Le Canadien a ajouté un nouveau chapitre à un feuilleton déjà fort bien garni au cours de la dernière semaine. Si la performance plus qu’honorable contre les Penguins, à Pittsburgh, avait déjà donné une satisfaction certaine à l’entraîneur Michel Therrien, la remontée spectaculaire contre Boston s’est avérée une source immense de fierté pour cette équipe qui refuse d’abandonner. Le Tricolore se retrouve donc encore et toujours au cœur d’une lutte pour le premier rang de sa section et ne peut faire autrement que viser dorénavant beaucoup plus qu’une simple participation aux séries : il faut dorénavant parler de l’espoir d’aller plus loin que la première ronde.

Cela dit, il ne faudrait pas perdre de vue que cette équipe est d’abord et avant tout en mode « reconstruction » et qu’elle a déjà fait le choix d’alimenter celle-ci principalement par la base. Or, c’est à la ligne bleue que les plus beaux espoirs de l’organisation se retrouvent et le rappel de Nathan Beaulieu se veut ni plus ni moins que la poursuite du processus d’audition amorcé depuis la blessure survenue à Raphaël Diaz. Greg Pateryn a d’abord eu sa chance et a prouvé qu’il n’était pas prêt pour la LNH. Jarred Tinordi a été plus convaincant, mais il reste encore beaucoup à polir. Voilà que Beaulieu obtient aussi une chance, lui qui est assurément le plus doué des trois, surtout sur le plan de l’attaque.

Jean-Jacques Daigneault, l’adjoint à Michel Therrien et responsable des défenseurs, nous disait en entrevue mercredi à Boston que la situation étonnante du Canadien, au classement de cette courte saison, ne saurait faire dévier l’équipe de son plan maître. En substance, on tente de naviguer le mieux possible entre deux tendances qui s’opposent : celle d’y aller lentement mais sûrement avec les jeunes tout en leur donnant la chance de venir goûter à l’engouement de cette course irrésistible vers les séries. À n’en pas douter, les choses sont beaucoup plus amusantes à Montréal qu’à Hamilton, où les Bulldogs croupissent dans les bas-fonds du classement.

N’en déplaise à Tomas Kaberle et Yannick Weber (qui méritent quand même une note de « A » pour leur rectitude devant une aussi longue inactivité), la direction de l’équipe sait déjà ce dont ils sont capables et il est clair qu’ils ne figurent pas dans les plans d’avenir, même rapprochés. Ce qui est complètement l’inverse pour les trois jeunes rappelés jusqu’ici.

« On ne veut surtout pas risquer de laisser un de nos beaux espoirs s’enliser dans les mineures », nous confiait Jean-Jacques Daigneault, qui a déjà vécu une situation semblable par le passé avec les Rangers, dans le cas de Corey Potter, qui commence à peine à prendre sa place dans la LNH, à 29 ans, avec les Oilers d’Edmonton.

Nathan Beaulieu s’amène donc à Montréal dans un contexte fort intéressant. Les trois prochains adversaires du Canadien battent de l’aile (Rangers, Hurricanes et Flyers) et les Jets de Winnipeg, même s’ils occupent le premier rang de la section Sud-Est, ne représentent pas pour autant la plus grande menace. Seuls les Bruins, samedi prochain, se veulent un défi particulier pour la troupe de Michel Therrien. Le jeune homme aura donc l’occasion d’évoluer avec une pression amoindrie, d’autant plus que quatre de ces cinq rencontres en huit soirs, seront disputées à Montréal.

Les Penguins à une autre étape

Les récentes démarches des Penguins de Pittsburgh ont créé de fortes attentes chez les journalistes et partisans des équipes qui les pourchassent. Il fallait voir tout le mouvement que créait la perspective de l’arrivée de Jarome Iginla à Boston, sur la galerie de presse mercredi dernier, pour en avoir la preuve. À Montréal, on ne cesse de demander si Marc Bergevin pourra lui aussi combler les lacunes de sa formation avec des joueurs rendus disponibles par les équipes qui seront exclues des séries.

La vérité, mes amis, c’est que les Penguins en sont présentement à une étape de leur cheminement où ils pouvaient se permettre de telles démarches, par rapport à d’autres formations comme le Canadien. Crosby, Malkin, Neal, Kunitz et Sutter sont tous sous contrat pour au moins une autre saison et ils représentent un noyau encore exceptionnel pour 2013-2014. Cinq de leurs défenseurs réguliers sont aussi dans la même situation. Morrow, Iginla et Murray, acquis au cours de la dernière semaine, seront libres comme l’air cet été et n’ont donc aucun impact sur la masse salariale de 2013-2014 des Penguins. Il y aura donc de l’espace, par exemple, pour signer un nouveau contrat avec Pascal Dupuis, à moins qu’il se voie offrir la lune, ailleurs.

Bref, réalistement, les Penguins peuvent encore viser le sommet la saison prochaine, uniquement avec les joueurs qui sont sous contrat avec eux. Or, en cette ère où il est normal de tout miser quand les planètes s’alignent parfaitement vers une grande conquête et même peut-être une deuxième, on est beaucoup plus enclin à sacrifier les jeunes joueurs sur qui on espérait compter ultérieurement.

Le Canadien n’en est certainement pas à cette étape.