« Manque d'effort, éloignement du plan de match, quantité d'erreurs, pas assez de tirs, trop d'espace pour l'adversaire, problèmes de concentration, mauvaises décisions aux mauvais moments, on complique trop les choses, donnons crédit à l'adversaire, ils veulent plus que nous, etc... »

Voilà un échantillon des commentaires émis par les joueurs et entraîneurs du Canadien après les 5e et 6e matchs de cette série contre les Bruins, série qui connaîtra, contre toute attente, un dénouement dramatique lundi soir au Centre Bell. Des commentaires qui nous forcent à conclure que le Tricolore est en crise d'identité et ce, au pire moment de la saison!

On pourrait bien tenter par tous les moyens de disséquer techniquement et précisément chaque match de la série jusqu'à maintenant, mais globalement, l'effet combiné de la performance respective des deux équipes nous conduit directement à cette conclusion toute aussi simple qu'inquiétante. La meilleure attaque de la LNH, celle qui n'avait de complexes contre personne et qui faisait payer très cher la moindre bévue de l'adversaire, bat sérieusement de l'aile. Les défenseurs, si constants tout au cours de la saison, sont impunément bafoués, seconde après seconde, par chacun des attaquants des Bruins. Les miracles du jeune prodige devant le filet ne font plus la différence. Même « le magicien » semble à court de tours ou d'illusion...

Généralement, une formation sportive talentueuse réussit à se sortir de ce genre de situation. Il suffit simplement de concocter le plan de relance, de le soumettre aux joueurs, de le marteler dans leur tête soir après soir et d'attendre que le temps fasse son œuvre. Mais voilà! Cette fois, il manque un élément clé à cette équation. Du temps, il n'y en a plus!

En 24 heures à peine, Guy Carbonneau et ses adjoints vont essayer de trouver la façon de renverser la tendance. Mais comment faire? Comment redonner du lustre à un jeu de puissance complètement nul depuis le début de la série? Comment déprogrammer Alex Kovalev et lui imposer un nouveau « style », après ses succès de la dernière saison? Comment donner à Mark Streit les muscles qu'il ne possède pas, à Mathieu Dandenault la touche magique qu'il n'aura jamais? Comment décoller Lucic, Nokelainen, Krejci, Schaefer, Sturm et Metropolit du dos de Markov et Komisarek? Comment convaincre Michael Ryder et Guillaume Latendresse qu'ils seraient en uniforme s'ils se concentraient à tirer au filet et à déranger Tim Thomas au lieu de chercher à coudre de la dentelle à chaque présence? Comment y arriver avant lundi, 19 heures?

Aux joueurs de répondre

En séries éliminatoires, l'ordre naturel des choses n'existant plus vraiment et le temps manquant cruellement pour amorcer un grand virage, ce sont finalement les joueurs eux-mêmes qui doivent trouver la réponse à ces questions et dicter l'allure de la dernière rencontre. Claude Julien le disait lui-même après la victoire de samedi. À cette étape d'une saison de hockey, les entraîneurs n'ont plus rien à enseigner et s'abandonnent eux aussi aux émotions extrêmes que procurent ces matchs sans lendemain.

Alex Kovalev, Saku Koivu, Tomas Plekanec, Christopher Higgins, Andreï Markov et Roman Hamrlik devront donc se rabattre exclusivement sur leur talent et leur expérience pour briller dès la première seconde du dernier match. Carey Price et les frères Kostitsyn devront réagir en vétérans, même s'ils ne le sont pas. Et tous les autres devront se surpasser à chaque présence. Avec comme seul ingrédient commun, pour tous, le souvenir encore bien net d'une saison au cours de laquelle ils ont dominé légitimement leur adversaire.

Cela peut paraître simpliste, mais franchement, il n'y a plus de temps pour les théories savantes. Le Canadien est tombé en crise d'identité au pire moment et ne peut trouver le mode de guérison ailleurs que dans son propre vestiaire. Il en est capable, du reste. Car il y a toujours ce 7e match, un match ultime disputé à Montréal, dans un environnement généralement hostile pour l'adversaire et hautement tonifiant pour l'équipe locale. Un simple appel aux lois de la probabilité nous incite à croire que les Bruins ne peuvent logiquement battre le Tricolore trois fois de suite. Alors...

Chose certaine, ce sera toute une soirée au Centre Bell!