J’aimais beaucoup Jiri Sekac. J’aimais sa vitesse. J’aimais son potentiel offensif. J’aimais sa fougue autant lorsqu’il se portait à l’attaque que lorsqu’il effectuait des replis défensifs efficaces.

Et attention! Quand je parle de fougue, je ne parle pas ici de jeu physique et du fait que Sekac brassait rondement ses adversaires. Pas le moindrement. Même que sur ce point, le Canadien obtient en Devante Smith-Pelly un joueur qui offrira beaucoup plus que Sekac sur l’aspect physique du jeu.

« J'ai eu beaucoup de plaisir à Montréal »

Quand je parle de la fougue de Sekac, je parle de son ardeur au jeu. Une ardeur qui, à mes yeux, aurait donné des dividendes au Canadien à un moment donné.

L’ennui, et il est de taille, c’est qu’on commençait à se demander quand au juste ce moment allait arriver. Et s’il allait arriver.

Joueur très prometteur – encore une fois à mes yeux – Sekac n’avait pas marqué à ses 21 derniers matchs, séquence au cours de laquelle il n’a récolté que deux passes. C’est assez ordinaire, on en conviendra.

Comme plusieurs, j’ai dénoncé le fait que Sekac n’obtenait peut-être pas le temps de qualité qu’il aurait mérité pour l’aider à secouer sa torpeur offensive. Si Dale Weise – et tout le mérite lui revient – a su tirer profit des matchs qu’il a obtenus à la droite de Max Pacioretty et David Desharnais, il me semble que Sekac aurait pu en faire autant.

On ne le saura jamais.

Car si Sekac débloque et atteint son potentiel offensif, c’est maintenant dans l’uniforme des Ducks d’Anaheim qu’il le fera.

L’état-major du Canadien et les partisans du club doivent-ils maintenant retenir leur souffle en craignant que Sekac, une fois à Anaheim, imite John LeClair lorsque le Tricolore l’a largué aux Flyers pour mousser ses chances d’obtenir Mark Recchi?

Je ne crois pas non. J’ai beau aimer Sekac et les qualités qu’il a démontrées au fil de son séjour, trop court peut-être, à Montréal. Mais comme me le rappelaient régulièrement les dépisteurs professionnels croisés sur la galerie de presse du Centre Bell à qui je vantais les mérites du Tchèque comme si je l’avais moi-même repêché, Sekac est un bon joueur, il est rapide, il a du potentiel, mais il n’a pas les mains d’un marqueur prolifique.

Les prochaines semaines, prochains mois, prochaines saisons le détermineront. Car il est important d’insister sur ce point, ce n’est pas à court ou moyen terme qu’une transaction impliquant deux jeunes joueurs de 22 ans s’analyse, c’est à long terme.

En passant, si un ou deux partisans du Canadien craignaient le même genre d’explosion offensive lorsque Rene Bourque a été délivré de ses souffrances par Marc Bergevin lorsqu’il l’a envoyé des Bulldogs d’Hamilton à un des meilleurs clubs de la LNH Anaheim, ils seront sans doute soulagés d’apprendre que d’explosion il n’y a pas eu. En 29 rencontres avec les Ducks, Bourque ne revendique que deux buts et huit points. Le même genre de statistiques décevantes qu’il affichait à Montréal.

Sous-utilisé?

Jiri Sekac n’a pas eu beaucoup d’occasions de se faire valoir avec les meilleurs attaquants du Canadien. C’est vrai. Mais il n’a pas su profiter des rares occasions qu’il a obtenues. Et même lorsqu’il était utilisé au sein d’un troisième, voire d’un quatrième trio, il aurait dû décupler les efforts pour s’assurer d’en donner un peu à son coach pour le convaincre du bien fonder de le faire jouer davantage.

Est-ce que Michel Therrien était prêt à se montrer généreux à l’endroit de Sekac?

La question mérite d’être posée. Depuis le temps que je côtoie Michel Therrien, il est clair à mes yeux que Jiri Sekac n’est pas le genre de joueur qui profitera de largesses de sa part.

Ça ne veut pas dire que Therrien détestait Sekac pour autant. Et qu’il faisait exprès pour le priver de temps d’utilisation de qualité. De telles prétentions seraient absurdes compte tenu du fait qu’un coach, quel qu’il soit et même si son équipe est avantageusement installée au classement général, tient à gagner le plus souvent possible. Ainsi donc à prendre tous les moyens possibles pour y arriver.

Cela dit, Michel Therrien se montrait peut-être plus exigeant à l’endroit de Sekac qu’à l’endroit des Weise, Prust et autres joueurs d’énergie que le coach du Canadien aime bien récompenser quand ces joueurs lui donnent ce qu’il attend d’eux.

Et comme Sekac ne lui en donnait pas beaucoup, c’était pleinement son droit d’être chiches sur les récompenses.

Pourquoi seulement 50 matchs?

Cela dit, après seulement 50 matchs, il me semble que le Canadien largue un joueur avec beaucoup de potentiel un brin ou deux trop vite. Surtout que le Tricolore avait fait des pieds et des mains pour s’assurer de le mettre sous contrat alors qu’au moins une dizaine d’équipes de la LNH le courtisaient afin qu’il fasse le grand saut de la KHL à la LNH.

Sekac voulait qu'on respecte les promesses faites

Est-ce que d’autres facteurs pourraient expliquer cette impatience affichée par le Tricolore à l’endroit de Sekac? Plusieurs rumeurs laissent entendre que les liens pourtant étroits liant Tomas Plekanec à Jiri Sekac à son arrivée à Montréal s’étaient étiolés au fil des derniers mois. Je n’ai pas d’informations qui me permettent de confirmer ces rumeurs. Même qu’elles atténuent leurs ardeurs un brin ou deux.

Ce qui est établi toutefois, c’est que Sekac, comme tout célibataire de 22 ans, profitant d’un statut de joueur du Canadien en prime, jouissait, à Montréal, d’une vie trépidante hors de la patinoire. Ce qui est pleinement son droit.

Mais si le Canadien, du directeur général Marc Bergevin à l’entraineur-chef Michel Therrien en passant par quelques joueurs ont conseillé à Sekac de ralentir ses ardeurs à l’extérieur de la patinoire pour justement en offrir davantage sur la glace, il est possible que l’indifférence du jeune joueur à l’égard de ces conseils ait contribué à l’impatience de la direction du club à son égard. Et finalement à son départ.

On le saura peut-être un jour.

D’ici là, il sera intéressant de voir ce que Sekac deviendra comme joueur de hockey maintenant qu’il se retrouve avec les Ducks d’Anaheim.

Intéressant aussi, peut-être plus encore, de voir ce que Devante Smith-Pelly offrira en compensation au Canadien et à ses partisans d’ici la fin du calendrier régulier, une fois en séries éliminatoires, et lors des saisons à venir.