MONTRÉAL – Ce n’est pas tous les jours qu’un ancien espoir de la LNH renonce à sa carrière de hockeyeur, avant même de fêter son 24e anniversaire, pour devenir agent de joueurs en plus de retourner sur les bancs d’école peu de temps après.

Mais Olivier Fortier a toujours démontré beaucoup de lucidité, même que ce plan lui trottait dans la tête depuis quelques années déjà. Il a donc effectué ce courageux saut au lieu de se tourner vers l’option commune d’un parcours en Europe.

L’ancien capitaine de l’Océanic de Rimouski s’est donc rapidement retrouvé à arpenter les arénas du Québec pour la firme Momentum Hockey en parallèle à ses exigeantes études au programme de droit à l’Université Laval.

Évidemment, ça n’empêche pas que l’ancien espoir du Tricolore, qui avait été repêché en 3e ronde en 2007 au 65e rang, aurait voulu repousser cette deuxième carrière de quelques années.

« Bien sûr, ce n’était pas prévu que ça se produise aussi rapidement parce que j’espérais jouer encore longtemps et je rêvais d’une carrière dans la LNH comme tous les autres. Mais, au fil des années, j’ai subi beaucoup de blessures et d’opérations, ce qui a fini par ralentir mon développement », a raconté Fortier avec une belle éloquence au RDS.ca.

C’est à la suite d’une dernière saison professionnelle parsemée d’embûches en 2012-2013 que sa décision est devenue pratiquement irrévocable.

Olivier Fortier« Ma quatrième saison a été assez difficile, je traînais une blessure à un genou et ça m’affectait beaucoup. De plus, plusieurs jeunes faisaient leur arrivée dans l’organisation et j’ai passablement réfléchi à mon avenir », a-t-il expliqué. 

Puisqu’il avait été ralenti par cet autre pépin physique, il avait dû entamer celle-ci dans la ECHL avec les obscurs Solar Bears d’Orlando (photo). Sans confirmer la fin de sa carrière, ce détour a renforcé la vision qu’il avait élaborée.

« C’est l’un des facteurs qui a pu contribuer à ma décision. À un certain moment, c’est important de pouvoir s’autoévaluer. J’avais d’autres objectifs dans la vie et je m’étais toujours dit que je ne m’acharnerais pas à vouloir percer dans la LNH », a révélé Fortier avec réalisme.

« Je voyais que mes chances de grimper à temps plein pendant dix ans dans la LNH étaient plutôt minces à cette époque », a ajouté l’ancien capitaine de l’Océanic de Rimouski.

Fortier n’a pas eu besoin de chercher son inspiration très loin. En effet, il a été tenté par cette avenue en raison de son lien avec son agent Christian Daigle qui s’est développé pendant plusieurs années.

« Il était mon agent depuis l’âge de 15 ans et on avait vraiment bâti une belle relation. On jasait régulièrement du fait que j’aimerais demeurer dans le hockey après ma carrière. Finalement, une belle opportunité s’est présentée puisque Momentum grossissait très rapidement et ils avaient besoin d’un nouvel agent au Québec. Le timing était vraiment bon pour moi et j’y avais réfléchi depuis un bon bout de temps donc j’ai sauté sur l’occasion sans tarder », a justifié l’intervenant.

Tout de même, Fortier a pris le temps de peser le pour et le contre d’une incursion sur la scène du hockey européen.

« C’est certain que je me suis posé cette question et j’ai même regardé les offres qui étaient à ma disposition pour être certain de prendre une décision éclairée. Il faut dire qu’on ne reçoit pas autant d'offres impossibles à refuser quand on n’a pas joué dans la LNH ou amasser de grosses statistiques dans la Ligue américaine », a confié celui qui a été repêché 22 rangs plus tard que Yannick Weber.

L’exigeant mandat de jumeler études et travail

« Pour vous donner l’exemple d’une semaine habituelle, je me suis consacré à l’école toute la journée du lundi au mercredi et j’enchaîne avec du travail en soirée jusqu’à environ 22 h. Jeudi matin, je suis parti de Québec vers 5 h 30 du matin pour le Saguenay afin de voir un tournoi midget pour du recrutement et du dépistage. Je vais revenir à temps pour le match des Remparts vendredi soir et ma fin de semaine sera réservée au hockey. Je ne compte pas les heures, mais ça ressemble à un horaire de 8 h à 22 h presque sept jours sur sept. C’est un petit coup à donner parce que l’école me prend du temps, mais ce sera bientôt plus facile », a détaillé l’agent.

Fortier n’avait pas l’intention d’étourdir qui que ce soit ou de se plaindre une seule seconde. Au contraire, il adore sa nouvelle orientation professionnelle. Tout de même, s’il avait été du style à se contenter du minimum, il aurait pu se diriger vers le métier d’agent sans se lancer dans d’exigeantes études en droit. Par contre, il avait été en mesure de combiner l’école et le hockey durant son séjour dans la LHJMQ étant même nommé joueur-étudiant de l’Océanic en 2008.

Olivier Fortier« Dans ma tête, j’étais décidé de faire un retour aux études. Pour moi, ça allait de soi d’aller à l’université », a exposé l’homme à l’horaire chargé.

Quant au choix de se tourner vers le droit, Fortier y a décelé trop d’avantages pour préférer un autre domaine.

« Le droit m’aide considérablement pour le côté contractuel ou les conventions collectives par exemple, en plus de donner de la crédibilité. Mais ce n’est pas seulement pour mon travail d’agent que j’ai choisi ce programme, j’ai toujours eu un intérêt pour celui-ci », a justifié l’attaquant qui se contente maintenant de jouer au hockey pour le plaisir dans ses rares temps libres.

À première vue, le chemin vers un retour en classe peut sembler facile, mais Fortier a dû convaincre de nouveaux dirigeants de miser sur lui. En effet, un seul étudiant adulte pouvait faire son entrée et il a été l’heureux élu grâce à son parcours et ses notes amassées au cégep.

Fortier n’évolue peut-être pas dans la LNH, mais il se retrouve dans une position enviable alors qu’il devrait compléter son baccalauréat dans moins d’un an en plus d’œuvrer au sein d’une entreprise en expansion.

Ça n’empêche pas qu’il a dû se familiariser avec une vie complètement différente de celle d’un joueur de hockey.

« Le retour s’est très bien passé même si j’ai constaté rapidement que ça ne ressemblait pas du tout à l’horaire auquel j’étais habitué. Disons aussi que tu ne fais pas souvent de longues rédactions quand tu joues au hockey », a comparé Fortier qui a eu de bons mots pour le programme scolaire de la LHJMQ.

« C’est vraiment possible de réussir à l’école en jouant dans ce circuit. On était très bien encadré à Rimouski et mes notes ont pu me permettre de rentrer dans ce programme. »

Son expérience au profit de la relève

Même s’il n’a pas atteint la LNH, Fortier a vécu une panoplie d’expériences. En plus de son parcours dans le midget AAA et la LHJMQ, il a participé à des compétitions d’envergure comme la Coupe Memorial, la Série Subway, les tournois U17 et U18 sans oublier le repêchage, les camps d’entraînement et … les blessures.

Ça tombe bien puisqu’il éprouve un grand plaisir à partager son apprentissage et il a la chance d’être passé par là récemment ce qui favorise le contact auprès des jeunes.

« Ma passion, c’est de développer les jeunes et les préparer pour les étapes à venir. Je fais aussi la signature des contrats et je travaille toujours de concert avec Christian », a noté Fortier qui souhaite compléter son Barreau.

À sa troisième année au sein de Momentum Hockey, Fortier assume déjà plus de responsabilités axées sur le développement et le recrutement dans l’écurie comptant notamment sur Cédric Paquette, Simon Després, Antoine Roussel, Émile Poirier et Jérémy Roy comme clients. Olivier Fortier

Si Fortier s’est tourné vers ce métier, c’est qu’il a apprécié la vision de Daigle et il s’affaire maintenant à la reproduire. Il ne veut surtout pas être associé aux agents avec des réputations peu enviables.

« On a une approche un peu différente, c’est vraiment axé sur le développement et la progression. On a la chance d’être sélectif et on ne prend pas une tonne de joueurs avec nous. On consacre beaucoup de temps pour les aider à se développer que ce soit avec nous ou des ressources externes. C’est très humain avec nous », a assuré Fortier.

« L’important, c’est de s’amuser et de garder la passion. C’est une chose que j’ai remarquée, ce sont souvent ceux qui sont les plus passionnés qui finissent par passer », a-t-il enchaîné.

Pour l’avoir vécu, Fortier sait bien que ce ne sont pas tous les clients de son groupe qui réaliseront leur rêve, mais il espère qu’ils pourront vivre de beaux moments comme certains de ses préférés.

« C’est sûr que ma médaille d’or avec Équipe Québec U17 quand on était vraiment négligé se classe parmi mes plus beaux souvenirs. On avait battu l’Ontario qui misait notamment sur Logan Couture, P.K. Subban, Sam Gagner et John Tavares. Ensuite, le repêchage par le Canadien demeure un moment incroyable dans le haut de la liste. Je ne peux pas passer sous silence mes belles années à Rimouski, une place exceptionnelle où j’ai rencontré tellement de bonnes personnes.

Sans l’ombre d’un doute, Fortier n’oubliera jamais ses quatre matchs préparatoires dans l’uniforme du CH incluant le match à Roberval pour Hockeyville en 2008.

« J’en conserve de très bons souvenirs et j’essaie de faire profiter les jeunes de mes expériences. Ça peut les aider à accéder au prochain niveau ou quand ils sont un peu nerveux », a conclu Fortier qui n’a vraisemblablement pas perdu de temps à utiliser son vécu au profit des autres.