Sortie désolante!
Canadiens mercredi, 13 mai 2015. 05:30 vendredi, 13 déc. 2024. 22:49Après un match désolant au cours duquel ses coéquipiers ont été outrageusement dominés, contrés, paralysés par leurs adversaires du Lightning, Carey Price s’est tenu bien droit devant son casier et a pris le blâme pour l’élimination du Tricolore.
Debout à sa gauche, je n’en croyais pas mes oreilles. Victime de trois buts dans un revers bien plus cuisant que le pointage final de 4-1 ne l’indique – le 4e but a été marqué dans un filet désert – Price était visiblement affecté. Déçu. Malheureux même. Ce qui est normal.
De là à prendre le blâme parce que son équipe s’est couchée mardi soir en vacances, il y a un fossé bien trop large pour qu’on puisse même tenter de le traverser. C’est pourtant ce que Carey Price a fait.
« J’ai accordé trop de buts pour nous donner une chance de gagner. À l’exception de la deuxième partie, nous avons perdu des matchs serrés et si j’avais pu réaliser un arrêt de plus dans ces parties, les résultats auraient été différents », que Price a dit.
Quand je lui ai demandé s’il ne trouvait pas bien trop sévère le jugement lapidaire qu’il portait à l’égard de ses performances, Price a tourné la tête vers moi et a simplement répondu. « Je ne crois pas non. » Je pense qu’il a ajouté « c’est mon opinion », mais à ce moment-là je ne prenais plus de notes tant j’étais sidéré par le mea culpa de la pierre angulaire du Canadien.
Si l’on se fie aux statistiques, Ben Bishop a été meilleur que Carey Price dans cette série. Le gardien du Canadien a accordé 16 buts en six rencontres, dont une demi-douzaine dans le cadre de la dégelée encaissée lors du deuxième match. Ben Bishop, qui a été rappelé au banc pour lui éviter de porter seul l’odieux de la défaite de 6-2 aux mains du Canadien, n’en a accordé que dix.
Ce que ces statistiques ne disent pas toutefois, c’est que Bishop a accordé deux cadeaux au Canadien. Des sapins, des citrons, des ce que vous voudrez à Max Pacioretty et David Desharnais alors que les rondelles ont frappé sa mitaine avant de rebondir et de tomber derrière lui. Ce que ces statistiques ne disent pas, c’est à quel point l’attaque anémique du Canadien a facilité la tâche du gardien du Lightning. Et inversement, à quel point elle a compliqué celle de Carey Price.
P.K. Subban, à qui j’ai demandé s’il ne trouvait pas bien trop sévère l’autocritique de Carey Price, a volé au secours de son gardien. Remarquez qu’il était un peu tard puisque c’est sur la patinoire que Subban et ses coéquipiers auraient dû voler au secours de Price, mais bon : voici ce qu’il a dit.
« Notre rôle comme équipe est de faciliter le travail de Carey et non de le compliquer. Quand tu regardes le match ce soir, nous n’avons rien fait pour l’aider. Carey est le meilleur gardien de but au monde. Mais c’est aussi un être humain. Il nous a sortis de la misère très souvent cette saison. Mais si tu lui demandes de multiplier ces sauvetages, si nous lui demandons d’être sans faille simplement pour pallier nos lacunes, il y a des limites. Nous devions être bien meilleurs que nous l’avons été ce soir devant lui. Car ce soir, il n’y a personne dans ce vestiaire, moi le premier, qui peut prétendre avoir joué à la hauteur des attentes », a défilé P.K. Subban en guise de plaidoyer en défense de son gardien.
Un but de trop?
Carey Price a été victime de trois buts mardi soir dans le cadre du dernier match des séries, de la saison.
Sur le premier, Nikita Kucherov a profité d’une erreur bête de Tomas Plekanec qui a frappé une «fausse balle» en voulant dégager son territoire – il s’était rendu coupable quelques secondes plus tôt d’un dégagement refusé – pour faire dévier un tir-passe d’Ondrej Palat au-dessus de l’épaule du gardien du Canadien.
Aucune chance sur le jeu.
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Sur le deuxième, Steven Stamkos a déjoué Price avec un bon tir vif qui est passé au-dessus de la mitaine du gardien du Canadien. Est-ce qu’il aurait pu effectuer l’arrêt? Oui. Bien sûr. Mais le tir de Stamkos décoché du centre de zone défensive du Canadien était parfait. Et bien qu’il ait connu sa part d’ennui depuis le début des séries, Stamkos demeure l’un des marqueurs les plus redoutables de la LNH. Mais disons que Price se devait de l’arrêter.
Sur le troisième, l’attaque massive du Lightning n’a mis que 18 secondes pour orchestrer la poussée qui a permis de sortir la défensive du Canadien de ses patins et de marquer le but qui scellait pratiquement l’issue du match. Coupable Price sur ce but? Jamais de la vie.
Ses détracteurs iront-ils jusqu’à lui imputer la responsabilité du quatrième alors qu’il était debout au banc à la faveur d’un sixième attaquant?
Des fois, je me le demande.
Retirons au Lightning le but de Stamkos parce que Price aurait pu faire l’arrêt. Il n’en demeure pas moins que le Lightning en avait deux autres à sa fiche, contre un seul pour le Canadien. Ce n’est toujours pas assez pour gagner. Pas même assez pour pousser la rencontre en prolongation.
La réalité de Carey Price, et c’est malheureusement celle du Canadien, c’est que l’attaque de cette équipe est si timide qu’une fois en déficit d’un, voire de deux buts, ses chances de remontée sont minces. Oui le Canadien a complété des remontées victorieuses en début de saison. Mais dans le dernier droit de la saison, et dans les séries encore davantage, cette anémie offensive était pratiquement impossible à combler.
Unités spéciales
Pour y arriver, il aurait d’abord fallu que l’attaque massive soit autre chose que passive.
Blanchi à deux occasions mardi, le Canadien n’a pas même généré une occasion de marquer à cinq contre quatre. Du moins, je n’en ai pas relevée.
Le Canadien a donc terminé sa série contre Tampa avec un but en 16 occasions. Il s’était contenté d’un but en 20 occasions contre les Sénateurs.
Si je sais bien compter, ça donne deux buts en 36 occasions. Simonac! Le Canadien en a marqué le même nombre alors qu’il évoluait en désavantage numérique. Ce n’est pas normal...
Non seulement l’attaque massive n’a rien produit, mais les spécialistes des mandats défensifs en ont eu plein les bottines contre le Lightning a marqué hier son septième but en supériorité numérique en six matchs contre Montréal. Sept buts en 20 tentatives.
Dans la LNH d’aujourd’hui, en fait au hockey point, quand tu perds le duel des unités spéciales, tu perds le match.
Quand tu perds en plus le duel de l’intensité, bien là mon vieux tes chances de perdre sont aussi bonnes que les chances que le soleil se lève demain matin.
Et Carey Price se sent dans l’obligation de prendre le blâme dans l’élimination de son équipe. Ce mea culpa est tellement gros, gros comme dans grossier, que je me demande s’il ne s’agit pas plutôt d’une allégorie par le biais de laquelle Price tente de prouver l’absurdité de cette situation.
Électrocuté
Pour dire les choses comme elles sont, le Canadien s’est fait manger tout rond hier soir. En fait non. Il a été électrocuté par une équipe bien plus énergique que lui.
Le Lightning avait promis de disputer son meilleur match de la série pour stopper la remontée du Canadien et se propulser en finale d’Association. Il a tenu promesse. Rapide dans ses poussées offensives, parfait dans l’application d’un système défensif qui a paralysé le Canadien en zone neutre surtout, mais pratiquement dans toutes les zones, le Lightning a eu le plein contrôle du match. De la mise en jeu initiale au coup de tonnerre qui a mis un terme à la rencontre.
Jamais, jamais au grand jamais, le Canadien n’a été dans le coup. À l’exception de Brendan Gallagher qui s’est démené en première période, d’un flash ici ou là de Lars Eller, de P.K. Subban qui à trop vouloir en faire pour sortir son club du merdier n’a pas vraiment aidé sa cause et celle de l’équipe et de Carey Price qui a fait ce qu’il a pu dans ces circonstances, le Canadien s’est écrasé au lieu d’afficher la conviction promise pour forcer la tenue d’un septième match au Centre Bell.
Et c’est désolant.
Désolant, parce que c’est inexplicable. L’entraîneur-chef Michel Therrien a d’ailleurs reconnu qu’il ne pouvait expliquer pourquoi son club semblait aussi à plat autant sur le plan physique qu’émotif alors que l’importance du match dictait tout le contraire.
« Les réservoirs étaient vides », que le coach du Canadien a dit après le match.
Il avait raison. Mais ça ne veut pas dire que parce que c’est vrai que ce soit acceptable pour autant. Que non! En saison régulière quand le Canadien s’offrait des matchs aussi désolants, et dieu sait que c’est arrivé souvent, Carey Price sauvait la mise, et les deux points à l’enjeu.
Mardi soir, contre une équipe qui a joué un match parfait, une équipe qui avait donné un sens à sa soirée de travail, une équipe qui était seule sur la patinoire, Price ne pouvait gagner tout seul.
Pourquoi alors a-t-il pris seul le blâme?
Grandeur d’âme? Grand Leadership? Grande injustice? Un heureux mélange de tout ça? Je vous laisse le soin de décider.
Je trouve toutefois désolant que Carey Price se sente obligé de terminer sa saison historique de 44 victoires en saison régulière avec une telle autocritique. Une autocritique démesurément sévère en comparaison au piètre effort démontré par ses coéquipiers devant lui.
Après sa saison de 110 points, le Canadien a évité une élimination trop hâtive en première ronde en résistant à la remontée des Sénateurs d’Ottawa.
En gagnant deux matchs une fois acculé au pied du mur, le Canadien a évité l’affront d’un balayage aux mains du Lightning en deuxième ronde.
Mais l’absence de toute forme de compétition dans son dernier match représente une sortie désolante après une saison au cours de laquelle le Canadien n’a jamais été en mesure de complètement balayer du revers de la main les doutes affichés à son endroit.
Et ça c’est dommage. Pis encore, c’est désolant.