Comme ç'a toujours été le cas chaque fois où l’on s’est parlé, la voix de George Gillett était fort enjouée à l’autre bout du fil. D’entrée de jeu, l’ancien propriétaire du Canadien a expliqué qu’il n’avait malheureusement pas été capable d’assister en personne au match à Denver lundi dernier, mais qu’il avait eu la chance de discuter avec Trevor Timmins. Il s’est ensuite informé de son ancien club qu’il continue d’épier de son manoir à Vail, au Colorado. Puis quand on a commencé à jaser de Monsieur Jean Béliveau, sa voix s’est rapidement mise à trembler. Au bord des larmes, après quelques secondes de silence, l’Américain de 76 n’a pas caché que la nouvelle l’a terriblement ébranlé même s’il savait pertinemment que l’état de santé de Monsieur Béliveau s’était détérioré au cours des dernières semaines.

« À l’église dimanche dernier, j’ai prié pour lui et Gordie Howe, a-t-il expliqué un trémolo dans la voix. En vieillissant, on commence à perdre des amis. Mais je n’ai jamais perdu un ami plus gentil et plus humain, quelqu’un qui a posé autant de bons gestes pour les autres. »

Quand George Gillett a acheté le Canadien en janvier 2001, il avait fait ses devoirs et pensait savoir ce que cette équipe représentait pour la communauté. Quand il a rencontré Jean Béliveau, il a réalisé qu’il avait compris bien des choses sur le Tricolore, mais il n'avait toutefois aucune idée de la grandeur du personnage, autant en ce qui concernait sa légende et ses exploits, que son magnétisme, son charisme, son impact sur les amateurs et encore moins sa grandeur d'âme. « Je me souviendrai toujours de cette soirée. La famille Gillett venait d’acheter le Canadien de Montréal et on célébrait dans un restaurant de la ville. On était assis, un verre de vin à la main, quand j’ai vu un grand homme traverser la pièce avec élégance. J’ai tout de suite reconnu Jean Béliveau. Nous l’avons suivi à sa table pour faire la connaissance de son épouse Élise et à compter de cet instant, ils ont toujours été là pour nous aider ou nous expliquer l’histoire de cette fabuleuse équipe. C’est incroyable ce qu’ils ont fait pour nous car ils nous ont littéralement pris sous leurs ailes. Il est ni plus ni moins devenu un mentor pour moi et mon fils Foster qui était beaucoup plus souvent à Montréal. »

Mercredi après-midi, George Gillett a contacté l’épouse de monsieur Béliveau pour lui exprimer personnellement ses plus sincères condoléances au nom de sa famille. « C’est le plus beau couple que j’ai vu dans toute ma vie. Elle était toujours là pour lui et vice-versa. Élyse est une femme solide et positive, comme lui. »

L’ancien propriétaire du Canadien, qui a fait une petite fortune en achetant cette équipe pour la revendre au consortium mené par Geoff Molson en 2009, ne sait pas s’il pourra être à Montréal la semaine prochaine pour rendre un dernier hommage à monsieur Béliveau. « Ce n’est plus mon équipe. C’est un moment important pour la famille Béliveau et la famille Molson et si je vais à Montréal, vous verrez ma vieille face bouffie, mais dans le fond de l’église. »