce que tu es juste un kid quand tu es dans le junior. Tu penses que tu es le meilleur au monde et que tu pourras percer juste avec ton talent. Mais il m’a toujours rappelé qu’il faut travailler et exécuter les petits détails pour avoir du succès dans le hockey professionnel », a constaté l’auteur de 30 buts et 23 aides en 131 parties avec le Canadien.

Un mélange de vitesse et d’intelligence

Après un développement de plus de 200 matchs dans la Ligue américaine de hockey, Byron s’est taillé un rôle dans le circuit Bettman. En raison de son physique, sa mission aurait probablement échoué n’eût été de sa vitesse qui se situe parmi l’élite. 

Mais ses atouts vont au-delà de ça. On ne parvient pas à marquer 19 buts, dont 18 à égalité numérique (34e rang dans la LNH) et 5 buts gagnants (39e rang) uniquement avec de la rapidité.

« Il a un excellent sens du hockey. Aujourd’hui, le jeu est surtout basé sur les habiletés et la vitesse », a reconnu Timmins qui a tenu à raconter l’histoire sur Byron alors qu’on lui parlait d’un autre joueur.

Paul ByronDurant ses trois saisons avec Byron à Gatineau, Chabot a découvert son arsenal. Il n’était donc pas si étonné de le voir bien se débrouiller ailleurs que sur les troisième ou quatrième trios.  

« Son QI hockey est très élevé, il peut s’adapter autant à jouer avec Alexander Radulov sur le premier trio qu’avec Brian Flynn sur la quatrième unité », a confirmé Chabot qui croit que Byron pourra encore raffiner son jeu quelque peu.

Sauf que personne, même Marc Bergevin, n’aurait osé avancer que le petit attaquant qu’il a réclamé au ballottage des Flames de Calgary allait générer autant d’attaque pour sa troupe. Sans Byron, il faudrait soustraire plusieurs points précieux au Canadien au classement.

« Il n’était pas supposé marquer autant de buts à ce moment-ci de la saison. Mais c’est le genre de joueur qui va en prendre plus lorsque l’entraîneur lui en donne plus », a vanté Chabot qui est un heureux papa depuis un mois.

Prêt à saisir les occasions, Byron ne s’imaginait tout de même pas s’établir comme le deuxième buteur du Tricolore derrière Max Pacioretty.

« C’est une grosse surprise, c’est certain. J’ai travaillé très fort cet été pour développer l’attaque dans mon jeu. Ça va  bien pour moi maintenant et je veux continuer comme ça », a admis Byron qui serait récompensé de belle manière en touchant la cible au moins une autre fois pour atteindre le nombre 20. 

« C’est un gros plateau, c’est vrai. Peu de joueurs s’y rendent. J’essaie de ne pas y penser, je me concentre sur ce que je dois accomplir », a conclu Byron qui est parvenu à confondre une multitude de sceptiques – incluant Timmins et 28 autres équipes de la LNH - en agissant ainsi.