On observe l'attitude de Carey Price, sur la glace comme à l'extérieur, et il y a lieu d'être impressionné. À l'extérieur de la patinoire notamment, puisque les plus grandes inquiétudes à son sujet venaient de là avant que Stéphane Waite ne s'amène pour travailler avec lui.

C'était une période durant laquelle Price semblait malheureux comme les pierres, quand il longeait les murs pour ne pas avoir à affronter les gens et qu'il faisait de son épicerie hebdomadaire une véritable corvée.

Marc Bergevin avait été interpellé par les questions insistantes des journalistes dès son premier point de presse à titre de directeur général. Peut-être était-il déjà au courant de la situation inquiétante de Price? Peut-être pas? Néanmoins, les questions répétées à son sujet semblaient si sérieuses, si inquiétantes, qu'elles faisaient presque oublier que l'équipe venait de terminer la saison au dernier rang dans l'Est et de rater une participation aux séries à la suite d'une embarrassante récolte de 78 points. Il y avait plein de nids de poule dans cette formation et le comportement général de Price, considéré comme l'épine dorsale de l'organisation, n'annonçait rien de positif pour l'avenir.

Avec le nouveau directeur général, il avait été beaucoup question du rendement décevant de Price avec son entraîneur de l'époque, Pierre Groulx. On avait carrément demandé à Bergevin si c'était dans ses intentions de le remercier. C'était un peu direct comme approche, mais l'affaire était lancée.

On ne reviendra pas sur la suite des choses, notamment sur le départ de Groulx et l'arrivée de Waite, mais on n'a pas tardé à remarquer une différence marquée chez Price. Avant, le gardien semblait le boss de Groulx. Aujourd'hui, Price sait parfaitement qui est l'entraîneur. Grosse nuance.

Waite n'a jamais voulu accepter le crédit qui lui revenait pour la transformation qui a suivi. Il a toujours mentionné que c'est une ou deux années de plus dans la vie de Price qui lui a procuré la maturité nécessaire pour finalement exercer sur l'équipe l'impact souhaité. On peut donc dire que la maturité de l'athlète et l'habile peaufinage de son talent ont contribué à l'élever au rang des grandes vedettes de la ligue.

Parlons-en justement des joueurs d'impact du circuit qu'on a vus durant le récent week-end du match des étoiles. Parmi ses collègues des 29 autres organisations de la ligue, tous vêtus en mou pour le premier l'exercice du matin, Price, en veston cravate, avait fière allure. Souriant, disponible, il n'a jamais si bien paru dans sa peau. Il était là pour représenter son équipe sur la glace. Par son attitude générale, il s'est comporté en ambassadeur du Canadien.

Ça, c'est le Carey Price nouveau, même si on avait déjà remarqué un changement appréciable dans son comportement l'an dernier. Il est généreusement présent dans le vestiaire pour offrir ses commentaires. Il est patient, poli, très en contrôle. Price, on le sait maintenant, c'est du solide. Il marche la tête haute en projetant une image de force tranquille. Il a les deux pieds solidement sur terre. Plus que jamais, il représente l'image du Canadien.

Il est fidèle à l'entreprise dans le sens où il se rallie aux décisions qui le concernent et qui sont prises par la haute direction. Quand on a remercié Groulx, on savait qu'il avait une bonne relation avec lui et que le changement ne lui plairait peut-être pas. On appréhendait sa réaction. C'était un peu normal puisqu'il voyait partir un allié au profit d'un autre entraîneur dont il savait peu de choses. Or, il n'a rien dit.

Il aurait pu faire montre d'une certaine exaspération quand on a échangé Peter Budaj, un coéquipier et un ami personnel. Les gardiens numéro un n'entretiennent pas toujours ce genre de relation avec ceux qui partagent le boulot avec eux. Certains ambitionnent de prendre leur place, d'autres se plaignent de ne pas jouer suffisamment. Price savait que son adjoint était travailleur et honnête. Il savait que Budaj lui voulait du bien et qu'il ferait tout pour être fin prêt quand on ferait appel à ses services. Donc, on aurait pu s'attendre à ce qu'il encaisse mal la nouvelle de son départ. Encore là, rien n'y a paru.

Price est heureux. Marié, il mène une vie rangée et sans histoire, comme il l'avait toujours souhaité. On est loin de la mauvaise influence que certains coéquipiers turbulents de l'époque, dont les frères Kostitsyn qui s'étaient liés d'amitié avec un homme qui vient d'écoper d'une sentence de six ans de prison, ont exercée sur lui à son arrivée à Montréal. Pas facile pour de jeunes joueurs déjà riches à 20 ans de débarquer dans une ville comme Montréal tout en conservant une tête solide sur les épaules. Price a su éviter les récifs les plus dangereux.

Sa carrière est aujourd'hui florissante au sein d'une équipe qui gagne sa part de matchs, surtout grâce à lui, faut-il le dire. Il a atteint un statut qu'il fait de lui un haut gradé dans la Ligue nationale.

Malgré tout, une certaine faction du public ne reconnaît pas toujours le joyau susceptible de pouvoir mener le Canadien aux grands honneurs un jour. Dans la défaite, ses détracteurs sont impitoyables. Dès qu'il accorde un but, certains lui prédisent le pire. On ignore si Price lit ce qu'on écrit à son sujet dans les médias sociaux et à la suite de certaines chroniques, mais on imagine qu'il a mieux à faire de ses journées.

Heureusement, les chants de « Carey, Carey, Carey », qui résonnent dans le Centre Bell à la suite de ses arrêts spectaculaires, parviennent à enterrer le mécontentement de ceux qui se prétendent connaisseurs.

En Price, le Canadien n'a pas seulement un gardien qui repousse des rondelles. Il a un jeune homme bien qui s'implique de plus en plus dans la communauté et dont la personnalité rejaillit sur l'organisation.

Chaque fois qu'il est nommé la première étoile d'un match, il pose un geste qu'on ne voit nulle part ailleurs. Il regarde où sont assis les enfants derrière la baie vitrée, s'approche lentement et leur lance la rondelle, non sans avoir averti les adultes autour d'eux que ce cadeau n'est pas pour eux. Ces trois rondelles tombent toujours entre les mains des enfants. Un  geste d'une grande délicatesse.

Parlant de Budaj…

Puisqu'il est question de Peter Budaj, j'ai été agréablement étonné de lire quelques-unes de ses remarques dans la dernière édition de Hockey Le Magazine.

Je m'attendais à lire les propos d'un athlète déprimé après avoir quitté le Canadien pour se retrouver au sein d'une mauvaise équipe de la Ligue américaine, dans les Maritimes. Il s'est plutôt montré élogieux à l'endroit de l'organisation entière du Canadien et de Price en particulier.

Budaj a même demandé au journaliste de lui accorder les dernières lignes de son article afin qu'il puisse s'adresser aux partisans du Canadien. Çe se lisait sensiblement comme suit: « J'aimerais vous dire merci beaucoup. Vous m'avez traité de belle façon tout au long de mes trois saisons à Montréal. Vous, les partisans, donniez toujours le meilleur de vous-mêmes et moi, je n'étais pas toujours à mon meilleur. Par contre, je veux que vous sachiez que j'ai toujours travaillé fort pour vous rendre joyeux, fiers et excités de venir au Centre Bell. J'espère avoir la chance de revenir jouer dans votre édifice un jour. »

On ne voit pas cela tous les jours un athlète rejeté par une équipe et qui réagit de cette façon. C'est à l'image de ce que Budaj a toujours démontré durant son stage avec le Canadien.

Des nouvelles d'Albert

Albert Ladouceur, qui est affligé d'un cancer qu'on dit incurable, continue d'étonner la confrérie par sa détermination et son ardent désir de défier la maladie. Auteur d'un intéressant ouvrage « Déjoué par le cancer » durant les premiers mois de sa bataille, voilà qu'il récidive avec un bouquin destiné aux enfants de 9 à 13 ans: « Raconte-moi les Nordiques » qui sera sous presse en mars.

La meilleure façon d'éloigner ou de retarder la progression d'un cancer n'est-elle pas de garder son esprit très occupé? Albert en fait la démonstration d'une façon impressionnante.