Le départ de la Suisse pour Bob Hartley et son retour dans la Ligue nationale a influencé la vie de beaucoup de gens. Sa femme Micheline, à qui il avait promis une aventure ferme de deux ans dans ce pays magnifique, retrouvera à Calgary des gens qu'elle connaît et qu'elle aime, Anne et Jay Feaster et leurs cinq enfants, des amis de longue date.

Ce virage de 180 degrés dans sa carrière coûte à sa station de télévision un analyste respecté et crédible à laquelle il était resté associé sporadiquement depuis son aventure outre-mer.

Les joueurs des Lions de Zurich, que Hartley a entraînés avec lui dans un improbable championnat, savent que les choses ne seront pas pareilles sans lui la saison prochaine.

Finalement, et c'est le dénouement le plus difficile, il y a là-bas un adolescent de 14 ans qui avait vu en lui le père qu'il n'a pas. Dès que les premières rumeurs ont circulé au sujet de son retour possible dans la Ligue nationale, le garçon lui a plusieurs fois demandé de ne pas partir. Et depuis, il l'appelle régulièrement. Le système téléphonique Skype via internet, qui leur permet de jaser tout en se regardant dans les yeux, leur permet d'entretenir les liens profonds d'amitié qui les unissent. Hartley lui a fait la promesse de garder le contact, mais pour l'enfant, Calgary, c'est au bout du monde.

«Quand je suis arrivé là-bas, il était toujours près du banc, discret mais toujours très utile, raconte l'entraîneur. Il remettait les bâtons aux joueurs et accomplissait toutes sortes de petites tâches. J'ai commencé à m'intéresser à lui et à son histoire. J'ai appris qu'il était issu d'une famille séparée, que sa mère travaillait 15 heures par jour pour assurer la subsistance de ses enfants et qu'il y avait quelque part un père qu'il ne voyait plus. Je l'ai pris sous mon aile. Il est même venu manger et dormir à la maison. J'en ai fait mon fils adoptif.»

Hartley et son adjoint Jacques Cloutier lui ont fait cadeau de casquettes et de t-shirts de l'Avalanche. L'entraîneur adjoint des Mooseheads de Halifax, Steve Hartley, en visite chez son père, lui a apporté une casquette de l'équipe. En signe d'appréciation, les joueurs des Lions lui ont donné différentes petites choses. De fil en aiguille, sans s'imposer, il est devenu un membre attentionné de l'équipe. Dans les photos qui ont été prises sur la glace après la conquête de la coupe, il apparaît toujours aux côtés de Hartley. Comme il parle anglais et allemand, Hartley lui avait demandé de lire pour lui les médias et les blogues de la Suisse allemande et de lui fournir si possible de l'information sur les équipes rivales.

«On dit parfois qu'il est difficile de répondre aux questions des journalistes, mais ça l'est davantage quand vient le temps d'expliquer certaines choses à un garçon auquel on est attaché», dit-il.

Peu de temps avant son départ, Hartley l'a invité à patiner sur une patinoire publique. Le garçonnet lui a fait des confidences personnelles. L'entraîneur lui a suggéré de tenter de refaire les liens avec son père. Il a obtenu un non catégorique de sa part.

«Il dit toujours qu'il va venir me chercher, mais il ne le fait pas. Il me promet d'assister à mes matchs de soccer, mais je ne le vois jamais», lui a-t-il expliqué.

«Avant mon départ, je lui ai accordé beaucoup de temps, ajoute Hartley. Je ne voulais pas qu'il dise la même chose de moi un jour. C'est un bon kid. Il s'ennuie et il me téléphone quasi tous les jours. Il aime Micheline qui avait l'habitude de lui faire des gâteaux au citron. Je vais garder le contact avec lui, c'est sûr», promet-il.

Le garçon à tout faire des Lions de Zurich est déjà, dit-on, un fan inconditionnel des Flames. Le court séjour de Hartley en Suisse l'a marqué, mais certainement pas autant que le garçon qui le considère aujourd'hui comme le père qu'il n'a plus.

Pas de chicane

C'est un très beau hasard que Michel Therrien et Bob Hartley reprennent du service en même temps dans la Ligue nationale. De très bons entraîneurs, ils n'auraient jamais dû séjourner aussi longtemps sur les lignes de côté.

Ils seront donc appelés à s'affronter encore à un haut niveau. Quand leurs équipes se mesurent, il n'y a pas un moment dans la saison où l'un veut plus triompher de l'autre. C'est beaucoup plus une question de fierté qu'autre chose. Néanmoins, il ne faudra jamais s'attendre à les voir s'invectiver ou se critiquer par le biais des médias. Il existe d'ailleurs un pacte entre eux.

Pendant que Hartley dirigeait Atlanta et que Therrien en faisait autant chez les Penguins, ils se seraient engueulés s'ils n'avaient pas été liés par une franche et durable amitié. À l'occasion d'une série de deux parties aller-retour, Ilya Kovalchuk et Sidney Crosby avaient passé le premier match à s'invectiver et à se frapper. Ils avaient poursuivi leur petite guerre personnelle devant les journalistes après la soirée, ce qui avait mis la table pour le match du lendemain à Pittsburgh.

«J'étais allé voir Michel après la première rencontre afin de m'assurer qu'on n'embarquerait pas là-dedans, lui et moi, raconte Hartley. Nous sommes des amis. Nous avons travaillé ensemble derrière un banc. Il n'était pas question qu'on se mêle publiquement de ça. Nous étions bien d'accord là-dessus.»

Le message qu'il lui avait livré avait été très clair. «Je vais protéger Kovalchuk et tu vas te ranger derrière Crosby, mais si nous ne sommes pas prudents, cette affaire va vite retomber dans notre assiette. On ne se câlissera pas les doigts dans la trappe à souris», lui avait-il dit dans soin style coloré.

Les médias n'ont jamais pu leur arracher une déclaration controversée. Et cela ne risque pas de se produire dans les face-à-face Canadiens-Flames l'hiver prochain.

Deux lourdes pertes

Avec leur retour dans le hockey, RDS et TVA Sports viennent de perdre deux de leurs meilleurs analystes-débatteurs. Ceux qui en seront les premiers bénéficiaires sont les membres des médias attitrés à la couverture du hockey car Hartley et Therrien ne les verront plus jamais du même oeil.

Ils ont tous les deux admis que leur expérience dans ce milieu contribuera à faire d'eux des entraîneurs plus complets. Ils ont maintenant une meilleure compréhension du travail des journalistes, ce qui fera d'eux de meilleurs communicateurs. Parce qu'ils savent mieux ce qui se passe de l'autre côté de la clôture, ils seront mieux outillés pour affronter ceux qu'ils voyaient souvent comme des empêcheurs de tourner en rond.

«On s'est souvent fait dire que le côté noir de notre métier était les médias. Toutefois, après être passé deux ans dans ce milieu, je suis convaincu que je serai plus compréhensif dans mes relations avec la presse», affirme Hartley.

Et puis, il y a l'âge. Au fil du temps, l'entraîneur vieillit et s'assagit dans certains cas. Hartley ne cache pas qu'il sera un coach différent à son retour après cinq ans d'absence.

«Nous changeons tous, dit-il. Quand un journaliste me demande si je suis un homme différent, je lui retourne la question. Et toi, es-tu meilleur qu'il y a 10 ans? Tes entrevues sont-elles mieux préparées? As-tu une meilleure compréhension de ton métier? Ton style d'écriture a-t-il changé? C'est la même chose pour les entraîneurs. Nous sommes certainement meilleurs qu'il y a 10 ans.»

Une influence néfaste

Michel Therrien n'a pas une très haute opinion de Scott Gomez. Ces deux-là n'auront probablement pas l'occasion de se croiser. Non seulement est-il usé à la corde, mais Gomez est souvent indifférent à tout ce qui se passe autour de lui. En plein le genre d'athlète que Therrien ne peut tolérer.

Que fera-t-on de lui? Impossible de racheter son contrat sans que cette entente payable aux deux tiers de sa valeur, et qu'on devrait répartir sur quatre ans, n'ait une incidence sur la masse salariale durant tout ce temps.

L'obliger à écouler le reste de sa carrière à Hamilton serait une situation plus risquée encore puisqu'il se retrouverait dans une filiale qui accueillera plusieurs belles recrues la saison prochaine. Un Gomez mécontent, qui se traînerait assurément les patins, serait d'une très mauvaise influence sur les espoirs de l'organisation.

Larry Robinson

Il manque encore un homme derrière le banc du Canadien : un entraîneur des défenseurs.

Le nom de Jean-Jacques Daigneault a été avancé. Personnellement, mon choix serait Larry Robinson dont le contrat avec les Devils prendra fin le premier juillet. Je doute toutefois que Marc Bergevin prenne cette direction, sans quoi il aurait déjà demandé à Lou Lamoriello de le libérer.

Robinson, l'un des grands Glorieux dans l'histoire du Canadien, est le Jacques Laperrière des temps modernes. Attentif au travail des défenseurs, compréhensif, respectueux et capable de leur transmettre sa vaste expérience et ses valeurs, il serait un entraîneur de classe à greffer au personnel déjà en place.