L’enquête indépendante concernant la gestion de l’affaire Kyle Beach par Donald Fehr et l’Association des joueurs de la LNH en 2010 n’a pas révélé de faute de la part du syndicat ou de son président.

Dans un rapport de 19 pages rendu public par l’AJLNH vendredi, la firme d’avocats Cozen O’Connor conclut en un manque de communication pour expliquer l’absence de suivi à l’époque dans le dossier et non en un manque individuel ou systémique au sein de l’Association des joueurs.

« Après un examen approfondi du dossier contemporain, des politiques et pratiques en vigueur au syndicat à l’époque, et les souvenirs de chacune des parties des contacts avec l’AJLNH ou le programme relatif aux abus de substances et à la santé comportementale (SABH ou substance abuse and behavioural health), nous ne pouvons identifier aucun acte répréhensible individuel ou échecs institutionnels de la politique ou de la procédure par Fehr, le personnel de l’AJLNH ou le SABH concernant le traitement des allégations de Beach », peut-on lire en page 4 du rapport.

« Les avertissements de Beach concernant [Brad] Aldrich n’ont pas été pris en charge en raison d’un manque de communication et d’un malentendu, plutôt que d’une défaillance individuelle ou systémique. »

Le syndicat a lancé l'enquête en novembre, après qu'une enquête indépendante sur la mauvaise gestion des allégations par les Blackhawks eut soulevé des questions sur ce que Fehr et d'autres savaient à l'époque et pourquoi ils n'ont pas agi. Aldrich avait dit aux enquêteurs que la rencontre était consensuelle, mais le scandale a secoué les Blackhawks et a entraîné des changements radicaux dans les opérations de l'équipe. Il a aussi eu des effets d'entraînement à travers la LNH.

Le conseil d'administration de l'AJLNH a vu le rapport la semaine dernière. Les joueurs ont voté en faveur de sa publication.

Beach, aujourd’hui âgé de 32 ans, a mentionné qu’il avait « rapporté chaque détail à un représentant de l’AJLNH » et qu’il croyait que deux personnes en avaient ensuite parlé à Fehr. Beach a mentionné ne pas s’être senti protégé par le syndicat et a dit ne pas comprendre comment Fehr « peut rester en charge de l’AJLNH » après avoir échoué dans son unique rôle, celui de protéger les joueurs de la LNH.

La dernière enquête comprenait des examens d'environ 20 000 courriels et enregistrements téléphoniques, datant de 2010 et 2011, et comprenait des entretiens avec 11 témoins, dont le médecin Brian Shaw, du programme de toxicomanie et de santé comportementale. Beach et un joueur non identifié, qui a déclaré avoir eu des conversations inappropriées avec Aldrich, ont tous deux refusé d'être interviewés.

Rappel des faits

En octobre 2021, Beach, dont l’identité n’avait pas été dévoilée à l’époque, a déposé une poursuite mentionnant qu’il avait été victime d’agressions sexuelles sur une période prolongée par l’ancien entraîneur vidéo des Blackhawks Brad Aldrich.

Selon les conclusions de l’enquête qui s’en est suivie, les dirigeants des Blackhawks auraient tenu une rencontre concernant l’affaire le 23 mai 2010 et ont décidé de ne pas aborder la question avant la fin des séries éliminatoires.

Le 14 juin 2010, cinq jours après la conquête de la Coupe Stanley par Chicago, le directeur des ressources humaines des Blackhawks a laissé le choix à Aldrich de se retirer par lui-même ou d’être licencié si les affirmations de Beach s’étaient révélées exactes. Aldrich a alors décidé de quitter ses fonctions et on lui a permis de participer aux célébrations de l’équipe à la suite de leur championnat. Il s'est rapidement retrouvé à l'emploi de USA Hockey par la suite.

La firme a reconnu la difficulté de reconstituer des événements d'il y a 11 ans et a affirmé que les conclusions étaient basées sur « des souvenirs manifestement imparfaits et incomplets de quelques individus, non corroborés par des preuves documentaires ». Le rapport a également reconnu la probabilité que les souvenirs des témoins soient « inévitablement influencés » par un rapport distinct qui examinait le rôle de l'équipe.

Lumière sur la séquence des événements

La firme Cozen O’Connor s’est attardé sur deux contacts entre des joueurs – incluant Beach ou des représentants des joueurs – d’une part et des représentants de l’AJLNH de l’autre.

Des représentants de deux joueurs figurant sur la formation des Blackhawks lors des séries de 2010 ont contacté Fehr à deux reprises concernant Aldrich à la fin de 2010 et au début de 2011. À la même période, ces joueurs ont aussi contacté le Dr Brian Shaw, l’administrateur du programme relatif aux abus de substances et à la santé comportementale.

L’agent de joueurs Ross Gurney a téléphoné à Fehr pour l’informer d’une « situation difficile » concernant un de ses clients qui avait eu un « problème avec un ancien entraîneur » qui était maintenant à l’emploi de USA Hockey. Gurney dit avoir demandé à Fehr d’informer USA Hockey des inquiétudes de Beach, qui craignait qu’Aldrich récidive à la suite de son embauche afin de travailler lors d'un tournoi.

Gurney a indiqué aux enquêteurs qu'il était sûr d'avoir décrit Aldrich comme un « pédophile » ou un « prédateur sexuel » lors d'une conversation avec Fehr pour l'avertir du comportement d'Aldrich.

Fehr a insisté sur le fait qu'il s'en serait souvenu, si ça s'était produit. Il a mentionné à plusieurs reprises aux enquêteurs qu'il ne se souvenait pas d'avoir été informé de l'incident au moment où il s'est produit. Les enquêteurs ont également déterminé que les quelques commentaires de Fehr concernant les allégations « étaient cohérents avec son affirmation ».

Gurney s’est aussi souvenu avoir fait part à Fehr de son inquiétude concernant la détresse de son client et Fehr lui a alors suggéré d’entrer en contact avec le Dr Shaw, ce qu’il a fait début 2011.

Lors de cette conversation, Beach a décrit en détails les agressions d’Aldrich. Beach a ajouté qu’il était « en détresse et traumatisé » et que son seul souci était de mettre USA Hockey au courant des inconduites d’Aldrich.

Selon ce qu’a mentionné le Dr Shaw aux enquêteurs, Beach aurait alors refusé d’être référé à un psychologue par l’entremise du programme relatif aux abus de substances et à la santé comportementale. Le Dr Shaw a alors jugé qu’il devait se soumettre au secret professionnel et garder le contenu de la discussion confidentiel, expliquant pourquoi il n’en a pas fait part à Fehr par la suite.

La firme d’avocats s’est aussi penché sur des échanges de courriels entre des agents de joueurs et Fehr, sans découvrir de manque flagrant de la part du président de l’AJLNH.

La firme a exprimé avoir fourni à l'avocat général de l'AJLNH une série de recommandations concernant des mesures supplémentaires, qui pourraient être mises en place pour mieux gérer des situations similaires à l'avenir. L'AJLNH n'a pas immédiatement répondu à un message demandant des informations sur ces recommandations, qui ne figuraient pas dans le rapport.