Alors que le Canadien de Montréal s’embourbe dans sa première série de défaites de la saison, une grande part du blâme est dirigée vers les performances devant le filet du CH pendant l’absence prolongée de Carey Price. Après un départ étincelant en ce début de campagne, le jeu de Mike Condon a perdu de son éclat. Par moments, il a semblé fatigué et les facettes de son jeu présentant des faiblesses au début de la saison ont fini par être exploitées.

Les performances de Condon, depuis que Price est tombé au combat pour une deuxième fois, sont moins inspirantes que la première fois où il a pris la relève. Lors de la seconde absence de Price, il a maintenu un taux d’arrêts de ,908, ce qui coïncide avec la panne offensive que connaît le Tricolore, cela conduisant à une fiche de 2-3-1 (2-4-1 en incluant le seul départ de Dustin Tokarski).

Le taux d’arrêts de ,911 que Condon a maintenu cette saison est maintenant en deçà de la moyenne du circuit pour les gardiens de but, celle-ci étant actuellement de ,915, et bien en deçà du taux d’arrêts de ,934 que Price a su maintenir depuis l’année dernière.

Cependant, en observant Condon, je ne suis pas encore prêt à affirmer que ses performances sont moins bonnes que celles de la moyenne des gardiens de la LNH. Nous avons préalablement relevé le fait que le Canadien accorde davantage de chances de marquer à l’adversaire que la majorité des équipes de la LNH,  mais les chances de marquer se veulent des statistiques pertinentes pour les joueurs et non pour les gardiens. Cela s’explique simplement, les chances de marquer incluent toutes les tentatives de tir. Bien que les tentatives de tirs contre un gardien augmentent sa charge de travail, un tir décoché depuis l’enclave et ratant le filet n’a pas réellement d’impact sur sa performance.

SportlogiqLe premier graphique illustre les pourcentages de tentatives de tirs qui trouvent le fond du filet dépendamment de leur provenance. Pour bien évaluer le travail de Condon, il sera nécessaire d’analyser ces pourcentages en ne prenant en compte que les tirs atteignant son filet, ce qui sera fait un peu plus loin.

Comme vous pouvez le constater, les tirs décochés depuis le bas de l’enclave ont deux fois plus de chance de trouver le fond du filet que ceux décochés depuis le haut de l’enclave. D'autre part, les tirs décochés en périphérie ne sont pas payants.

Une problématique chez le Canadien est qu'une grande proportion des chances de marquer qu’il accorde atteint le filet, déjà que le CH accorde plus de chances de marquer que la moyenne des équipes de la LNH. Cela signifie que leurs gardiens doivent arrêter davantage de tirs de qualité que ceux des autres formations.

La moyenne de taux d’arrêts des gardiens de la LNH est de ,915, mais comme les équipes ont des systèmes de jeu différents, chaque équipe doit s’attendre à ce que l’efficacité de ses gardiens soit grandement influencée par ce système de jeu.

Ainsi, pour déterminer le taux d’arrêts auquel on peut s’attendre de Condon, nous devons regarder d’où les tirs au but qu'il a reçus proviennent. Plus précisément, Condon a reçu 438 tirs en 18 rencontres (1028 minutes), ce qui est un nombre assez bas se situant à 25,6 tirs au but pour chaque tranche de 60 minutes de jeu. Cependant, la provenance de ces tirs a une grande incidence et il s’avère que Condon a dû accomplir un travail excessivement difficile à cet égard.

SportlogiqLa majorité des lancers que Condon a dû affronter proviennent de l’endroit le plus dangereux, 21,1 % des tirs décochés contre lui étant des chances de marquer de grande qualité. Cela n’est pas chose commune chez les gardiens du circuit, rendant le rôle de gardien partant que Condon doit assumer encore plus ardu, ce que les gens ne réalisent pas.

Sachant le nombre de tirs auquel Condon a fait face, leurs provenances et les taux de conversion de tirs en buts pour chaque zone, nous pouvons désormais évaluer le taux d’arrêts auquel l’on peut s’attendre de la part de Condon.

Cette analyse ne sera pas parfaite, car nous ne prenons pas en considération la vélocité ou l’identité du joueur décochant le tir, il y a une différence entre un lancer d'Alex Ovechkin et de Jay Beagle. En se basant uniquement sur la provenance des lancers, le gardien moyen de la LNH, face à la même charge de travail que Condon, aurait maintenu un taux d’arrêts de ,905, ce qui correspond à 41,6 buts accordés. Condon a accordé 39 buts et il a maintenu un taux d’arrêts de ,911. Bien que ces chiffres ne soient pas grandement supérieurs à la moyenne de la LNH, cet écart demeure important.

Si les tirs décochés contre le filet du CH avaient la même provenance que celle de la moyenne des équipes de la LNH, on pourrait s’attendre à un taux d’arrêts de la part de Condon supérieur de ,006 à la moyenne de la ligue, soit de ,921. Cela est une hausse de ,010 sur son taux d’arrêts actuel.

Bien que Condon n’ait pas été une forteresse pour le Canadien, il n’est pas le grand responsable des dernières défaites, même si les apparences semblent illustrer l’inverse. Cette analyse démontre également le niveau d’excellence de Price. Les tirs décochés contre Price n’ont pas exactement la même provenance, mais cela demeure tout de même similaire. Ainsi, il est impressionnant qu’il puisse maintenir un taux d’arrêts de ,934 depuis la saison dernière. Il n’a pas lieu de se demander pourquoi il a remporté autant de trophées en juin dernier.

Si le Canadien veut changer la tournure des choses d’ici le retour de Price, il devra réduire le nombre de lancers qu’il accorde depuis le bas de l’enclave, il n’y a pas d’autre moyen d’y parvenir. La principale raison expliquant que le CH accorde autant de chances de marquer de grande qualité est la même que pour la saison dernière, les dégagements le long des rampes créent trop de revirements lors des sorties de zone, mais rien n’indique à l’instant qu’il y aura des changements à cet égard.