La loterie pour le premier choix au repêchage de 2020 a été l’une des plus particulières de l’histoire et certainement la plus unique depuis la Loto-Crosby de 2005. Ironiquement, le gros lot était encore une fois un attaquant électrisant qui évoluait avec l’Océanic de Rimouski, cette fois Alexis Lafrenière.

Lafrenière était considéré comme le premier choix unanime pour pratiquement toute l’année et les Rangers n’ont pas hésité à le sélectionner lorsqu’ils ont remporté la première sélection.

Par contre, c’est là que s’arrêtent les similarités entre le natif de Saint-Eustache et le capitaine des Penguins. Sidney Crosby a pris la Ligue d'assaut en tant que recrue avec une saison de 102 points, tandis que Lafrenière n’a que 13 points en 44 matchs. Évidemment, ce n’est pas vraiment juste de comparer qui que ce soit avec l’un des meilleurs joueurs de ce millénaire, mais il reste que certains commencent à s’inquiéter de la performance du jeune Québécois.

Le talent brut de Lafrenière est évident, mais il est facile d’oublier qu’il n’a que 19 ans. Il ne pourra même pas commander légalement une bière pour encore deux ans à New York. Très peu de joueurs sont capables d’être des vedettes instantanément dans la LNH, surtout à ce jeune âge. Il faut dire que les Rangers ne lui ont pas vraiment laissé la chance de s’adapter à la Ligue à ses débuts.

Trop de responsabilités, trop de changements, trop vite

Lafrenière s’est taillé un poste dans la formation partante des Rangers pour entamer la saison, à la surprise d’absolument personne. C’est plutôt le rôle que lui a donné l'entraîneur-chef David Quinn qui était discutable. Dès son deuxième match, Quinn a placé Lafrenière sur le premier trio, aux côtés de Ryan Strome et Artemi Panarin. Un rôle sur le premier trio pour un club qui s’attend à être dans la course aux séries est une tâche monumentale avec très peu de marge de manœuvre. C’est beaucoup de pression sur un joueur qui tente simplement de s’adapter à la vitesse de la Ligue nationale.

Quinn ne lui a pas fait de faveur non plus lors des matchs suivants, le déplaçant un peu partout dans l’alignement. Lors de ses 15 premiers matchs, Lafrenière a disputé entre 20 et 25 minutes avec 5 combinaisons de trios différentes, n'obtenant qu’un seul point, un but vainqueur en prolongation face aux Sabres de Buffalo. Lafrenière devait non seulement s’adapter à la vitesse de la Ligue nationale, il devait le faire tout en s’adaptant à de nouveaux coéquipiers soir après soir.

Après cette disette, Quinn a finalement placé Lafrenière sur un trio stable et il a semblé commencer à trouver son rythme dans la LNH. Du 20 février au 11 mars, Lafrenière a disputé plus de 70 minutes sur le 2e trio avec Mika Zibanejad et Pavel Buchnevich et moins de 10 minutes avec n’importe quelle autre combinaison de joueur. Cette stabilité semble l'avoir aidé, alors qu’il a marqué 6 points en 10 matchs. Pas encore des chiffres de joueur de concession, mais définitivement un pas dans la bonne direction. Cette fois, c’est le succès du club qui a fait défaut, avec une fiche de 5-5-0 en 10 matchs. Quinn a donc décidé de jongler avec ses lignes encore une fois, envoyant Lafrenière sur le 3e trio, formant une combinaison très intrigante.

Le trio des espoirs

Lors du match du 13 mars face aux Bruins, Quinn a décidé de réunir trois récents choix de premier tour des Rangers sur le 3e trio : Lafrenière (1er choix en 2020), Kaapo Kakko (2e choix en 2019), et Filip Chytil (21e choix en 2017). Trois joueurs qui ont connu des débuts de carrière plutôt lents, mais qui sont encore très jeunes; Chytil est l'aîné du groupe à seulement 21 ans. En 19 matchs dans un rôle réduit en responsabilité et pression sur le 3e trio, les trois jeunes laissent leur créativité aller et ça porte fruit jusqu’à présent. Chytil, Kakko, et Lafrenière combinent pour 24 points en 19 matchs et les Rangers ont l’avantage lorsqu’ils évoluent ensemble à forces égales.

Lafrenière-Chytil-KakkoQuinn place les trois joueurs dans des positions favorables, alors qu’ils commencent près de 45 % de leurs présences en territoire offensif, plus que tout autre trio régulier pour New York depuis le 13 mars, maximisant leur force de frappe et minimisant leurs responsabilités défensives. Si Quinn peut développer ces trois joueurs en attaquants de premier plan au cours des prochaines années, l’attaque des Rangers pourrait être parmi les plus intimidantes de la LNH. Ils sont déjà 6e dans la LNH en buts marqués par match cette saison, menés par Panarin (un finaliste pour le Hart l’an dernier).

Lafrenière n’est peut-être pas dans la course pour le trophée Calder à sa première saison dans la LNH, mais plus important encore, il démontre des signes de progrès. Tout ce qui compte pour New York, c’est qu’il continue sa trajectoire ascendante. Le pousser trop haut trop vite ne l’a clairement pas aidé. Avec un peu de patience et du bon coaching, il n’y a aucun doute que Lafrenière a le potentiel de répondre aux attentes d’un premier choix au repêchage.