MONTRÉAL – Au repêchage de la LNH, en 2010 à Los Angeles, le Canadien a déniché une perle rare juste avant la conclusion de la cinquième ronde en sélectionnant, aussi loin qu’au 147e rang, l’inarrêtable Brendan Gallagher.

Grâce à sa conviction, Gallagher s’est établi comme la surprise de ce repêchage. À preuve, il faut remonter jusqu'à tôt en deuxième ronde pour trouver un joueur qui a récolté plus de points que le choix de cinquième tour du Tricolore.

Par coïncidence, le club montréalais disposait du même rang de sélection quatre ans plus tard, à l’été 2014, lors de la séance tenue à Philadelphie. Cette fois, au 147e échelon, le Canadien a choisi d’attirer dans son organisation Daniel Audette, le fils de Donald, son dépisteur amateur du Québec et des Maritimes.

Bien sûr, il serait injuste d’exiger d’Audette une contribution éventuelle aussi étonnante que celle de Gallagher. Arrivé dans le dernier droit de sa quatrième saison dans la LHJMQ avec le Phoenix de Sherbrooke, le Québécois de 19 ans semble afficher des signes selon lesquels un nouveau défi lui serait bénéfique.

« De l’extérieur, il me donne l’impression qu’il a hâte de passer à autre chose. On dirait qu’il est déjà rendu ailleurs dans sa tête », a proposé un dépisteur amateur de la LNH sondé par le RDS.ca.

Daniel AudetteIl faut dire que l’évaluation d’Audette a été teintée par son langage corporel – trop souvent négatif – depuis plusieurs années. À ce propos, il assure qu’il a réalisé des progrès.

« J’ai mis beaucoup d’efforts là-dessus, ça fait longtemps que j’entends ces commentaires et je pense que ça progresse bien », a avancé le gaucher.

« Il s’est amélioré pour son langage corporel, il a progressé depuis son arrivée à 16 ans. C’est un compétiteur et, quand ça ne marchait pas par le passé, il canalisait un peu son énergie de manière négative. Nous, les entraîneurs et moi, avons moins à intervenir sur cet aspect », a déclaré Jocelyn Thibault, le directeur général du Phoenix.

Cependant, Audette n’a pas encore convaincu tous les observateurs du hockey à ce sujet.

« Son langage corporel ne l’a jamais aidé. Je ne peux pas croire qu’un entraîneur à un niveau supérieur puisse accepter ça », a commenté le recruteur d’une équipe de l’Association Ouest qui rappelle que son talent est indéniable.

L’hypothèse d’un changement d’air salutaire semble pertinente surtout en tenant compte du fait que le Phoenix traverse une saison décevante par rapport aux attentes et qu’il évolue au sein de la même organisation depuis quatre ans.

Cependant, ça n’excuse pas pour autant le comportement d’Audette face à cette situation surtout que les équipes de la LNH recherchent des joueurs de caractère.

« Ça dénote à quelque part un manque de maturité », a interprété le recruteur en se fiant sur l’exemple de quelques autres jeunes joueurs plus affamés à cet âge.

« Il faut qu’il se mette dans la tête qu’à 19 ans, si tu veux être un joueur professionnel, c’est à toi de te démarquer même si ça ne marche pas comme tu veux », a ajouté le dépisteur oeuvrant surtout au Québec.

La réponse appartiendra au Canadien – et elle sera basée sur le comportement d’Audette –, mais il pourrait bien aboutir dans un nouvel environnement la saison prochaine en faisant le saut dans la Ligue américaine de hockey.

« Ça aide chaque fois que tu montes d’un niveau, je serais entouré de meneurs et de bons entraîneurs à St. John’s », a répondu Audette quant à cette possibilité.

En tant que DG du Phoenix, Thibault a fait preuve de prudence sur ce dossier tout en admettant que ça semble être le choix approprié.

« Ce n’est pas à moi de me prononcer là-dessus parce que je ne vais pas statuer sur cette décision. Est-ce que faire le saut chez les professionnels après quatre saisons dans le junior serait une bonne chose pour lui? La réponse est probablement oui pour qu’il puisse monter à un autre niveau de hockey. Ça serait une progression normale dans son chemin, mais on verra quel sera le choix du CH », a réagi l’ancien gardien.

Encouragé par le talent d’Audette, le recruteur considère qu’il en détient assez pour se démarquer à cette étape névralgique. Il évoque une comparaison entre le doué Charles Hudon et le travaillant Jérémy Grégoire pour démontrer que le désir contient parfois ses limites alors que les habiletés naturelles ne s’achètent pas.

Une progression remise en question

En 2015-2016, Audette a été limité à 41 rencontres (17 buts et 32 aides) en raison d’une blessure. Il admet que cette embûche est venue plomber ses efforts, mais il se considère comme un joueur mieux outillé pour gravir les prochains niveaux.

« Je pense que je me suis beaucoup amélioré dans le sens que je suis plus complet, j’ai travaillé très fort là-dessus. Je voulais aider l’équipe pas seulement offensivement », a exprimé le gaucher qui a maintenu une production par match très similaire à la saison dernière.

Audette, qui avoue connaître une saison parsemée de hauts et des bas, peut se réjouir de la vision de son DG.

« Il parvient à connaître une assez bonne saison même si celle de l’équipe est un peu difficile. Sa production offensive est quand même bonne. C’est vrai qu’il doit travailler sur sa constance, mais c’est rarement le point fort des jeunes joueurs », a évalué Thibault.

« Comme tous les joueurs juniors, il doit améliorer certaines choses, mais on est content de lui », a-t-il ajouté.

En excluant la constance pour se concentrer sur des facettes plus techniques de son jeu, Thibault ne cache pas que l’accent est placé sur sa prise de décisions. Comme plusieurs athlètes créatifs offensivement – certains penseront à des joueurs du Canadien –, il doit apprendre à bien doser son imagination en attaque.

« C’est correct d’essayer des jeux et de vouloir générer de l’attaque, mais il faut le faire au bon moment quand ils sont disponibles. Il doit déterminer sa marge de manœuvre et il deviendra plus responsable en possession de la rondelle », a émis celui qui a protégé le filet des Nordiques, de l’Avalanche, du Canadien, des Blackhawks, des Penguins et des Sabres.

Le rapport globlal ne sonne pas aussi positif de la bouche du recruteur.

« Ce n’est définitivement pas un manque de talent. Mais, pour la progression, je me demande s’il a vraiment amélioré son jeu à 17 ans par rapport à maintenant. J’avoue que je ne vois pas une grande maturité de plus sur son jeu d’ensemble. En fait, je ne trouve pas qu’il a autant évolué que d’autres jeunes du même âge », a-t-il laissé tomber.

Daniel AudetteLes ressources ne manquent pas autour d’Audette. En plus de l’entraîneur Stéphane Julien et de Thibault, il peut compter sur les conseils de son père et le suivi de Martin Lapointe, le directeur du développement chez le Canadien. 

Audette est loin de tout casser cette saison, mais il n’est quand même pas embourbé dans une courbe aussi inquiétante que l’action de Bombardier. À vrai dire, son talent laisse croire qu’il pourrait se faufiler jusqu’au but suprême.

« Oui, c’est possible (qu’il se rende dans la LNH), c’est entre ses mains. Pour y arriver, ça possède des dominances dans son jeu et c’est son cas avec son patin et ses aptitudes de passeur donc la réponse lui appartient », a affirmé Thibault.

Audette y est allé de son propre chef d’une révélation encourageante. Il reconnaît que le talent n’est pas l’unique ingrédient nécessaire pour percer.

Avec un profil comme le sien, le patineur de cinq pieds neuf pouces aurait peut-être gagné à emprunter le parcours universitaire américain qui confère plus de temps.

« On leur donne souvent quatre ans pour se développer alors que, dans son cas, il doit tout de suite aller dans la Ligue américaine la saison prochaine. Étant donné qu’il a du talent, tu te croises les doigts que les défauts actuels finissent par se corriger », a souhaité le dépisteur qui considère que le jeu d’Audette se concentre trop en périphérie.

Son cas ne se classe pas dans les causes perdues – qui sont inévitables au repêchage – et loin de là.

« Il ne faut pas oublier qu’il a été repêché en cinquième ronde. Ils sont rares ceux qui signent un contrat et qui s’illustrent dans la LNH. S’il avait été repêché 34e au total, on dirait qu’ils l’ont échappé », a rappelé le recruteur.